Transition démocratique 196

Le phénomène Kais Saied face à l’Histoire

Le phénomène Kais Saied enracine la Tunisie dans son identité en même temps qu’il l’extirpe de sa torpeur. C’est sur cela que repose sa légitimité: tunisianité et intégrité. En ce sens, son conservatisme n’est pas abstrait et absolutiste, mais contextuel, lié aux croyances des gens ordinaires. Mais rien n’assure que le président réussira.

La fausse solution du présidentialisme : crise de système ou de gouvernance ?

Le 22 septembre 2021, le Président de la République a promulgué un décret où il annonce une nouvelle organisation des pouvoirs publics qui bouleverse l’ordre constitutionnel et place le décret présidentiel au-dessus de la constitution, inversant ainsi la hiérarchie de la pyramide institutionnelle. « Au nom de la Constitution, à bas la Constitution »,pourrait-on résumer ce décret présidentiel qui ne souffre aucune ambiguïté quant à la volonté de liquider les acquis institutionnels de la révolution et d’établir un pouvoir absolu sans aucun garde-fou.

L’ISIE, un marqueur de la post-révolution

L’ISIE a marqué les dix dernières années de la Tunisie pour avoir piloté pas moins de six élections majeures (une constituante, deux scrutins présidentiels et législatifs, et une élection municipale) qui ont transformé le paysage politique et institutionnel tunisien. Sans parler des opérations que cette institution a été appelée à organiser comme, par exemple, l’élection des membres du Haut Conseil de la magistrature. Elle demeure un sujet d’actualité dès lors qu’on évoque de façon récurrente l’hypothèse d’élections anticipées tant l’instabilité gouvernementale imprègne le climat général du pays.

Dix ans de révolution et de transition : un deuxième souffle ?

L’anniversaire de la Révolution cette année, affecté par l’absence des festivités habituelles sur l’avenue Habib Bourguiba à cause du confinement général de quatre jours décidé par le gouvernement, a été malgré cela marqué par des émeutes des jeunes de quartiers très révélatrices et donnant écho à un cri de colère retentissant. Des jeunes, et parfois des mineurs, se sont ainsi rassemblés dans des différents quartiers, pour exprimer leur ras-le-bol et entrer en confrontation avec la police.

Entretien avec Leyla Dakhli: «L’exception tunisienne», ses usages et ses usagers

Leyla Dakhli, historienne tunisienne spécialiste de l’histoire intellectuelle et sociale du monde arabe, a récemment écrit une recension de l’ouvrage « Tunisia : An Arab Anomaly » de Safwan Masri, dans laquelle elle revient longuement sur l’usage politique qui est fait de la notion d’ « exception tunisienne » par ce dernier. A l’occasion d’un colloque à Tunis, nous l’avons rencontrée pour revenir sur cette notion et ses implications ainsi que sur les parcours professionnels du personnel politique qui la porte aujourd’hui.

A bas le paternalisme de la démocratie libérale !

La démocratie est la pierre philosophale des temps modernes. Elle est la seule à même de transformer les sauvageons en civilisés. Ceux qui aspirent au progrès doivent impérativement commencer par aspirer à la démocratie. Le peuple qui l’accueille en son sein doit se réjouir de son salut prochain, tout en portant dans le plus grand silence la croix sur laquelle les politiciens peuvent éventuellement le crucifier. Il ne faut pas se plaindre, quand on voit la dissidence des élus censés représenter le peuple. En Tunisie, quand les gens se plaignent, on voudrait bien les fouetter pour châtier leur manque de foi en la sainte démocratie.

Interview avec Kamel Jendoubi: « La situation politique ne présage rien de bon »

Dans cette interview, Kamel Jendoubi, ancien président de l’Instance Supérieure Indépendante des Elections (ISIE), met en garde contre les dangereuses entraves au processus électoral tout en relevant les déviations qu’il a connu durant l’année écoulée. Il y fait part aussi de son inquiétude des dérives inconstitutionnelles et leur impact politique sur les résultats des prochaines élections municipales qui risquent de reproduire la domination des mêmes partis et les mêmes conflits sur le partage du pouvoir. Un scénario plausible en l’absence totale d’un projet clair, à moyen et à long terme, concernant la gouvernance locale.

Comme mon nom l’indique, je m’appelle révolution

Le 17 décembre 2010, Mohamed Bouazizi mettait le feu au monde arabe. J’ai envie de dire que, depuis la victoire de la révolution algérienne, nous n’avons pas connu d’événement positif d’une telle importance. Le moment négatif majeur a été sans doute la défaite de juin 1967. Moins d’un mois après le sacrifice du héros de Sidi Bouzid, le plus laid des dictateurs prenait l’avion pour Ryad. Une période historique nouvelle, loin d’être close à ce jour, était ouverte.

Crise de l’ISIE et tractations parlementaires : Chronologie des faits

Mohamed Tlili Mansri a été élu, hier mardi 14 novembre, à la tête de l’Instance Supérieure Indépendante des Elections (ISIE) avec 115 voix. Depuis la démission de Chafik Sarsar de ce poste en mai dernier, les conflits et tergiversations des blocs parlementaires majoritaires ont empêché l’Assemblée des Représentants du Peuple (ARP) de remplacer le président et de combler les autres vacances au sein du conseil de l’ISIE. Retour sur les principales étapes qui ont marqué ce processus.

Interview avec Alain Gresh : « Ce qui me frappe en Tunisie est que personne n’a un programme »

Fondateur d’Orient XXI et ancien rédacteur en chef du Monde Diplomatique, Alain Gresh vient de publier « Un chant d’amour. Israël-Palestine, une histoire française » (La Découverte, 2017), avec la dessinatrice Hélène Aldeguer. Auteur de plusieurs ouvrages sur le Proche-Orient, il est l’un des plus fins observateurs et analystes de l’actualité du monde arabe dans la presse française. Alain Gresh a été l’invité de Nawaat à l’occasion de la présentation de son nouveau roman graphique, le 03 octobre, au siège de la Fondation Rosa Luxembourg à Tunis.

La Tunisie en dépression démocratique

Quel est le point commun entre Afraa Benazza et Hicham Alaoui ? A priori, on pourrait penser qu’il n’y en a pas. La première, qui n’a pas vingt ans, est une inflexible militante kefoise dont l’éclosion, comme celle de beaucoup d’autres insoumis, constitue le principal acquis de notre révolution. Le second est un opposant marocain réformateur, membre de la caste régnante au Maroc et candidat au trône. Tous deux pourtant, aussi différents soient-ils, ont été victimes de l’arbitraire de l’Etat tunisien.

Elections municipales: un parcours parsemé d’embûches

Les appels des partis à reporter les élections municipales se multiplient en cette rentrée politique. Or, la date du scrutin, le 17 décembre 2017, a été fixée depuis le 03 avril dernier. Abstraction faite des élucubrations politiciennes, plusieurs contraintes menacent l’intégrité de ces élections et la nouvelle gouvernance des localités dont les prochains élus bénéficient de plusieurs nouveaux pouvoirs conférés par la nouvelle constitution de 2014. Retour sur un parcours parsemé d’embûches fragilisant cette démocratie naissante.

Kamel Daoud et le gardien de son sommeil 

La rhétorique onirique de Kamel Daoud cherche à évincer le sommeil dans un récit national qui pourtant l’impose. Mais par le procédé d’identification imaginaire, il fixe bien le rétroviseur. C’est qu’en déposant des œillères sur le présent de la transition tunisienne, Daoud pense au refoulé algérien, pris en tenaille entre les fantasmes nostalgiques et les incertitudes du futur.

Gramsci, boîte à outils ou moule à gaufres ?

On ne sait jamais les visages que prennent les morts à distance. Les rides plus ou moins gommées, Gramsci revient après une certaine éclipse. Il revient timide, mais toujours derrière ses bésicles en fil de fer de Nuremberg. Tout dit qu’un petit vent souffle en faveur de son néo-marxisme. Mais après les latinos et les férus des subalterns studies, en quoi cette pensée trouve-t-elle encore à nous parler ? L’occasion nous est donnée d’en savoir un peu plus grâce à la tentative de Penser la transition avec Gramsci. Tunisie (2011-2014), signée Baccar Gherib.
Ce livre a obtenu le prix de l’essai en sciences humaine de la 33 ème édition de la Foire internationale du livre de Tunis (24 mars-2 avril 2017), ex æquo avec celui de Yadh Ben Achour, Tunisie, une révolution en pays d’Islam. Tunis, Cérès, 2016.

[Il ne passera pas – ما_يتـعـدّاش#] : Justice transitionnelle, Transition démocratique…et projet de loi sur la réconciliation économique

Au-delà des griefs exposés par les détracteurs du projet de loi sur la réconciliation, c’est de l’avenir de la démocratie tunisienne qu’il s’agit et de son processus de transition démocratique. Et les griefs, à l’instar de ceux formulés par l’Association des Magistrats Tunisiens, donnent une idée assez significative sur la gravité de la situation. Dans le même sens, nous publions ci-dessous l’intégralité des interventions ayant eu lieu au cours de la conférence de presse de l’initiative «Ma Yet’addech» [Il ne passera pas ! – ما_يتـعـدّاش#]. Il s’agit d’une initiative de plusieurs composantes de la société civile tunisienne fermement opposées au projet de loi relatif à la réconciliation économique et financière. Ladite conférence fut donnée le vendredi 15 juillet 2016 afin d’exposer les lourds griefs, tout aussi pertinents que ceux de l’AMT, contre ledit projet.