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Mercredi 30 avril est une journée de drame pour la Tunisie. Si la raison ne prend pas de suite le dessus, notre pays risque d’en connaître d’autres.

À l’extérieur de l’Assemblée du peuple, une Tunisienne s’immole par le feu faute d’avoir été entendue dans ses justes réclamations criées en vain depuis des jours. Elle symbolise la Tunisie qu’on ignore et sa démocratie qu’on bafoue.

Car, à l’intérieur du palais, on mesure l’étendue de la coupure de nos députés avec les réalités du pays : certains n’ont en vue que leurs privilèges et d’autres, y compris parmi les démocrates, immolent l’esprit d’une Révolution tunisienne qui se voulait le nouveau modèle de gouvernance, une transfiguration de la politique.

Et on prétend représenter le peuple lorsqu’on n’a en vue que des intérêts mesquins et les délices du pouvoir ! Et l’on assure parler au nom du Tunisien quand on fait tout pour ne pas lui donner la parole, la confisquer pour soi, au travers des partis, afin de se laisser aller à des litanies de mensonges ne trompant plus personne.

Le peuple tunisien n’aspire qu’à retrouver la maîtrise de sa destinée et cela passe par la mise en œuvre immédiate des acquis d’une constitution que sa société civile a imposée au forceps à des élus irresponsables. Cela ne peut l’être que dans le cadre du gouvernement consensuel des compétences qui est tenu de renouveler l’arsenal juridique du pays avant de procéder à l’organisation d’élections nationales.

L’Assemblée n’est plus digne de représenter un peuple pacifique, tolérant et magnanime. On ne peut, quand on a échoué pendant trois ans à faire oublier les figures politiciennes anciennes, prétendre les exclure de la scène politique pour faits de dictature quand on n’a fait que pratiquer une autre forme aussi pernicieuse de cette même dictature en leur lieu et place.

On n’a pas le droit d’exploiter l’attachement sincère du peuple à la cause de Palestine pour en faire un argument de rejet d’autrui; le Tunisien est altruiste dans l’âme et ne pratique pas de confusion des valeurs, sachant être juste tout en restant attaché à la légalité internationale. Il sait que la meilleure façon d’amener à la raison Israël est d’agir avec raison et non en se laissant allers à la xénophobie instrumentée à des fins de politique intérieure.

Hier la femme du peuple qui s’est immolée devant le siège d’une Assemblée en pleine dissolution politique et morale, c’est toute la Tunisie qui prend feu. Gare aux ravages de l’incendie. Que les consciences s’éveillent : stop à la politique politicienne ! Que ne gouvernent en Tunisie que des compétences apolitiques n’ayant en vue que l’intérêt de la patrie. Soyons enfin justes de voix et de voie. C’est la seule façon d’être en congruence avec les souhaits du peuple pour une démocratie qui le représente vraiment et non un régime de partis, une caricature de la démocratie. C’est cela l’amour de la patrie.

Au Japon, le noble qui se repent de ses fautes ou qui se garde d’en faire choisit comme issue de se faire hara-kiri. Un tel suicide rituel est la seule issue de sortie honorable pour l’Assemblée si elle veut servir le peuple qu’elle est censée représenter. Aussi, elle doit solennellement décider de s’autodissoudre en édictant les règles d’une bonne gouvernance pour l’édification d’une démocratie qu’elle n’a pas su ériger. En voici la recette :

  1. L’autodissolution emporte transfert des pouvoirs au Dialogue national et au gouvernement des compétences. Celui-ci sera habilité à gouverner par décrets dont la légalité et la conformité à la constitution seront soumises à la Commission provisoire chargée du contrôle de la constitutionnalité des lois.
  2. Le gouvernement des compétences aura pour tâche prioritaire de mettre en œuvre les acquis de la constitution, notamment ceux en matière des droits et des libertés. Il n’organisera pas d’élections nationales avant d’avoir réformé l’arsenal juridique du pays hérité de la dictature. Dans cette attente, il rendra la parole au peuple en organisant des élections municipales.
  3. Le principe de compétences apolitiques doit être étendu à la présidence de la République qui doit être confiée à une figure nationale consensuelle se situant en dehors des partis politiques.