À quoi servent les bilans ? On ne va pas se mentir : à tirer la chasse, s’ils sont négatifs. Difficile pourtant de classer les pires long-métrages tunisiens, produits entre 2011 et 2017, tant leurs propositions font pâle figure. Au panthéon de nos gros ratés, il y a sans doute des films d’époque. Ce qu’ils ont en commun, c’est l’Histoire sur l’estomac. Non moins dispensables, par leur côté tendancieux, les films qui en vain veulent rattraper la locomotive de la révolution. Et si les comédies résistent ne serait-ce qu’un petit quart d’heure, c’est déjà un exploit. Les drames ne sont d’ailleurs pas en reste. Mis sur des rails ennuyeux et divaguant sur d’autres rails rouillés, ces pires films ne savent pas où aller, comment y aller, ni quoi y faire.
Rizk El Bey Lik (2016)
On ne pouvait pas ne pas s’étrangler devant cette grosse croûte, avec pour ingrédients cavalerie, chants et batailles. Ce film, qui n’en est pas un, se cale sur l’histoire d’une révolte de villageois contre les autorités beylicales. On retrouve dans Rizk El Bey Lik de Habib M’Selmani tout ce qui nous fait pester contre la piètre qualité de ses feuilletons. A savoir : un scénario très mal écrit et un jeu d’acteurs totalement en roue libre. Et la mise en scène ? Inutile de dire qu’elle brille ici par son absence. Si seulement M’Selmani avait jeté l’éponge une fois pour toutes, rien de tout cela ne serait arrivé.
Vagues brisées (2017)
À l’autre bout du spectre, Vagues brisées de Habib Mestiri ne vaut pas mieux. La mémoire rétinienne n’a le temps de rien ingérer ici. Rien qu’avec l’ineptie des dialogues, le scénario patine autour d’un officier tunisien dans l’armée française qui n’hésite pas à jouer l’informateur auprès des militants, quitte à se voir persécuté quelques années après l’Indépendance. Démonstratif, le film se sert mal entre autres des archives visuelles, pour reconstituer, encore plus mal, un chapitre de l’histoire nationale. Ne sachant gérer ses ambitions, la mise en scène saigne de tous les pores.
El Jaida (2017)
Les tentatives manquées ne manquent pas décidément, comme l’est encore celle d’El Jaida de Selma Baccar. Il faut dire que l’on n’osait plus rien attendre d’elle. Pompé sur Pécheresses (2009) d’Ayda Ben Aleya, le film a beau resserrer les destins de quatre femmes jugées rebelles dans une ancienne maison d’arrêt, il n’en reste pas moins qu’il fait partie du ventre mou. Mais le pire, c’est que la réalisatrice ne se contente pas d’écrire une histoire avec les pieds – ce qui aurait été à la limite louable –, il faut qu’elle nous donne aussi des leçons redorées de patriotisme au goût du jour. Une preuve supplémentaire, s’il en fallait une, que la cinéaste n’a plus grand chose à prêcher.
Conflit (2014)
Avec un lourd cahier de charges et un entrain misérabiliste, Conflit de Moncef Barbouch n’est d’ailleurs pas logé à meilleure enseigne : ce film élit domicile dans le contre-champ de la dictature. Sur fond d’harcèlement et de torture infligés à un professeur ainsi qu’à sa famille sous Ben Ali, il presse le pathos politique des islamistes et de la gauche comme une vieille citronnade. La misère du film vient de ce qu’il ne sait pas trop ce qui lui manque, entre des comédiens consternants, des dialogues réduits à une série de contractions discursives et l’huile de coude étalée sur ses images.
Dicta Shot (2015)
Entre ratés et bouses, il y a encore place pour les pneus crevés. Dicta Shot de Mokhtar Laajimi veut ouvrir le hors-champ de Janvier-2011 depuis un asile psychiatrique, sans pour autant dépasser le niveau rase-mottes d’un scénario prévisible avec des malades, leur tortionnaire et une rébellion qui se prépare pas loin. Si le film emprunte la pente glissante d’un huis-clos, il peine à compter sur son suspense théorique. On sait d’avance qui va mourir et qui s’en sortira. Absolument aucun intérêt.
Zizou (2015)
Monstruosité, Zizou de Férid Boughedir baigne dans l’insignifiance à tous les niveaux. Usé jusqu’à la corde, son scénario situe la petite histoire à la veille de la révolution tout en se rêvant de couilles et de comique constipé, à grand renfort de raccourcis et de clichés. Tout est dans le chapeau de pailles de son protagoniste fébrile qui quitte le sud pour chercher du travail à la capitale, mais de déboire en déboire, se trouve obligé de sauver une nana séquestrée par le clan mafieux au pouvoir. On n’y insistera jamais assez : si le ridicule a ses saints, Boughedir aura désormais sa place dans le catalogue. Comédie sociale ? C’est de la sinistrose pure.
Woh (2016)
Mais il y a pire que ce comique constipé ; il y a le comique lourdingue d’Ismahane Lahmar. Faussement malin et ostensiblement chichiteux, Woh affiche une ambition de comédie loufoque qui veut dégonfler la baudruche familiale, pour un résultat de caleçonnade homophobe. Et on ne sait que trop le goût que nous laisse sa forme sitcom, qui commence devant les toilettes, avant de passer à table. Un film qui plonge tête baissée dans les clichés qu’il prétend mettre à nu.
Épines de jasmin (2013)
Et le mélodrame, par hasard ? C’est un cercle vicieux. En circuit fermé, Épines de jasmin de Rachid Ferchiou est prétentieux. S’il relève d’un genre petit-bourgeois devenu facile à cerner, il s’efforce en vain de chauffer son spectateur avec l’histoire d’une liaison secrète entre un homme d’affaires, que la révolution a rendu à la fois veuf et dépressif, et la meilleure copine de sa fille unique, venue à la demande de celle-ci le séduire pour le consoler. Transpirant le vide de bout en bout, ce film rampe aussi péniblement que les travellings avant de sa caméra. Il n’y a rien à lui accorder. Simplement pitoyable.
Ma poupée chinoise (2015)
On aurait tort cependant d’en rester là, car Ma poupée chinoise du même Ferchiou se situe un cran au-dessous. Condamné à tourner court avec une poupée et une vieille boite à musique comme soupapes d’une histoire œdipienne, ce film n’a qu’à se passer les plats entre la Tunisie et la Chine, entre une petite fille devenue adulte et un père décédé mais qui resurgit, avant de tomber à plat entre deux trois ellipses. Ce qui se voulait une fresque intimiste cache mal les images de sa vacuité liftée. Une nullité !
Lilia, une fille tunisienne (2016)
Si ce genre de drame vautré tourne en rond, les catastrophes arrivent avec des personnages clés en main. Le pire est à chercher du côté de Lilia, une fille tunisienne. Avec ce film, Mohamed Zran se membre d’un torchon. Là, pour le coup, c’est l’histoire grossièrement brossée d’une jeune bachelière fraîchement dépucelée. Il n’y a qu’à la voir danser comme une patate, ou parler philo, ou encore se taper le copin de sa mère, pour sentir déjà le fiasco. On se dit que ce film est l’un des plus putassiers vus depuis longtemps sur un écran. Médiocre, gratuit et racoleur.
je n’ai vu qu’un film parmi cette liste, mais l’article m’a fait bien marré, je rigolai surtout car reconnaissant la médiocrité du cinéma tunisien et la production télévisuelle tunisienne en général, production par moulage répétitif et stupide
haahhaaa il est génial,c est atroce ce palmarés