Salem ZirdaSalem Zirda a été libéré en fin de peine il y a un peu plus de deux mois maintenant. Sa nouvelle vie est celle … d’un prisonnier, incarcéré dans un pénitencier aux murs invisibles, mais bien réels.

Il vit dans la région de Mahdia. Il vit ? Comment vivrait-il ? Il n’a pas le droit de travailler. Il doit chaque jour parcourir quarante kilomètres pour se présenter au poste de police, ce qui lui coûte l’équivalent de cinq euros qu’il n’a pas. Il est malade et ne peut se déplacer sans autorisation de la police. Cette dernière débarque chez lui à n’importe quelle heure du jour et de la nuit. Il n’a pas encore de passeport, et pourtant :

L’histoire de Salem Zirda est presque unique (1), puisque avant d’être incarcéré en Tunisie, il était réfugié, en principe à l’abri d’un renvoi dangereux dans son pays d’origine, ce que prévoit la convention de Genève. C’est pourtant ce qui s’est passé. Condamné par contumace par le tribunal de Première Instance de Mehdia à quatre ans d’emprisonnement, il demande l’asile en Allemagne en 1994 et se voit accorder le statut de réfugié en 1996. En 2000 il se rend au Mexique, et veut passer aux Etats-Unis pour rendre visite à son amie américaine. Mais il est repéré, arrêté et emprisonné. La France et l’Allemagne refusent de récupérer ce réfugié en principe sous protection de ce dernier pays. Il tente alors de demander l’asile en 2002, en vain. Le 13 mai 2002 il est renvoyé en Tunisie, via les Pays-Bas.

A son arrivée à l’aéroport de Tunis-Carthage, il a été arrêté, conduit au ministère de l’Intérieur où il a été torturé, puis déféré devant un juge militaire. Sur la base d’un procès verbal falsifié, il a été condamné en 2004 par le tribunal militaire à sept ans d’emprisonnement qu’il vient d’achever.(2)

Luiza Toscane

(1) Presque, car depuis lors un autre réfugié, Mahmoud Tounakti, a été renvoyé par la Bulgarie et a été emprisonné à son arrivée en Tunisie.

(2) Se reporter à “Terres d’écueils, le droit d’asile BEN ALIéné”, chapître 5, p.133 : “Salem Zirda : Quatre Etats et un réfugié”