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A droite, là-bas, trop loin à droite, comme dans un mauvais rêve, les islamistes se sont revenus hanter la Tunisie un certain 14 janvier. Ceux qui, la veille, fêtaient en nostalgique l’anniversaire du « Changement » du 7 novembre, avaient-ils imaginé un jour que les islamistes seraient un acteur principal dans la scène politique tunisienne ?

C’est à travers des versets coraniques que Rached El Ghannouchi a annoncé ex-cathedra le lancement du 10e congrès de son parti. Une occasion pendant laquelle Ennahdha a vulgarisé, à cor et à cri, sa volonté de devenir un parti politique civil. Soit. Et pour ce faire, il a appelé ses soldatesques à respecter les acquis de l’Etat tunisien et à respecter également ce caractère civil, à savoir séparer le religieux du politique tout en citant un verset relatif au prosélytisme et à la prédication islamique. L’aggiornamento de ce mouvement est d’islamiser la démocratie. Ou bien de démocratiser l’islam. Peu importe. In fine, comme a simplifié El Ghannouchi : « Ennahdha sort de l’islam politique pour entrer dans l’islam démocratiaue ». C’est-à-dire, de l’islam politique à l’islam politique. Autrement dit, allez chercher y comprendre quelque chose.

« Mieux connaitre pour mieux combattre » tel est le principe qui guide les islamistes aujourd’hui en Tunisie, Ennnahdha affirme trouver désormais « la formule qui tue » pour regagner la confiance du peuple, celle de devenir un parti politique civil. Une décision tactique à des fins stratégiques. C’est possible, comme Hannibal, gagner de nombreuses batailles intrinsèques mais perdre la guerre sur une seule bataille – qu’en l’occurrence on a refusé de livrer (la prise de Rome).

Un coup à gauche et un coup à droite, tel un caméléon, Ennahdha a su, à l’occasion de ce congrès, rassembler, sous le même toit, un pêle-mêle des nahdhaouistes, des destouriens, des rcdistes, des mutants, des anciens ministres de Ben Ali, des icônes de la classe politique post-révolution, et j’en passe. Et à leur tête le président de la république BCE qui met la main dans la main avec son pire ennemi politique El Ghannouchi pour confirmer que l’islam n’est point incompatible avec la démocratie. Bref, toute la smala était là pour la photo de famille. Et les familles des martyrs peuvent enterrer leurs morts.

L’intelligentsia de ce mouvement politique est de glisser, in extremis, vers une nouvelle image d’Ennahdha : plus lisse et moins vulgaire, c’est-à-dire plus moderne, à vocation mercantiliste en valorisant une entreprise de démocratisation islamique qui, à première vue, n’existe pas voire n’a jamais existé. On retrouve dans ce nouveau discours d’Ennahdha une tentative de définition, un essai de valorisation de sa propre culture islamique. Partant toujours du principe que la prédication islamique est indispensable pour résoudre les problèmes politiques, économiques ou sociaux.

Là-bas, à droite, aussi le débat entre archaïques et modernes fait encore rage. Un grand physicien a dit un jour qu’ « un verre est un concept pour désigner l’objet qui permet de boire le vin, l’eau ou toute autre boisson que l’on apprécie. » Mais que boit-on exactement avec Ennahdha ? Qui vivra verra…