Parmi les variables qui déterminent les indicateurs de développement régional, le taux de raccordement aux réseaux d’eau potable et d’assainissement. Après Kairouan, au centre, et Sejnane au nord, nous nous sommes dirigés vers Kasserine, où le taux de raccordement est inférieur à la moyenne nationale, pour la majorité des délégations du gouvernorat. Ce qui accentue la détresse des populations vulnérables et déshéritées qui peinent à accéder à l’eau potable, quand elles ne sont pas acculées à consommer de l’eau contaminée.
Dans les zones rurales de Kasserine, depuis des décennies, les ennuis de l’eau ne se comptent plus. Rien que pour l’année 2014, trois drames en témoignent. Ainsi, en octobre dernier, la police a réprimé les protestations des habitants de la délégation Lâayoun à cause d’un manque d’eau potable. De même, en décembre, à Bouzguam, le lycée Avicenne a été privé d’eau, durant un mois. Pire encore, en juin, à la cité Ezzouhour, l’eau potable a été infectée par les eaux usées, à cause d’ « une erreur d’aiguillage », selon l’ONAS.
De vastes ressources mal gérées
Selon un récent rapport du Commissariat Régional du Développement Agricole (CRDA) de Kasserine, la région « dispose d’importantes ressources hydrauliques estimées à 271 millions de mètres cubes par an, outre l’existence de 29 nappes de surface, dont 2 communes avec les régions du Kef et de Sidi Bouzid, et 29 nappes phréatiques ».
Le taux d’exploitation des eaux souterraines, dans la région, serait actuellement de 1,3%. Or, « le document évoque des dépassements dans les systèmes hydrauliques, notamment dans le secteur d’eau potable et l’irrigation, outre le phénomène du forage anarchique, au niveau des nappes phréatiques, épuisées dans les délégations de Sbiba et Foussena, ainsi que les demandes de création de puits publics et privés pour l’irrigation ». De même, il semble que l’exploitation abusive des eaux, dans les lacs collinaires, menace les ressources hydrauliques dans la région.
D’un autre côté, jusqu’à la fin de 2013, les groupements hydrauliques génèrent « un taux d’approvisionnement général en eau potable avoisinant les 94% ». Un chiffre qui est en deçà des prévisions du XIIe plan de développement annonçant le passage de 93,5 % à 98%, dans une vingtaine de gouvernorats, dont Kasserine.
À Mashreq Chams, Ounaissia, Khima El Khlayfia, Smichette et Laâyoun, des habitants déshérités continuent à manquer d’eau salubre, même dans les écoles, à subir l’arbitraire de l’administration et à souffrir dans l’indifférence générale.
Masherq Chams
Le village de Masherq Chams (Le lever de soleil en français) ne figure pas sur la carte. C’est le nom que « ses 1500 habitants lui ont affectueusement donné… car entouré de montagnes- derrière l’une d’elles pointe le soleil. Il se trouve à 300 km de Tunis, entre les villes de Sebeitla et Kasserine », écrit la journaliste Sarra Guerchani.
À Mashreq Chams, le système d’approvisionnement en eau potable acquis est le château d’eau. Selon le gardien,
ce château d’eau alimente environ 700 familles, dont 500 sont, directement, approvisionnées grâce à un système de pompage. Reste l’inconvénient de la faiblesse du débit. Par ailleurs, 200 familles sont, indirectement, approvisionnées par l’intermédiaire des citernes d’eau, transportées par un camion-citerne jusqu’aux localités dépourvues de raccordement, contre une somme de 15 à 25 dinars, variable selon la distance parcourue.
Néanmoins, le problème réside dans l’entretien des installations d’une part, et le coût exorbitant des citernes pour la majorité des habitants, d’autre part. Par ailleurs, le faible débit de l’eau est dû au système archaïque du pompage manuel alimentant le réservoir de distribution principal.
« Depuis l’inauguration de ce château, en 1982, le CRDA n’a pas veillé à l’entretien de l’installation. Et pour parer à son dysfonctionnement, ils l’ont échangé par une autre de moindre capacité, du coup je ne peux plus avoir la même quantité d’eau, étant donné que le débit est réduit de moitié », ajoute le gardien.
En effet, la quantité d’eau distribuée a diminué à cause de « l’augmentation du volume d’exploitation des ressources hydrauliques dans les réservoirs ». Selon le rapport du CRDA de Kasserine, cette baisse de débit a permis de rentabiliser les 1000 puits tubulaires et 115 puits profonds qui ont été crées, au cours des dix dernières années dans le gouvernorat.
Pour le CRDA, le recours aux citernes, dans les zones éloignées du château d’eau, est une solution fiable adaptée aux réalités locales.
À notre question sur la qualité de l’eau, les habitants de Mashreq Chams ont affirmé qu’il n’y avait pas de problème d’hygiène et que la chloration était une mesure de précaution.
Nous avons une richesse hydrique substantielle et une nappe large inépuisable. Ce qui nous manque, c’est la bonne gestion, nous confie l’un des habitants.
Le gardien nous apprend, lui, que « le chargé d’hygiène l’a formé pour mesurer la quantité d’eau de javel qu’il doit ajouter aux eaux du château ». « C’est moi qui m’occupe, donc, du traitement », nous dit-il.
De son côté, Abdessattar Chahbi, président du Groupement d’Intérêt Collectif (GIC) de Mashreq Chams, affirme : « On ne peut pas nier qu’une coupure d’eau est possible en cas de factures impayées, mais généralement, on se débrouille pour contourner ce problème. Sinon, la majorité écrasante des habitants de notre région bénéficie de l’eau potable, à l’exception de 60 à 70 familles qui vivent loin des canalisations du réseau de distribution ».
Selon Chahbi, deux projets en cours prévoient de réformer, de façon durable, la desserte en eau des ménages de Mashreq Chams et des villages avoisinants, d’ici 2015. L’un de ces projets est financé par le PNUD et l’autre par la coopération Suisse.
L’association « Mashreq Shams villages », en partenariat avec Tunisie Entraide, a lancé le projet « L’eau, c’est la vie » pour assurer aux villageois l’accès à une eau salubre.
Ounaissia et Khima Privés de raccordement aux réseaux d’eau potable et d’assainissement, les habitants de Ounaissia et Khima n’ont d’autre choix que de s’approvisionner chez les camions-citernes.
Comble de l’ironie, les villageois paient cette eau à des prix élevés, en fonction de la distance parcourue par le tracteur, alors que ceux qui sont desservis par le réseau de distribution paient bien moins cher. Certains puisent dans leur maigre revenu pour assurer ce besoin vital. Mais l’eau est insalubre et impropre à la consommation, comparée à celle de la source, car cheminée dans la citerne en acier du tracteur, puis versée dans des citernes en béton (majel) construites par les habitants pour la stocker.
Sbiba Notre destination suivante était la délégation de Sbiba, située au nord-est du Gouvernorat de Kasserine. Nous allons, d’abord, à Henchir El Assal dans la localité d’El Khlayfia, là où les habitants sont encore plus démunis. Ici, l’approvisionnement en eau se fait via une canalisation principale et des tuyaux communicants. Seuls ceux qui ont en les moyens y ont accès. « Je suis veuve et je n’ai pas les moyens pour installer un tuyau chez moi. Alors mes voisins me passent le leur pour m’approvisionner » se plaint une villageoise.
À El Khlayfia, un chantier est en pleine activité pour élargir le réseau d’approvisionnement à partir du canal principal. Salah Misaoui, trésorier du GIC de la région, explique :
le problème qui se pose, c’est l’ignorance des attentes et recommandations des habitants. Nous les transmettons et sommes bien placés pour orienter les responsables, s’insurge-t-il.
Ainsi, les habitants de Henchir El Assal affirment qu’il suffit d’achever les canalisations de 200 m, déjà creusées, pour qu’ils puissent profiter de l’eau potable. L’un des habitants se lâche : « des fois, on est tellement angoissés et révoltés par notre situation humiliante, que l’on se met à casser des canaux pour nous approvisionner ».
Smichette Dans la localité de Smichette, la politique hydraulique d’approvisionnement est la même : des citernes en béton remplies par les tracteurs-citernes, une eau de piètre qualité, et une intervention discontinue pour améliorer la desserte en eau.
Youssef Smichi, président du GIC, s’insurge contre l’expertise avancée et exécutée par le bureau d’étude nommé par le CRDA. Il la juge « arbitraire », étant donné qu’ils n’ont pas impliqué les membres du GIC, qui sont les mandataires des habitants de la région.
Nous avons porté plainte contre ces interventions insensées et incomplètes, mais nous n’avons reçu aucune réponse. Comme toujours, c’est l’indifférence de l’administration qui règne. Nous sommes certains qu’il y a une manipulation, nous confie Youssef.
Et d’ajouter : « Nous avons perdu la confiance des habitants à cause des erreurs commises par le bureau d’étude. Pourtant, nous essayons au maximum de contester tout raccordement technique que nous estimons inadapté ou ne touchant pas le maximum d’habitants ».
Lâayoun, El Gorine À Lâayoun, la source principale d’approvisionnement en eau potable est un puit équipé d’un raccordement, à partir duquel on pompe de l’eau. Les habitants nous font part de leurs angoisses. « La coupure d’eau est toujours probable et imprévue. Nous avons recours aux citernes d’eau, qui servent de succédané », affirment-ils.
Nous avons évoqué le problème avec le directeur de l’école Hamza Nasraoui, qui est aussi le trésorier du GIC de la région .
Nous sommes face à un manque d’encadrement du CRDA. Le GIC est doté de la personnalité civile et de l’autonomie financière. Ainsi, nous sommes chargés de vendre l’eau aux citoyens et de maintenir le réseau. En réalité, le coût de vente de l’eau est de loin inférieur au coût d’entretien du matériel, mais surtout inférieur aux montants des factures de la STEG qu’on n’arrive pas à payer, explique Hamza Nasraoui.
À l’école, le directeur s’est dévoué pour construire une citerne conforme aux normes d’hygiène, et il s’est chargé, personnellement, de son entretien.
Quatre ans après la révolution, l’accès à l’eau potable demeure l’une des préoccupations majeures des habitants des zones rurales de Kasserine. Les longues coupures d’eau obligent les gens à utiliser les points d’eau impropres à la consommation humaine. De même que le manque d’entretien des équipements et d’assainissement, sur la longue durée, entraîne la dégradation des conditions sanitaires et d’hygiène de la population; chose qui a poussé certains villageois à quitter leurs villages.
Les politiques de l’eau tardent à intégrer ce monde, longtemps exclu, dans le processus de développement économique et social. Variable suivant les régions, le taux de desserte n’est que de 91 % pour le nord, contre 94% pour la région centre et 98% pour la région sud. La fourniture de l’eau potable dans ces régions, caractérisées par des difficultés d’accès, des conditions climatiques rudes et des irrégularités de disponibilité de ressources, demeure largement insuffisante. De surcroît, la majorité des groupements hydrauliques, actifs dans l’approvisionnement des collectivités rurales en eau potable, connaît des difficultés financières, techniques, sociales et administratives.
Le projet de loi relatif à l’amendement du Code des eaux va-t-il améliorer l’accès à l’eau potable des habitants de Kasserine ? Pour l’heure, les nouveaux députés de l’Assemblée du peuple ne semblent pas pressés d’examiner ce projet et de le voter !
L’eau est la clé du développement, et dans ces contrées, l’expression prend tous ses sens…
Le problème n’est pas inhérent à Kasserine, et à Kairouan qui bat le triste record de la région la plus arriérée du pays, le drame est d’autant plus intense qu’un grand nombre d’écoles primaires est sans eau, et cela est su par… tout le monde ou presque.
Ce qui est étonnant, c’est que les autorités régionales (la santé en exemple) refuse toute collaboration avec la société civile pour tenter de cerner le problème, afin de chercher des pistes de solutions, sans parler évidemment de la qualité de l’eau desservie aux populations. Les chiffres sont tus, et les normes en terme de santé publique sont complètement ignorées! On verrouille l’information et… courage à tous ceux qui veulent fourrer leur nez dans ce dossier!
Pour revenir à la question de l’eau, il est clair que certaines structures sont une partie de problème et non de ses solutions, je veux dire les GDA (Groupements de Développement Agricole), chargées de gérer l’eau potable dans les zones rurales. Nombreuses de ces structures sont mal gérées et n’obéissent pas aux textes de lois qui les organisent. Leurs comptes ne sont pas correctement tenus et constituent un modèle de mauvaise gestion de la chose publique. Sans oser aller loin, il y a là une piste d’investigation pour ceux qui veulent aller plus loin.
Une des pistes de solution consisterait à revoir la législation sur la desserte de l’eau en milieu rural et accroître le réseau de la SONEDE pour qu’elle s’en occupe.
Merci pour ce reportage…
bonjour
si possible de nous contacter ,on peut collaborer pour une solution.merci
Je me suis rendu à Kasserine début juillet 2014. Je n’avais guère de temps car ce n’était pas l’objet de mon voyage. Mais il ne m’a pas fallu quelques heures pour rencontrer un fils de paysans qui m’a emmené sur l’ancienne exploitation de ses parents, toujours vivants et produisant moins de blé qu’il serait suffisant pour nourrir une famille sur place de six personnes. Il y avait un forage limitrophe de leur terrain, bien visible. Ils m’ont expliqué que l’eau leur avait été coupé il y a quelques années. Motif : “vous n’êtes pas prioritaires, il y a besoin de l’eau pour Sfax”.
J’ai essayé de me renseigner durant les quelques heures qu’il me restait à Kasserine, et tous mes interlocuteurs, parmi lesquels des étudiants d’écoles d’agro, m’ont confirmé que l’eau était pompée pour Sfax, et que seuls les agriculteurs bien en cours pratiquant des cultures spéculatives au goutte à goutte avaient droit à l’eau.
Les mêmes habitants interrogés sur le mont Chaambi étaient persuadés que cette histoire était une manipulation et qu’en aucun cas des terroristes pouvaient tenir un maquis sur ce “tas de cailloux”.
Ce n’est pas une enquête, c’est un simple repérage. Par rapport à l’article ci-dessus, je pense qu’il faudrait sérieusement enquêter sur l’alimentation en eau de villes côtières comme Sfax et vérifier que le problème de pénurie d’eau n’a pas plutôt pour origine son exportation vers les régions riches. Si cela était, il n’est pas très difficile d’imaginer l’avenir de ces “territoires”.
“L’avenir de ces territoires” : pour bien me faire comprendre, et en tenant compte du racisme dément des élites côtières, je pense à ça, et si c’est le cas, il faut arrêter cela maintenant, tout de suite : [youtube http://www.youtube.com/watch?v=Lb6VpXDdAC8?rel=0&w=560&h=315%5D
Les nouveaux députés et les tunisiens attendent d’abord à ce que le psychopathe et ancien président quitte Carthage pour se mettre au travail; vous leurs reprochez le manque d’empressement c’est ridicule à moins que vous commencez déjà votre harcèlement avant même qu’ils prennent leur place; ce qui m’étonne guerre de vous et de votre parti pris.
Désolé de vous dire que les médias d’ancien régime dès la victoire d’Ennahada ne se sont pas génés pour s’apitoyer sur le sort des régions de l’intérieur. Et comme me disait une enquêtée qui avait regardé tout cela de près : “en fait tout le monde s’en fout”. S’agissait juste d’exploiter une situation dramatique qui dure depuis les Ottomans non pour la résoudre mais se débarrasser d’un gouvernement jugé illégitime. Cela n’a jamais été le cas de Nawaat qui est le seul média (publiant en français au moins pour ce que je puis donc en juger) à consacrer des reportages sur la question sociale en Tunisie. Avec peu de moyens. Mais c’est l’honneur du journalisme en Tunisie. Pas de doute. C’est admirable… mais c’est peanuts. Et oui, je crains que l’intérieur de la Tunisie se transforme rapidement en une sorte de Cisjordanie qu’elle est déjà. Comme une libraire de Tunis me disait deux mois parès la chute de Ben Ali alors que je lui rapportais qu’en ce 16 mars pour la première fois la police était revenue en rue et avait nettoyé les vendeurs de rue ayant squatté les trottoires, dont l’un d’eux était supposé être à l’orgine du soulèvement : “Mais Monsieur nous avons le même problème que vous ? yani ? Ben oui, ces gens qui envahissent nos trottoires viennent de l’intérieur du pays, ce sont les mêmes qui émigrent chez vous. Sauf que nous non avon un problème. Ce sont des Tunisiens et on ne peut pas les expulser ! Et vous êtes bien bêtes de les régulariser.” La vérité si je mens, juré, craché ou je vais en enfer !
pour rectifier il s’agit de “lac collinaire” non de lac “colinéaire”. :)
Le petit peuple qui sacrifie un avenir plein de défis et de dilemmes pour le compte d’un passé mafieux et dictatorial ne mérite pas qu’on se penche sur ses problèmes. Pour ce qui est de l’eau que nombreuses études ont démontré sa pénurie croissante en Tunisie depuis le début des années 2000 et l’urgence d’y trouver des solutions radicales, ne sera en aucun cas une priorité pour les nouveaux gouvernants (tout comme les anciens d’ailleurs). Est-ce que la populace a pensé élire quelqu’un qui peut apporter une réponse à ce problème et à d’autres qui menacent pas seulement la sécurité alimentaire et nationale du pays mais les vies humaines mêmes (tels que l’érosion des terres arables, la menace de la mer aux régions côtières, la pénurie des ressources de pêche, le problème des grains, le casse-tête énergétique, la pollution de l’environnement, etc.)? Bien entendu, ils ont choisi un vieillard pour “restaurer le prestige d’un état voyou”! Tant pis ! moi, je ne suis pas inquiet parce que je sais très bien que les tunisiens sont si dépourvus de dignité et d’humanité qu’ils boivent volontiers leurs propre urine si nécessaire pour ne pas déranger leur papa BCE avec de tels problèmes. Ce dernier par contre, dépêchera chaque semaine les avions de Tunisair pour se faire livrer l’eau minérale (et d’autres amuses-bouches) de Paris et Genève comme c’était le cas sous Bourguiba et ZABA. Peuple de “microbes sans importance” si j’ose paraphraser le fondateur de la dictature!
@Tounsi
Mais enfin ! Ces gens n’ont pas voté ! Personne n ‘a voté ! Personne n’a élu ce vieillard ! L’élection s’est jouée entre la grande et la petite bourgeoisie ! Les gens que vous stigmatisez n’y sont pour rien ! Ils ont compris dès le début que les élections concernaient des gens “qui cherchent des chaises” ! Et qu’il n’y avait pas plus d’offre électorale que d’huile d’olive buvable dans une épicerie !
@Musée de l’Europe:
Selon les chiffres, le vieillard sénile a raflé plus que 40% des votes à Kasserine. Je suis donc ravi de savoir que, toute proportion bien gardée, cette ville compte 40% de bourgeois! Sinon devrai-je rappeler les photos des bajboujistes qui abattaient des chameaux et des taureaux pour “acheter” les voix des kasserinois avec quelques morceaux de viandes? Les photos ont fait le tour des médias sociaux! Qu’ils boivent donc leur urine en toute sérénité!
je me présente je suis le commissaire régional au développement agricole de Kasserine ,je suis aussi originaire de hinchir lassel ,je suis nommé à la tète du CRDA depuis une année ,kasserine est le 3 eme vaste gouvernorat en Tunisie sur une superficie de 826000 ha ; ,60% de la population est rurale ce qui nécessite un investissement important pour l’adduction de l’eau potable à toute la population rurale, Actuellement les fonds disponibles pour réaliser une bonne partie de cette infrastructure sont de l’ordre de 40 millions de dinars tunisiens toutes ressources de financement confondues
malgré tout la desserte en eau à Kasserine est conforme aux normes de l’organisation mondiale de santé.
Une contrainte majeure qui domine actuellement en milieu rural est la gestion de ces ressources naturelles .cette gestion est laissée au groupement de développement agricole (GDA) .cette organisation paysanne est une entité autonome administrativement et financièrement.
cette autonomie sans contrôle de l’argent public ,sans contrôle de la ressource eau publique laisse le monde rurale en désordre.
La mauvaise gestion ,les impayés de la consommation de l’énergie électrique , les impayés d’entretien et de réparation des réseaux par le CRDA
sont générés par une ancienne code des eaux qui n’est plus valable nos jours ou la valeur de l’eau prend de plus en plus de l’ampleur .
Quant aux ressources en eau ,le gouvernorat en possède mais doit les bien gérées ,l’exploitation des eaux profondes est en moyenne de 105% mais elle est maximale à sbiba avec in taux de l’ordre de 300% dans des nappes .Ce taux est un peu moindre à foussana de l’ordre de 200% environ , mais comme même le CRDA et le ministère de l’agriculture disposent d’un plan d’action à moyen et long terme pour palier ces défaillances et pour optimiser l’exploitation de la ressource eau.
Aussi il est plus pertinent pour les journalistes qui ont rédigé cet article de contacter les ingénieurs de CRDA pour drainer plus d’informations fiables et chiffrées .Ils parlaient des projets en cours (non finis:hinchir elassel,et Mezrzg echems) et collectent des informations des responsables dépourvus des détails de ces projets
En tant que Chef de la Division Hydraulique et Equipement Rural, je tiens à apporter des éléments de précision et donner des jugements significatifs, en premier sur le documentaire réalisé au gouvernorat de Kasserine et en second lieu sur la situation de l’eau potable en milieu rural de ce gouvernorat :
1- Le documentaire réalisé sur l’eau potable en milieu rural du gouvernorat de Kasserine manque à mon sens de rigueur surtout que les conditions de réalisation des SAEP peuvent changées d’une zone à une autre. La conception d’un projet neuf est totalement différente d’un projet de réhabilitation. Les témoignages des exemples cités à Henchir El Assal et Machrag Echams de la délégation de sbeitla ne sont pas réels pour les simples raisons, qu’ils s’agissent des anciens projets pour lesquelles le CRDA avec le PNUD sont en cours de réalisation des extensions pour rapprocher les points de distribution des bénéficiaires. Egalement, le grand souci de ces derniers est l’utilisation des systèmes d’eau potable pour l’irrigation des plantations arboricoles dont l’olivier existant. Ces systèmes sont conçus pour satisfaire uniquement les besoins d’AEP et non l’irrigation. D’ailleurs, le faible débit surtout du forage de Henchir Lassal ne permet en aucun cas son utilisation pour l’irrigation.
Quand au projet de Mchrag Echams, nous rappelons qu’une demande a été déposée au CRDA de Kasserine en 2008 par un promoteur de la région pour l’utilisation d’une partie de ces eaux en vue d’une installation d’une société pour la mise en bouteille de eaux du forage vu sa qualité exceptionnelle sur plan physico-chimique et bactériologique. Les services techniques du CRDA n’ont pas donné suite à cette demande pour ne pas priver les bénéficiaires de cette zone de l’eau potable. Actuellement, le CRDA est en cours de réalisation des extensions cofinancés par le PNUD pour rapprocher le réseau des bénéficiaires d’El Ounaissia et Abidet. Une deuxième intervention est également en cours de réalisation dans le cadre du programme régional pour la construction d’un troisième réservoir de grande capacité et le changement totale de la conduite de refoulement en plus de réhabilitation des anciens ouvrages.
Le SAEP EL Grine de la délégation d’EL Ayoun a été également réhabilité en 2008. Malheureusement comme indiqué par le témoignage du trésorier du GDA, les branchements illicites ont conduit à cette situation et le GDA a trouvé des difficultés pour le paiement des factures de la STEG. C’était encore à la demande du GDA, d’implanter une potence juste au pied du réservoir existant dans uns but de limiter les vandalismes sur le réseau et tous les bénéficiaires doivent chercher l’eau à ce point faute de non assiduité de la majorité qui sont à l’origine de cette situation.
Nous signalons également que la cité Ezzouhour fait partie du milieu urbain dont l’opérateur en ce milieu est la SONEDE. De même la coupure d’eau qui a eu lieu sur Bouzguème est due au non paiement de la facture STEG suite à l’utilisation abusive de l’eau potable pour l’irrigation sans autorisation préalable, surtout que ce système est conçu pour desservir plus de 550 familles en eau potable.
2- Le gouvernorat de Kasserine, région semi-aride, subit une pluviométrie irrégulière et demeure très vulnérable à la ressource en eau. De plus, l’accroissement démographique, l’urbanisation de la population et le développement économique poussent la demande à la hausse de sorte que l’eau devient une ressource de plus en plus rare.
Cependant, ces ressources en eau ont presque atteint leur seuil critique. Les eaux de surfaces sont totalement mobilisées ou presque, les eaux des nappes profondes, fossiles et non renouvelables le sont en grande partie et risquent d’atteindre leurs limites d’exploitation quand ce n’est déjà le cas. Enfin, les eaux des nappes phréatiques largement accessibles à la population par des moyens traditionnels sont déjà en grande partie surexploitées et ce, dans la plupart des régions du gouvernorat.
Cette situation, aussi inquiétante soit-elle, appelle à un changement d’attitude et de vision par rapport aux ressources en eau. A cet égard, les efforts sont attendus aussi bien du côté de l’offre de l’eau que de la demande, notamment son affectation et sa gestion.
Aujourd’hui, il faut admettre que le temps d’une eau abondante et bon marché est presque révolu. Il nous faut donc apprendre à payer plus chère pour cette ressource, d’où l’urgence d’optimiser son utilisation et mieux la valoriser.
Au final, l’eau est un bien économique, social et environnemental et son allocation doit respecter un équilibre entre ces trois dimensions. L’eau est un bien dont il faut optimiser la distribution et rationnaliser la consommation. Son prix doit également évoluer en fonction de sa rareté. L’eau doit être accessible à tous, en quantité suffisante et qualité requise, dans des conditions d’égalités.
Le devenir de l’eau longtemps considérée comme un don de la nature dont on pouvait user sans précaution, devient une préoccupation permanente; et on assiste à l’émergence de nouvelles préoccupations concernant la fragilité des écosystèmes, surtout dans le secteur des eaux souterraines qui subissent une pression permanente et une dégradation rampante qui à terme, pourraient menacer leur durabilité si des dispositions adéquates ne sont prises à temps. Les nappes phréatiques à Kasserine sont surexploitée à un taux de 120 % en 2014, les nappes profondes sont surexploitées à un taux de 105%, les périmètres irrigués, consommateur principal de l’eau, dépassent 28 milles hectares et dépasseront probablement 35 milles hectares en 2030 en considérant les forages et les puits illicites et les extensions limitrophes des périmètres publiques irrigués. Ce constat appel un réexamen et une revue de la façon de gérer les ressources en eau.
Dans le gouvernorat de Kasserine, on compte 26 nappes profondes exploitées. Parmi ces nappes, on distingue cinq nappes partagées avec les gouvernorats limitrophes du Kef, Sidi Bouzid et Gafsa.
Le nombre total de forages captant les différents aquifères du gouvernorat de Kasserine, est passé de 1420 en 2010 à plus de 1800 en 2014. Un accroissement net de l’exploitation des eaux souterraines profondes du gouvernorat de Kasserine de + 8,9 Mm3, par rapport à l’an 2009 a été ainsi constaté, portant le volume d’exhaure de 88.87 Mm3 en 2009 à 97.8 Mm3 en 2014.
Grâce à ses qualités physico-chimiques et bactériologiques, l’eau n’a besoin ni de filtration ni d’aucun traitement préalable. Seule une légère chloration est faite à titre préventif. Elle n’a aucune incidence sur la saveur de l’eau mais permet de la protéger pendant son passage dans les réservoirs ou les canalisations.
Suite aux visites effectuées sur l’ensemble du territoire du gouvernorat pour l’étude des projets d’eau potable, certains faits qui caractérisent le milieu rural de ce gouvernorat méritent d’être mentionnés. Il s’agit de :
Un état de pauvreté assez développé, ce qui pourrait soulever le problème de la solvabilité de la population vis à vis des GDA et devrait inciter à intensifier le travail de sensibilisation sur le recouvrement et la sauvegarde de l’équilibre financier des GDA;
des conflits interfamiliaux parfois assez aigus, qui ont dévoyé la sensibilisation dans la résolution des querelles locales;
L’esprit d’assistanat assez développé dans plusieurs zones ;
La dispersion de l’habitat trop élevée, ce qui a engendré la multiplication des ouvrages de distribution et la demande assez forte de branchements à domicile pour les habitats groupés.
La revendication assez forte des populations pour les besoins en irrigation en plus de l’AEP et l’insistance que certains projets soient transformés en projets d’irrigation.
Les principaux résultats enregistrés par le travail des équipes techniques et de sensibilisation de l’AGR du CRDA de Kasserine sont multiples:
La contribution à l’apaisement de certains conflits interfamiliaux;
le développement de l’esprit de concertation entre techniciens, sensibilisateurs et bénéficiaires et l’amélioration des schémas des réseaux, ce qui est de nature à assurer une meilleure acceptation des GDA et une meilleure articulation avec les bénéficiaires;
Une large implication des femmes dans le travail de concertation sur les problèmes d’eau potable, initiative fortement appréciée.
La popularisation des notions de GDA, d’engagement et de contribution concrète à la gestion des projets locaux: le taux d’engagement pour contribuer au fonds de roulement est satisfaisant dans plusieurs zones, notamment celles dont les projets sont cofinancés.
Néanmoins, tous les projets de Kasserine reflètent un besoin réel en eau potable des populations visées. Néanmoins, s’agissant de zones particulièrement défavorisées, où les revenus annuels moyens par ménage classent l’ensemble des zones des projets dans la catégorie des zones de pauvreté, parfois extrême, les revendications sociales tous azimuts ont été formulées par les populations, y compris la transformation des projets d’eau potable en systèmes d’eau pour l’irrigation.
L’acceptation des projets est bonne dans l’ensemble. Le population dans ces zones caractérisée par son niveau d’homogénéité relative, par sa discipline civique et ses dispositions à s’acquitter de ses obligations vis à vis des GDA, permet d’espérer une bonne réussite des projets; par contre dans d’autres zones, les conflits interfamiliaux, d’une part et l’esprit d’assistanat assez développé, d’autre part incitent à la prudence et l’engagement d’actions de concertation intensive avant la réalisation des projets.
La vente d’eau est acceptée dans plusieurs zones et il serait souhaitable de la pratiquer au détriment du système de recouvrement forfaitaire dont les inconvénients ne sont plus à mentionner.
Certes, l’équipe technique s’efforce toujours pour chaque projet d’améliorer dans la mesure du possible la desserte pour assurer une meilleure acceptation des projets et une meilleure santé financière des GDA.
Par ailleurs, l’action de concertation menée à chaque fois pour tous les projets AEP vise à travers les demandes d’extension, formulées à la lumière d’une connaissance approfondie du terrain, de réduire le recours ultérieur à de nouvelles extensions ou à de nouveaux projets dont le coût sera nettement supérieur à ce qu’il dû être dans le cadre d’un projet engagé. Ces revendications reflètent un souci d’optimisation des moyens et une meilleure planification des projets.
La concertation évolue dans un contexte contrasté, caractérisé par:
La pression des revendications et des intérêts locaux qui s’exercent, non pas sur l’équipe de sensibilisation dont la présence dans la zone est éphémère, mais sur l’équipe chargée des études et qui est obligée de composer avec la réalité;
Les exigences technico-financières, parfois volontaires et peu adaptées à certaines réalités très spécifiques: nature du terrain, dispersion excessive de la population, caractéristiques anthropologiques ou socioculturelles particulières, etc.
Difficile apprentissage de la concertation entre techniciens et sensibilisateurs et entre techniciens et population pouvant entraîner parfois des comportements contradictoires ou des changements chaotiques dans les attitudes, les techniciens devenant parfois plus pédagogues et plus réalistes que les sensibilisateurs.
Il est certain que la qualité du service offert à l’usager s’est nettement améliorée, tant sur le plan de la qualité de l’eau distribuée (pratique de la javellisation par exemple), que sur le plan du service lui-même (continuité de la desserte, amélioration des conditions de desserte-pression, débit,…) qui est moins facilement quantifiable.
En dépit des gains de productivité, cette amélioration de la qualité de service offerte a sans aucun doute augmenté les coûts réels de l’eau distribuée supportés par les services. Si cette augmentation des coûts ne s’est pas traduite par une augmentation en parallèle des prix pratiqués, c’est qu’un bon nombre de GDA ont été dissuadé de pratiquer une politique de vérité des prix de l’eau consommée. Toutefois, certains GDA ne pratiquent pas le prix réel qui tient compte essentiellement des frais qui doivent être réservés à l’entretien de leurs réseaux, malheureusement, c’est les services de maintenance du CRDA qui s’efforcent à réaliser ces taches gratuitement à leurs places.
Nous rappelons que la politique tunisienne d’alimentation en eau potable en milieu rural a commencé dès les années 70 avec une desserte collective. Le rayon d’action de chaque point de distribution pouvant aller jusqu’à 3000 ml. Cette distance s’est réduite aux fils des ans à 2000 m, puis à 1000 ml, puis à 500 ml. Avec ces normes, le taux de desserte en eau potable a atteint les 94 % fin 2013. Le CRDA de Kasserine, premier opérateur en milieu rural du gouvernorat (83 % Génie Rural contre seulement 11% SONEDE), s’efforce actuellement de réaliser des projets avec un mode de desserte par branchement individuel. Comme la SONEDE, la niche et l’équipement de comptage individuel reste à la charge des bénéficiaires. Les exemples de projets cofinancés par la BAD et réalisés dès 2012 jusqu’à présent sont forts édifiants à cet égard.
La viabilité d’une AEP n’est pas seulement conditionnée par les moyens techniques mis à l’œuvre par le facteur humain, la population doit accepter le système d’eau et son propre rôle et responsabilité dans la gérance de ce système.
Les infrastructures réalisés par l’AGR sur l’ensemble du milieu rural du gouvernorat surtout en matière de réseau ont atteint plus de 5000 Km de conduites différents diamètres. La demande pour des branchements individuels est fortement demandée en plus de la transformation des SAEP en systèmes d’eau pour l’irrigation.
NF