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Capture d’écran de la présentation du ministre de l’intérieur annonçant les noms des coupables dans les assassinats de Chokri Belaid et de Mohamed Brahmi aujourd’hui , 26 juillet 2013.

Jihadiste en Irak, impliqué dans les événements du Mont Chaambi et dans l’affaire du dépôt d’armes de Mnihla, suspect d’avoir participé à l’assassinat de Chokri Belaïd… Boubaker Al-Hakim, que le ministère de l’Intérieur a présenté aujourd’hui 26 juillet comme le tueur de Mohamed Brahmi, est depuis longtemps connu des services de police français et tunisiens.

Il est le principal suspect de l’assassinat de Mohamed Brahmi. C’est lui qui, hier à midi, aurait tiré sur Brahmi à 14 reprises avec une arme automatique de calibre 9 mm, avant de prendre la fuite à moto. La même arme qui avait été utilisée pour tuer Chokri Belaïd le 6 février.
Il est d’ailleurs également mis en cause dans l’assassinat de Chokri Belaïd, puisqu’il serait lié au tueur présumé, Kamel Gadhguadhi.
Mais si le nom de Boubaker Al-Hakim n’a été révélé qu’aujourd’hui 26 juillet lors d’une conférence de presse tenue par le ministre de l’Intérieur Lotfi Ben Jeddou, l’homme n’est pas un inconnu.
Âgé de 30 ans et qualifié par le ministère d’ « élément salafiste extrémiste », ce Franco-Tunisien était déjà recherché en Tunisie, suspecté d’être impliqué dans la contrebande d’armes venant de Libye (son nom est cité dans l’affaire du dépôt d’armes de Mnihla). Il y a quelques jours, la police avait même tenté de l’arrêter à son domicile de la Cité La Gazelle, non loin de celui de Brahmi. Mais Al-Hakim avait pu s’enfuir, ne laissant derrière lui que quelques armes.
Le nom de Boubaker Al-Hakim se trouve également dans la liste des personnes recherchées dans les événements du Mont Chaambi, dévoilée fin mai par le ministère de l’Intérieur.

Du 19e arrondissement de Paris au jihad en Irak
Mais Boubaker Al-Hakim, né à Paris de parents tunisiens, est surtout connu pour son passé de jihadiste en Irak, qui lui a valu d’être condamné en France, en 2008, à une peine de 7 ans de prison ferme, avec une période de sûreté des deux tiers. Il organisait en effet, depuis 2004, la filière de recrutement et d’envoi de combattants djihadistes en Irak.
Son parcours est semblable à celui de beaucoup d’autres jeunes engagés dans ce que l’on appelait alors la « filière irakienne ». Al-Hakim vit dans un HLM du 19e arrondissement de Paris avec sa mère, ses deux frères et ses deux sœurs. Échec scolaire, difficultés économiques, sentiment de marginalisation… À l’âge de 17 ans, il commence à fréquenter la mosquée de son quartier, puis s’intéresse à l’islamisme. À 18 ans, il se rend en Syrie pour étudier l’islam et améliorer sa connaissance de l’arabe. Nous sommes en 2002. Al-Hakim revient en France quelques mois plus tard. Il porte désormais la barbe et le « qamis ».
En 2003, Al-Hakim et d’autres jeunes islamistes du quartier des Buttes-Chaumont se font particulièrement remarquer lors des manifestations contre la guerre en Irak. C’est là qu’il est repéré par les services de renseignement français.
Al-Hakim retourne ensuite en Syrie, d’où il part pour l’Irak au moment de la chute du régime de Saddam Hussein, invoquant des « raisons humanitaires » à son voyage. Il travaille en effet à l’époque comme traducteur pour des journalistes et des ONG françaises présents sur place.
De retour en France, il se marie et devient père d’une petite fille, puis part une troisième fois pour la Syrie, d’où il compte se rendre en Irak. Il convaint alors son frère Redouane de le suivre. Ce dernier deviendra d’ailleurs, en juillet 2004, le premier jihadiste français à être tué en Irak.
Al-Hakim, lui, n’a jamais atteint l’Irak. Il est arrêté à la frontière syro-irakienne alors qu’il tente de passer sans passeport. Il passe une année dans les geôles syriennes, avant d’être extradé vers la France en janvier 2005. Il a alors 21 ans.
Mis en examen pour « association de malfaiteurs en relation avec une entreprise terroriste », il est placé sous mandat de dépôt avant d’être jugé puis condamné en 2008.
Quant à la suite de l’histoire, elle est aujourd’hui encore inconnue. Reste à savoir quand Boubaker Al-Hakim a été libéré, et quand et dans quelles conditions il s’est rendu en Tunisie.