© Getty Images« Il est grand temps que les autorités cessent de rendre un hommage de pure forme aux droits humains et qu’elles prennent des mesures concrètes pour mettre fin aux atteintes commises », déclarait voilà à peine une dizaine de jours Hassiba Hadj Sahraoui, directrice adjointe du programme Moyen-Orient et Afrique du Nord d’Amnesty International dans le dernier rapport de l’organisation sur l’état des droits de l’homme en Tunisie. Les autorités tunisiennes, qui avaient vivement rejeté les accusations formulées par AI, les qualifiant de « totalement subjectives et dépourvues de crédibilité » jurant la main sur le cœur que la loi anti-terroristes « est conforme aux standards internationaux et offre toutes les garanties aux accusés, […] et n’autorise aucune prorogation abusive ou arbitraire des délais de garde à vue et de détention préventive », ont eu, depuis la publication du rapport, l’occasion de montré leur « bonne foi ».

Dans un communiqué reçu par courrier électronique le 2 juillet 2008, AI affirme que Ziad Fakraoui, ancien prisonnier et victime présumée d’actes de tortures lors de sa détention et dont le cas a été cité dans le rapport, et depuis « victime de ce qui s’apparente à des représailles de la part des autorités tunisiennes.»

« Ziad Fakraoui, […] a été arrêté par des agents des services de sécurité en civil, le 25 juin 2008, deux jours après la publication du document, et n’a pas été revu depuis son arrestation. Les responsables des services de sécurité qui l’ont emmené ont dit à sa mère qu’ils le conduisaient au ministère de l’Intérieur mais ont refusé d’indiquer le motif de son arrestation. Sa famille et ses avocats ont cherché, en vain, à obtenir de ses nouvelles après son arrestation. Les avocats ont appris ce mercredi 2 juillet uniquement, soit sept jours après son arrestation, qu’il avait été présenté à un juge d’instruction le 28 juin et inculpé d’appartenance à une organisation terroriste et d’incitation au terrorisme. »

Rapporte le communiqué.

Or, il se trouve, comme le rappelle AI, que Ziad Fakraoui a déjà été arrêté en 2005, jugé puis condamné à douze ans d’emprisonnement en décembre 2007 – peine ramenée à 3 ans après appel en mai 2008 – pour les mêmes faits qui lui sont reprochés aujourd’hui. C’est donc pour répondre aux mêmes accusations qu’il a été présenté devant le juge d’instruction au mépris du droit tunisien ainsi qu’au mépris de toutes les conventions internationales condamnant les peines multiples (voir le documentaire sur le drame des peines multiples en Tunisie). Cette entorse flagrante au droit n’est pas la seule commise à l’encontre de M Fakraoui par les autorités tunisiennes. « Le fait que personne n’ait été informé du lieu où il était détenu signifie qu’il a été détenu au secret pendant plus longtemps que la période de six jours autorisée par la loi tunisienne. » Précise Amnesty international.

Craignant pour sa sécurité, l’organisation à par ailleurs lancé un appel pour soutenir le prisonnier en exprimant dans un communiqué reçu par email le 3 juillet 2008 (voir plus bas le communiqué en anglais), « ses craintes de tortures et mauvais traitements » dont pourrait être victime M Fakraoui, rappelant l’article 13 du code de procédures criminelles tunisien qui stipule que :

« Les suspects ne peuvent être détenus par la police ou par la gendarmerie nationale pendant plus de trois jours. Le procureur public à le pouvoir d’étendre cette détention de trois jours supplémentaires « en cas de nécessité ». Les autorités sont obligées d’informer les prisonniers des poursuites engagées à leur encontre, la raison et la durée de leur détention et de leurs droits garantis par la loi, incluant le droit à un examen médical durant ou après la détention. Ils sont également tenus d’informer un membre de la famille proche du détenu de son arrestation et de sa détention. »

Comme nous venant de le voir et comme presque toujours, c’est plus au niveau des responsables de l’application de la loi qu’a la loi elle-même qu’incombe les pratiques les plus honteuses décriées ici par Amnesty international mais aussi ailleurs par d’autres organisations nationales et internationales. Encore une fois la justice tunisienne accepte de se salir les mains en effectuant les basses besognes d’un régime totalitaire qui a fait de l’intimidation, de la répression et de la torture un pilier de sa politique exercée en Tunisie depuis voilà maintenant plus de deux décennies.

Malek Khadhraoui
www.nawaat.org

————————————————————————————————————————-

3 July 2008

TUNISIA : Fear of torture or ill-treatment

Ziad Fakraoui is now known to be detained in Mornaguia prison, some 15km east of Tunis. His family was allowed to visit him but he has not been permitted access to a lawyer. When Ziad Fakraoui’s lawyer tried to visit on 3 July, prison guards told him that this was not possible for “medical reasons”, but did not give any further details. Ziad Fakraoui has been on hunger strike since 25 June in protest at his arrest.

Ziad Fakraoui was arrested on the morning of 25 June at his family home in Tunis by men in civilian clothing. The men identified themselves as state security officials, and told Ziad Fakraoui’s mother that they were taking him to the Ministry of the Interior. His family were not told where he was until 2 July, when they were informed by his lawyer. His family were able to visit him the same day.

On 2 July, Ziad Fakraoui’s lawyers were told that he had been brought before an investigating judge without the assistance of a lawyer on 28 June, and he faced charges of belonging to a terrorist organization and incitement to terrorism. These were the same charges for which he was arrested in 2005 and sentenced to 12 years’ imprisonment in December 2007, reduced to three years on appeal in May 2008. Ziad Fakraoui was released on 24 May 2008 as he had already served his sentence. The police report indicates that he was arrested on 26 June, one day after the actual arrest date.

The fact that no one was informed of his whereabouts meant that in effect, Ziad Fakraoui was held in prolonged incommunicado detention for longer than the maximum six-day period allowed under Tunisian law.

Under Article 13 of Tunisia’s Code of Criminal Procedure, suspects may not be detained by the police or the National Guard for more than three days. The Public Prosecutor has the power to extend this by a further three days in “cases of necessity.” The authorities are required to notify detainees of the procedures against them; the reason for and duration of their detention; and of the guarantees provided to them by law, including the right to medical examination during or after the detention. They must also notify a member of the detainee’s immediate family of the arrest and detention.

RECOMMENDED ACTION: Please send appeals to arrive as quickly as possible, in Arabic, French, English or your own language:

– urging the Tunisian authorities to grant Ziad Fakraoui immediate and regular access to his lawyer, and to ensure that he is not tortured or otherwise ill-treated in detention;
– calling on the authorities to give him regular access to his family and any medical treatment he may require;
– urging the Tunisian authorities to promptly charge Ziad Fakraoui with a recognizably criminal offence and bring him before a court in fair proceedings, or to release him;
– calling upon the authorities to ensure that Ziad Fakraoui’s family are not harassed by Tunisian security forces;
– calling for a thorough and impartial investigation into allegations that Ziad Fakraoui was tortured in 2005, and that those found responsible are brought to justice;
– reminding the authorities that as parties to the UN Convention against Torture, they are obliged to promptly investigate any allegations of torture.

APPEALS TO:

Minister of the Interior
Rafik Haj Kacem
Ministère de l’Intérieur
Avenue Habib Bourguiba
1000 Tunis
Tunisia
Fax: + 216 71 340 888
Salutation: Your Excellency

Minister of Justice and Human Rights
M. Béchir Tekkari
Ministry of Justice and Human Rights
31 Boulevard Bab Benat
1006 Tunis – La Kasbah
Tunisia
Fax: + 216 71 568 106
Salutation: Your Excellency

COPIES TO:

Mr. Ridha Khemakhem
General Coordinator for Human Rights
Ministry of Justice and Human Rights
31 Boulevard Bab Benat
1006 Tunis – La Kasbah
Tunisia

and diplomatic representatives of Tunisia accredited to your country.

PLEASE SEND APPEALS IMMEDIATELY. Check with the International Secretariat, or your section office, if sending appeals after 28 August 2008.