C’est notre libre arbitre qui fait de nous ce que nous devenons, et ce n’est ni Bush, ni Chirac, ni la violence aveugle, ni l’usurpation criminelle des dictatures, ni le conditionnement des appareils, ni l’aliénation des opportunismes qui pourront nous l’enlever.

On admet facilement que si l’être humain avait été créé, si il était programmé, il ne disposerait pas de libre arbitre, or ce faux débat ne signifie absolument plus rien aujourd’hui dans le retour de la religiosité en Tunisie, nous y vivons et nous constatons qu’il est de plus en plus le fait d’une classe de jeunes diplômés et avertis des choses de la vie, comme l’histoire, la philosophie, les idéologies, l’action syndicale et politique, les événements qui bouleversent la planète dans le bon ou mauvais sens ; en tant qu’enseignant, et très souvent en rapport sur le plan universitaire avec mes collègues militants de la gauche démocratique ou autres, en tant qu’ancien militant de l’extrême gauche française dans les années de plomb des fraction autonomistes et du maoïsme français, je reste perplexe devant certains discours rétrogrades et archaïques sur les réalités tunisiennes, leurs évaluations et leurs évolutions .Ces discours sont le fait des appareils politiques tunisiens autorisés ou pas, collaborationnistes ou réfractaires, car les services du régime tyrannique savent qu’ils sont devant l’émergence d’un nouveau phénomène qu’ils essaient de récupérer par la carotte ou le bâton . Les anciens d’Ennahda, quelques uns d’entre eux sont aussi dépassés par les événements, je suis même très surpris que ceux qui font les meilleurs analyses sur la question sont des gens comme Abdallah Zouari qui a passé des longues années en prison, ou pour l’extrême gauche, TBB, qui de sa position et ses points de vue n’est pas du tout effrayé ou surpris par le phénomène, des fois dans ses discours ou ses discussions je constate même des éloges admiratives, sur ces nouvelles énergies de musulmans tunisiens qui expliquent et militent pour l’indépendance et la démocratisation du pays d’une façon pragmatique, avec un déterminisme et un savoir faire qui dépasse et de loin les calculs des chapelles, et les réputations fétichistes..

Si des gènes dictent notre comportement, si notre âme a été façonnée par Dieu, alors notre libre arbitre n’est pas une illusion. Ceux qui pour une raison ou une autre considèrent que c’est une illusion qui ne résistera jamais à l’épreuve de la pratique démocratique, des règles et des institutions, se trompent aujourd’hui comme se sont trompés hier, ceux qui pensaient que la colonisation et le monopole des impérialismes en finiront avec nos peuples et leurs singularités. Mais cette illusion est parfaitement entretenue par le fait que les causes de notre comportement sont si complexes qu’ils ne peuvent les comprendre, notre atavisme nous poussera toujours à réclamer et à imposer nos valeurs et notre indépendance selon nos propres choix.
Prenons l’exemple des dominos ; si une ligne de dominos s’abat, nous comprenons que chaque chute est la conséquence de la précédente et la cause de la suivante. Si cependant il y a tellement de dominos, dans un désordre tel qu’il devient impossible de comprendre la chute d’un domino, alors on peut supposer que si un domino tombe, c’est par sa propre volonté.

Notre libre arbitre qui est l’expression la plus pure de notre soif de liberté et d’indépendance et sa dynamique serait alors comparable à ce phénomène physique ; Chacune de nos actions est causée par un enchaînement tellement complexe que nous savons, nous croyons que la décision n’appartient désormais, et dans cette nouvelle configuration planétaire, qu’à nous mêmes. Cela change tout. Finalement, les nouveaux comportements de la société tunisienne, son cheminement, s’est marginalisé avec le temps d’avec les discours officiels, que ce soit ceux insipides, déformateurs, aseptisés de la dictatures imposés à coup de propagande et d’atermoiements, de toujours plus de policiers et de répression, ou ceux obsolètes, dépassées, paranoïaques d’une opposition décalée par rapport aux mouvements de fond qui taraudent les forces vives de la nation, désormais, nous sommes dans tous les cas obligés d’agir comme si nous croyions à notre libre arbitre, nous tunisiens savons que pour la liberté et une indépendance digne et réelle, il y’a un certain prix à payer. Par la force des choses et surtout la conscience de nos jeunes longtemps délaissés, laissés à eux même et à la voracité gargantuesque du bourreau, s’est imposé un autre mode d’organisation des idées, des réflexions et des ambitions, qui déboucheront fatalement un jour ou l’autre sur une action collective, cette force a pris forme dans ses sanctuaires indépendants de toute hégémonie, et qui ne s’inspire que de l’indépendance totale de notre pays et à tous les niveaux, reste pour la résistance tunisienne à conquérir.