Caricature de Shahrokh Heidari.

Suite au témoignage d’une fonctionnaire du ministère de l’information à la retraite sur l’état De l’Information en général et de l’agence TAP en particulier j’aimerai bien ajouter les remarques suivantes :

Déjà en 2002, l’UNESCO a signé un contrat avec une compagnie britannique pour la fourniture, à l’Agence de presse tunisienne (TAP), de logiciel permettant la modernisation de ses moyens techniques et notamment électroniques. Le Programme intergouvernemental pour le développement de la communication (PIDC) de l’UNESCO, qui se veut un promoteur de la liberté d’expression et du pluralisme des médias, a offert à la Tunisie 70 000 US$. Le gouvernement français a alors versé les 100 000 US$ restants. (Lire en ligne le communiqué de l’UNESCO du 29-11-2002.)

Le projet cofinancé par l’UNESCO et la France avait pour objectif le développement de trois initiatives principales :

  • « permettre à l’agence de presse tunisienne de renforcer son environnement électronique, facilitant ainsi la réception, le traitement et l’archivage de l’information ; »
  • « créer une base de données d’archives électroniques qui facilitera beaucoup le travail de recherche des journalistes et donner au personnel technique et aux journalistes les compétences nécessaires pour l’utilisation optimale de ce système. »
  • améliorer les activités de collecte et de distribution d’information de l’Agence TAP depuis les coins les plus reculés de la Tunisie. « Par ailleurs, les institutions de médias comme les médias indépendants et pluralistes vont pouvoir obtenir des informations plus rapidement et à prix abordable facilitant ainsi l’intégration de toutes les couches de la société dans le paysage médiatique tunisien. »

Qu’en est-il de la réalisation de ces objectifs ? Rien ! La TAP n’est ni dotée d’un site Internet ni même d’une adresse électronique !! Et que dire du rêve de faciliter l’intégration de toutes les couches sociales dans le paysage médiatique tunisien si les journalistes, gens de la profession, n’ont même pas le droit de se réunir autour d’un vrai syndicat (Syndicat des journalistes tunisiens (SJT) capable de déverrouiller le champ médiatique tunisien et donner son sens à la notion de liberté de presse !

Les 170 000 US$ est un montant dérisoire, comparé au montant de 2,15 millions d’euros alloué en cette année 2005 à la Tunisie dans le cadre du programme d’appui aux médias tunisiens, inscrit dans le cadre du programme de partenariat entre la Tunisie et l’Union européenne. Le bénéficiaire de ce montant est bien le Centre africain de perfectionnement des journalistes et communicateurs (Capjc) présidé par Ridha Najjar.

Rappelant, dans le contexte de la formation et du « perfectionnement » des journalistes tunisiens, que la Tunisie a été « élue », en la personne du même Ridha Najjar, à la Vice-Présidence du Réseau Mondial des écoles de journalisme lors de l’Assemblée générale de JourNet, (Journalisme Network, un réseau mondial des écoles et centres de formation au journalisme, créé en 1999 sous l’égide de la même UNESCO) tenue le 19 Février 2004 à Newcastle, en Australie.

Ce qui est vraiment loufoque, c’est que ledit Réseau a pour objectif « (…) de contribuer à la mise en place des nouvelles technologies de l’information et de promouvoir la responsabilité et la vigilance professionnelles sans lesquelles l’on ne peut concevoir la liberté de presse. »
Mais l’on est tellement habitué à ces contradictions entre les objectifs proclamés et la réalité du soutien international à l’un des pires ennemis de la liberté de la presse : le régime tunisien. N’est-il pas lui-même champion dans l’art de vider les principes de leur substance !

JourNet organisera sa seconde Conférence mondiale en Tunisie, en novembre 2005, en marge de la seconde phase du SMSI. On aura des nouvelles sur sa soi-disant « vigilance professionnelle », comme d’ailleurs celle de l’UNESCO et de son Programme intergouvernemental pour le développement de la communication (PIDC) dont la Nouvelle Stratégie de Communication « accorde une haute priorité à la libre circulation de l’information aux plans national et international, à la promotion d’une information plus vaste et mieux équilibrée, sans entraves à la liberté d’expression ».

A l’instar de La République de demain, si chère au général Ben Ali, il est fort probable que la liberté d’expression que veulent promouvoir tous ces organismes internationaux soutenant le régime tunisien soit, elle aussi, une liberté d’expression de demain.

D’ici là, pour nous, tout ceci ne fait que perpétuer le règne de la censure et de la presse de caniveau !

Sami Ben Gharbia (Chamseddine)

sami@nawaat.org