Quand j’ai entrepris d’écrire ce texte, j’ai bien réfléchi avant de me décider car les quelques mots que je vais tracer peuvent me conduire à la situation que je vais décrire et à laquelle j’ai réussi à m’échapper jusqu’à maintenant : La prison.
Je ne suis pas à mon premier essai. La dernière fois, cela daté depuis plus de trois ans. Une soirée d’été, seul à la maison, je me suis trouvé submergé par l’irrésistible idée de ma décharger de tout le poids que j’ai sur la conscience par des mots. J’ai gardé jusqu’à maintenant le papier de cette page de cahier d’écolier comme celle qui est maintenant entre mes mains.
Les mots se sont transposés en mots coulant doucement sans ratures ni papier gaspillé. Une fois le texte terminer je n’ai trouvé aucun mot à changer. J’avais l’habitude d’écrire souvent des textes auxquels personne n’aura jamais accès. Genre journal intime ou plutôt journal d’opprimé. Sentir le besoin de s’exprimer et se trouver résigné au silence de peur d’en subir les conséquences est l’extrême des humiliations que peut ressentir un être humain : la lâcheté.
J’été opprimé dans ma liberté d’expression sur une triple dimension :
Socialement, le pays est encore habité par ces mégas idées qui réduisent tout aux vérités sociales courantes, archaïques et périmés, dont il n’est pas aisé de s’attaquer. Les gens n’ont jamais été habitués au libre débat et à l’échange d’idées. Résignés à une culture plate ou chacun se suffisait à la suffisance en se prenant pour des illuminés. Esprits obtus et castrés, imperméable à toute remise en question sur fond d’un fanatisme primaire reclus et stagnant qu’il suffit de remuer pour être envahi de sa puanteur à la nausée.
Une carence statutaire qui m’été particulière et qui relève de mon devoir de réserve du au métier que j’exerçais et qui s’est trouve confronté à une clause de conscience tout le temps que j’ai passer dans ce métier.
Une vérité imposée selon l’expression anglaise « The King Can Do No Wrong » appliquée par une dictature totalitaire et agressive qui n’a jamais manqué de moyens pour extorquer le consentement tacite ou déclaré de la société à tous ses dépassements.
Cette nuit j’été pour de bon décidé de ne pas garder mon texte en brouillon. Sans consulter personne ni m’arrêter à aucune des considérations précités. J’été conscient qu’en rompant le silence je romps en même temps le contrat qui me lie à mon statut de commis de l’Etat. Sur le plan humain ce métier s’est arrêté de m’apporter la moindre satisfaction depuis que j’ai compris que l’implication qu’il représentait pour moi dans le projet de mon pays ne peut plus avoir aucun effet quant à la dégénérescence à laquelle est arrivé l’institution à laquelle j’appartenais.
J’avais assez de « faire et me taire ». Il y avait beaucoup d’excès. Je n’ai vu que des vies et des espoirs tronqués par mon métier. Chaque jour mon passage sur mon lieu de travail me rappelait que je suis en train de voir les mêmes têtes de gens. Tous hagards désorientés excités mal rasée mal fringués leurs regard ne reflètent que la peur et la terreur. On dirait que les tribunaux ne sont réservés qu’a une catégorie déterminée de la société. Je sais qu’on peut être coupable d’un fait et qu’il est dangereux de laisser un coupable dans l’impunité, mais je suis devenu de plus en plus convaincu que l’excès l’emportait, qu’on n’est plus tenu pour les fait qu’on à commis mais on paye de sa vie les injustice qu’on subies.
C’est cet immense dégoût de l’aspect général du métier qui m’a poussé à défoncer une issue de sortie pour le quitter sans regret.
J’ai fini par saisir le texte et saisir le nombre de copies dont j’avais besoin. J’ai commençais ma journée par passer à la poste pour l’envoyer à celui dont il été destinée.
Soulagé ; je méditais quand je suis arriver à mon bureau sur la nature que peut avoir un être humain qui finit par se résigner et se convaincre qu’il ne peut pas exprimer ses idées sur ce qui se passait autour de lui, l’impliquait directement et façonnait toute sa vie. Je me trouvais déjà étranger à mon corps de métier et je me suis aperçu avec plus de clarté et de netteté de l’horreur à laquelle une conspiration du silence peut aboutir.
Je ne vais pas écrire mes mémoires, je destine ce papier à un ami qui m’a en quelque sorte suivi sur le même sentier. Il se trouve à présent en prison alors que je demeure étroitement surveillé dehors. Je veux tout simplement parler du pris à payer pour s’exprimer dans un pays comme la Tunisie.
Je n’ai jamais voulu aborder le coup pécuniaire que m’a coûté les représailles que j’ai subi depuis. Amazighen des ergs du désert mes ancêtres ont survécu des millénaires à toutes les invasions de notre terre. Ce n’est plus la nécessité qui va aujourd’hui me plier même si je n’ai jamais imaginé qu’ils vont chercher à m’humilier en essayant par tout moyen à me réduire dans le besoin. Ils commençaient par prendre le terrain et la maison que j’ai bâtit et finissent par fermer le dernier legs qui servait à faire survivre toute la famille ruinant ainsi mon frère et détruisant la vie de ma sœur et de ses enfants.
L’injustice qui m’indisposait dans mon métier m’a collé à la peau et cherchait depuis à m’accrocher par la gorge pour me suffoquer définitivement.
Quel modique prix à coté de ceux qui ont payé de leur sang et d leur vie leur convictions dans l’idéal auquel ils croient pour leur pays. S’ils ont réussi à faire du mal à quelqu’un c’est à mes innocents enfants et mes neveux.
Tout cela pourquoi ? Parce que je n’ai pas tort de décrire le pouvoir qui préside à nos destins maintenant comme une dictature despotique réactionnaire. J’avais mis dans mon texte une clef, juste un mot qui m’a pris toute une nuit. Je savais depuis le début que c’est le mot qu’il fallait éviter et que tout ce qui pouvait m’arriver après serait à cause de lui mais c’est par ce mot que j’ai décidé depuis le début de commencer mon manuscrit.
Comme l’esclave aucune chaîne ne peut le maintenir dans la servitude à perpétuité s’il ne l’est par le respect qu’il continu à garder pour ceux qui ne font que l’humilier. Sous une dictature on finit par deviner qu’on ne pourra jamais reconquérir une dignité sans oser un lèse majesté. Merci Mohammed Abbou d’avoir rappelé à sa Majesté que tout un peuple est lésé.
Yahyaoui Mokhtar
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