C’est dans le nord-ouest de la Tunisie que l’espace forestier est le plus étendu. Dans cette région, quatre espèces d’arbres sont généralement prédominantes dans ces forêts. Il s’agit du chêne liège, du chêne zeen, du chêne kermès (sur le littoral) et du pin maritime. Les forêts de chênes, mélangées ou à l’état pur, occupent l’intérieur des terres. Mais on peut également les trouver à basse altitude, le long de certains cours d’eau. Le pin maritime, lui, occupe la partie nord, le long de la frontière tuniso-algérienne. Tel est le schéma global des forêts naturelles. Toutefois, la main de l’homme a, dans certain cas, contribué à fausser ces paysages.
En effet, le pin pignon a été planté dans plusieurs étendues, tandis que le pin maritime a également été planté à l’Est de Tabarka alors qu’il ne s’y trouve pas naturellement. De même, des eucalyptus ont été plantés un peu partout, formant parfois de véritables forêts.
Dans cet article, nous présentons une partie de la diversité des oiseaux habitant ces différents types de forêts. Nous nous contenterons de présenter quelques espèces qui nous paraissent intéressantes, soit pour leur caractère commun, mais spécifique à cette région, ou parce qu’elles sont peu connues en Tunisie, même si elles y sont largement réparties. Il est évident que nous n’indiquerons pas les sites où elles ont été observées, sauf pour les espèces communes. Les informations présentées ne sont évidemment pas exhaustives.
La reconnaissance des espèces est relativement aisée moyennant l’utilisation d’un guide. A noter que les critères d’identification sont également disponibles sur internet.
Dans la famille comprenant les Pics, il y a quatre espèces : le Pic épeiche, le Pic épeichette, le Pic de Levaillant et le Torcol fourmilier.
Les trois espèces de Pics sont sédentaires, et habitent les forêts de chênes. Cependant, elles peuvent être observées dans d’autres types de formations arborescentes (sur des eucalyptus par exemple). Les plus communes parmi elles sont les Pics épeiche et de Levaillant. Ces deux espèces habitent surtout les forêts de chênes, mais aussi de pins ou d’eucalyptus. Le Pic épeichette est moins commun, mais à distribution large. Notons pour l’occasion que le Pic de Levaillant est une endémique maghrébine et qu’il peut être observé au sol où il chasse les fourmis. Les trois espèces construisent leurs nids dans les tiges et troncs d’arbres qu’ils creusent avec leurs becs puissants.
Le Torcol, lui, habite des milieux différents, assez ouverts et souvent près des habitations. Peu de couples ont été observés pendant la saison de reproduction. Discret, il est facile à détecter par son chant caractéristique qu’on ne peut confondre avec celui d’aucune autre espèce.
De la famille comprenant les corbeaux, nous ne présentons que trois espèces : le Grand corbeau, le Geai des chênes et le Tchagra à tête noire.
Le Grand corbeau est commun surtout près des décharges où il cherche sa nourriture parmi les déchets. C’est un charognard, mais il peut se nourrir de proies vivantes (couvées, lézards, petits oiseaux…). Une importante population se trouve près de la décharge de Ain Draham. On peut le voir survoler les forêts ou même les agglomérations. Sa grande taille, sa silhouette et sa voix permettent de l’identifier sans difficulté. Il nidifie sur de grands arbres disséminés dans la forêt.
Comme son nom l’indique, le Geai des chênes habite surtout les forêts de chêne liège et de chêne zeen. Il est souvent repéré par les cris stridents qu’il lance lorsqu’il détecte la présence des humains à proximité. Il était commun dans la région, mais la pression de chasse a décimé plusieurs populations, et l’espèce présente une distribution discontinue. Le Geai peut s’approcher des agglomérations et des installations humaines à la lisière des forêts.
Le Tchagra à tête noire est très difficile à voir à cause de ses mœurs. Il habite la végétation touffue (surtout les formations denses de chêne kermès) et il est silencieux la majeure partie de l’année. Très discret, il évite les humains. Il n’est cependant pas très fréquent.
Trois espèces de Mésanges, toutes insectivores, habitent les forêts. On peut les observer sur des arbres ou arbustes mais rarement au sol. La plus commune est la Mésange maghrébine qu’on peut voir dans les jardins et même en milieu urbain. De petite taille, son chant est un gazouillis continu légèrement aigu. La barre blanche entourant la partie supérieure de la tête permet de l’identifier.
La plus forestière des Mésanges est la Mésange noire. Elle est surtout présente dans les forêts de chênes, en altitude, mais elle se laisse facilement observer. Elle explore souvent les extrémités des tiges à la recherche d’insectes. Au printemps, son chant domine les sites où elle se trouve en abondance.
La Mésange charbonnière est moins commune que les espèces précédentes. C’est aussi la plus grande d’entre elles. Elle est rarement observée en dehors de la forêt, dans les vergers ou près des habitations.
Plusieurs espèces de Fauvettes habitent la Kroumirie. La plus commune est la Fauvette mélanocéphale qui a une large distribution en Tunisie et habite souvent les jardins.
La Fauvette à tête noire fréquente les fourrés de végétation et est très discrète. Elle est également peu commune, mais en hiver, on peut la voir à basse altitude, dans les jardins où sont plantés des arbustes touffus, notamment les haies. En milieu naturel, elle est présente dans les ronciers et les formations arbustives denses.
L’Alouette lulu n’est ni commune ni abondante. Elle fréquente les espaces ouverts et prairies à herbe rase situées en altitude, souvent en effectifs réduits. Discrète, elle peut passer facilement inaperçue. Cependant ses chants permettent de la détecter surtout pendant la belle saison.
La Bergeronnette des ruisseaux est la seule espèce sédentaire parmi ses congénères. Mais en hiver, des Bergeronnettes migratrices peuvent probablement venir passer l’hiver en Kroumirie ou ailleurs. Cette Bergeronnette fréquente les cours d’eau en pente où l’eau ne stagne pas. L’espèce n’est ni commune ni abondante. Un seul site de nidification est connu en Tunisie.
La Bergeronnette printanière passe l’été dans certaines zones humides à couvert végétal dense (typhaies). Elle vit cependant en petits groupes assez bruyants. On peut l’observer en nombre pendant ses migrations.
L’Etourneau unicolore n’était présent qu’au sud de la Kroumirie. Cependant, l’espèce est en phase d’expansion et atteint désormais la région de Tabarka. Sa couleur noire uniforme, son plumage luisant, sa queue courte et son bec long et pointu permettent de le distinguer du Merle noir avec lequel il peut être confondu. Cet oiseau n’est pas un habitant de l’espace forestier, mais peut se voir à sa lisière. Cet Etourneau imite les chants d’autres oiseaux et même d’oiseaux domestiques (poule, dinde), ce qui rend assez difficile sa détection grâce au chant.
Migrateur, le Gobemouche de l’Atlas, une endémique maghrébine, arrive dans la région au mois de mars. De petite taille, il habite surtout les chênaies d’altitude où il se reproduit dans les cavités des arbres âgés. On peut le voir en dehors de la forêt, mais toujours en milieu boisé. Très peu furtif, il se laisse facilement observer. Il se perche souvent sur une tige basse et descend de temps à autre capturer un insecte.
Le Grimpereau des jardins habite les vieilles formations de chênes, particulièrement en altitude. Il se place souvent sur les troncs et tiges couvertes d’un tapis de mousses qu’il inspecte à la recherche de sa nourriture (petits animaux). Silencieux, il lance de temps en temps un sifflement doux et fin, audible à courte distance. Il est sédentaire.
Sédentaire, le Gros bec casse-noyaux est peu fréquent en Kroumirie. Il visite les jardins à la lisière des forêts où il se nourrit des fruits disponibles (mûres par exemple). Silencieux, il est difficile à détecter surtout s’il se place en hauteur parmi le feuillage dense. Cet oiseau est parfois chassé pour être vendu sur certains marchés.
La Huppe fasciée est sédentaire et fréquente différents types d’habitats : jardins, oliveraies, clairières, forêts… où elle affectionne les espaces ouverts. Ses densités ne sont pas élevées et sa distribution est diffuse. Sa reconnaissance est cependant facile, par la couleur de son plumage et sa longue huppe. Son chant est lui aussi caractéristique.
La Grive draine est présente toute l’année dans la région. Elle fréquente surtout les forêts de chênes où elle se reproduit. En hiver, on peut la voir à basse altitude où elle cherche sa nourriture au sol, surtout dans des prairies à herbe rase. Elle est très furtive à cause de la grande pression de chasse qu’elle subit.
Tunisie : A la découverte des oiseaux de la Kroumirie (2/2)
Deuxième volet de notre article sur les oiseaux des forêts du nord-ouest de la Tunisie. En espérant susciter des vocations d’observateur ornithologique. Histoire de partager une passion qui ne devrait pas rester le privilège d’une infime minorité.
Il serait extrêmement utile et productif d’avoir les noms d’oiseaux en arabe (tunisien), si ce n’est tout l’article.
Merci quand même