Quatre victimes des bavures policières témoignent pour Nawaat. Quatre récits des violations des droits des prévenus stipulés par la Loi 5. Alors que la discussion du projet de loi sur la protection des forces armées a provoqué de nouvelles vagues de contestation au sein de la société civile, et qu’une campagne de sensibilisation des citoyens à leurs droits lors de gardes à vue a été lancée, le débat se cristallise autour du problème irrésolu des violences policières. La frontière semble fine, perméable, entre déni des droits élémentaires et agression, entre arrestations musclées et résidus d’un Etat policier.

Ecoutez les témoignages des victimes

Afraa Ben Azza, 19 ans, lycéenne, Kef

A son arrivée au poste de police du Kef le 9 septembre dernier, Afraa a demandé à contacter son avocat et sa famille. Les policiers ont refusé et ont confisqué son téléphone. Son militantisme au sein des collectifs Manich Msamah et Hassebhom pourrait bien y être pour quelque chose. Selon les chiffres du ministère de l’Intérieur, la présence d’un avocat dans un poste de police n’est avérée que dans 19% des 25 000 cas de gardes à vues recensés depuis un an.

Hamza Abidi, 27 ans, étudiant en philosophie, Tunis

C’est la huitième fois que Hamza a été brutalement arrêté par des officiers de police. L’incident est survenu en août 2017. Il n’a pas été informé des motifs de sa garde à vue qui a duré 72 heures. Malgré avoir demandé à voir un médecin, ce droit lui a été refusé. Idem pour la possibilité de contacter ses proches et son avocat. Il se retrouve aujourd’hui poursuivi pour outrage à un fonctionnaire public et est redevable d’une amende de 4000 dinars.

Mazen Ouji, 21 ans, étudiant en économie, Ben Arous

Pendant 48 heures suivant son arrestation en octobre dernier, personne dans l’entourage de Mazen n’a été informé de sa détention au poste de police de Medina Jedida, contrairement à ce que lui garantit la loi. Sa mise en garde à vue a fini par être discrètement divulguée à son avocat qui, s’étant rendu à la maison d’arrêt de Bouchoucha afin de s’informer. Militant du parti Ettakatol, il a été arrêté pour port du t-shirt du collectif Manich Msamah et condamné à payer une amende de 200d.

Wissem Omrani, 29 ans, designer, Tozeur

Wissem dînait dans un restaurant du centre-ville de Tozeur, le 18 novembre, lorsque quatre policiers sont rentrés dans l’établissement et se sont dirigés tout droit vers lui, avant de l’emmener de force à l’extérieur pour le tabasser. Une semaine auparavant déjà, il sent avoir été repéré et ciblé lors d’un contrôle d’identité. Militant de l’Union des Diplômés Chômeurs (UDC), il compte se faire entendre en poursuivant ses agresseurs avec le soutien de la Ligue Tunisienne des Droits de l’Homme et l’Organisation Mondiale de lutte contre la Torture (OMCT).