La confiance entre le lecteur et les médias n'est pas entièrement établie.
La confiance entre le lecteur et les médias n’est pas entièrement établie.

Le Maghreb bouge, sa presse aussi. De ce fait l’Union Européenne a jugé utile de travailler à la mise en place d’un code de déontologie de la presse au Maghreb. La délégation de l’UE en Tunisie a réuni une vingtaine de patron de presse originaires de Mauritanie, du Maroc, d’Algérie, de Tunisie et de Libye ainsi que des experts internationaux et des journalistes pour un forum en Tunisie : Pour un code de déontologie de la presse maghrébine.

Pendant deux jours ils discutent d’un texte de charte rédigé par un comité de rédaction, présidé par Hassan Arfaoui rédacteur en chef du magazine “Réalités”. Le texte préliminaire comprend 19 articles tous discutés et modifiés au cours des deux jours de rencontre avec pour objectif l’adoption d’une charte à la fin des deux jours.

L’initiative a le mérite d’exister en ces temps où les dépassements journalistiques sont quotidiens et où la nécessite de la mise en place d’un cadre de travail est urgente. Reste qu’une fois assis autour de la table il a fallu beaucoup échanger pour que les participants trouvent un accord général.

Le premier problème est celui de la légitimité. Ainsi un participant s’interroge : « De quelle légitimité je dispose pour signer un code de déontologie maghrébin et retourner chez moi pour le présenter ? » Même préoccupation pour une journaliste marocaine qui explique que des institutions professionnelles existent dans son pays et qu’elle ne peut décemment pas rentrer au Maroc et proposer un tel code.

Laura Baeza, chef de la délégation de l’UE en Tunisie, délégation à l’origine du forum, a tenu à préciser que pour elle il s’agissait avant tout d’adopter un code qui serait appliqué dans les rédactions des personnes présentes, permettant ainsi de donner plus de poids et de crédit au travail des ces journaux.

Mais à quoi bon travailler sur un texte s’il n’est pas partagé de manière générale ? De nombreux participants ont d’ailleurs souligné la différence de situation dans chaque pays, qui rend difficile la discussion : certains pays ont déjà un code ou des instances de régulation.

Autre interrogation importante pour les participants : qui a rédigé la charte proposée ? Une question posée plusieurs fois sans qu’aucune réponse claire ne soit donnée.

Autre problème : la langue. Le texte dans sa version originale a été rédigé en français puis traduit en arabe. De nombreux participants se sont plaint de la qualité de la traduction, considérant qu’il était difficile de discuter sur différents textes.

Encore une fois la chef de la délégation de l’UE a coupé court : « La presse maghrébine ne peut pas attendre de refaire cet exercice ailleurs. Il faut un accord sur un texte. La presse maghrébine n’a pas le temps, elle a besoin de votre protection » a-t-elle déclaré aux directeurs de journaux.

De nombreux points ont été abordés : fonction du journaliste, acquisition de document, question de la vie privée… Mais la méconnaissance des participants des chartes existantes, des institutions et des pratiques dans les différents pays a été à l’origine de longs échanges.

Beaucoup de participants ont demandé que soit mis en place une commission ou un observatoire de déontologie au niveau maghrébin pour le suivi de l’évolution et du respect la charte.

Par ailleurs l’absence de journalistes, pourtant invités, pose problème. Comment adopter un code de déontologie sans la présence en masse des membres de cette profession ? Sans la présence de membres des syndicats nationaux ? Leur présence aurait sans doute permis de renforcer les droits des journalistes qui ne représentent que quatre articles sur les dix-neuf et aurait donné une autre coloration à cette charte, qui n’aurait pas seulement été celle mise en place par les directeurs de journaux, mais un texte par et pour toute la profession. En effet les droits présentés dans la charte sont très succincts assurant au journaliste le libre accès aux sources, la clause de conscience, sa protection et un contrat ainsi qu’une rémunération.

Les disparités entre les pays sont grandes si bien que trouver des points d’accord sur tous les sujets a été compliqué. Mais surtout si l’idée de mettre en place un code de déontologie au niveau du Maghreb est intéressant il semble judicieux de commencer par travailler à la mise en place d’un code en Tunisie.