«Il n’y a pas d’avenir dans mon pays (…) et la violence règne dans la région», lâche-t-il, en allusion aux conflits armés qui sévissent au Mali, en Côte d’Ivoire, et au Burkina Faso. Lamin est arrivé en Tunisie en 2018 par voie terrestre. «Je suis passé par la Guinée, le Mali, l’Algérie, pour arriver ici», a-t-il précisé. «C’était moins dangereux à l’époque», souligne Lamin. Le jeune subsaharien déclare n’avoir jamais tenté de rejoindre l’Europe et se voit refaire sa vie en Tunisie.
La rencontre a eu lieu à Tunis, devant les bureaux de Terre d’Asile, alors qu’il attendait un ami. Le jeune homme au sourire amical a accepté de se livrer, en racontant un peu son parcours, assez atypique.
A son arrivée en Tunisie, il dit avoir eu sa carte de demandeur d’asile assez facilement. Mais son séjour dans les foyers de l’UNHCR ne s’est pas éternisé, souligne-t-il. Le jeune homme affirme avoir cherché du travail dès son arrivée. Et c’est avec beaucoup de ténacité qu’il a enchaîné les boulots malpayés dans le but de garantir ses 250 dinars de loyer. Et plutôt que de vivre en communauté, il a choisi d’habiter avec deux amis. Dès le début, Lamin a souhaité se tenir à l’écart des autres demandeurs d’asile et réfugiés, afin de «rester concentré sur ses objectifs », d’après ses termes. Dans une autre vie, au Sierra Leone, il buvait et se battait, confie-t-il. Malgré ses mines de diamant, le pays à l’histoire tumultueuse est l’un des plus pauvres d’Afrique.
Mais quand il a décidé de venir en Tunisie, Lamin a tout arrêté, dit-il. Pour éviter les histoires, il déclare avoir décidé d’éviter les «fréquentations ». «C’était la seule façon de le faire pour moi», a-t-il martelé.
Après deux ans de boulot assez mal payé, Lamin a trouvé un employeur décent qui lui assure un salaire au smig. Depuis un an, il vit seul, dans un petit appartement que lui loue son employeur, pas très loin de son travail. Le voici chef de la sécurité dans un bar restaurant, dit-il fièrement.
Le jeune homme se déclare serein, même si sa situation est loin d’être parfaite, faute de contrat légal. Mais il continue de travailler en attendant des jours meilleurs, dans l’espoir d’ouvrir un jour sa propre boîte. Même si pour l’instant, le droit tunisien ne permet pas à Lamin d’avoir ni permis de travail ni de soutien juridique en cas de litige. Difficile donc de devenir son propre patron et de monter une entreprise.
Des regrets ? «Je n’ai pas revu mes proches depuis que je suis parti», lâche-t-il, en montrant des photos de sa sœur et de ses neveux sur Facebook. «Mais je leur parle tout le temps sur les réseaux sociaux», ajoute Lamin. Et pour l’instant, il n’est pas en mesure de les aider financièrement. Lamin gagne en effet juste de quoi se nourrir et s’assurer un toit. «Un jour je vais avoir une vie confortable, et je pourrais les aider. Mais pour l’instant, ils doivent se montrer patients», nous confie le jeune sierra léonais. Il avoue tout de même mettre un peu d’argent de côté en vue de ses projets. Ambitieux et serein dans l’adversité, Lamin rêve d’une vie stable en Tunisie. Même si l’évolution politique ne suit pas nécessairement le cours de ses aspirations.
Un e véritable bombe à retardement, ces jeunes subsahariens qui viennent en Tunisie avec des rêves et des ambitions beaucoup plus grands que le pays qui souffrent de multiples crises financières, politique économique et sociale. Mais le pays a besoin de ce genre d’homme plein de volonté de se construire un avenir et construire le pays, mais la déception risque de faire d’eux des victimes ou des destructeurs !