Question tarification, Khaled Hmani explique que le compteur du taxi reste la référence. «Nous suivons la trajectoire du taxi avec Google Maps, mais nous n’avons pas le droit de créer un compteur Bolt. Le prix de la course est calculé à partir du compteur du taxi». Cependant, il faut tenir compte de plusieurs paramètres dans la comptabilisation du coût de la course, dont l’heure, la direction et les conditions météorologiques. Pendant les heures de pointe, notamment après les horaires de travail, tout le monde cherche des taxis libres, et c’est là où le taxi Bolt s’impose. « Il faut se conformer à la règle du marché, basé sur l’offre et la demande. Lorsque la demande est abondante et l’offre est rare, le tarif augmente selon la disponibilité des taxis», précise le directeur de communication de Bolt. Il n’y a donc pas de tarif standard pour l’application.
Une démarche critiquée par I Watch. L’organisation a même récemment poursuivi en justice la société Bolt Technology suite aux doléances formulées par plusieurs citoyens. L’appli mobile est accusée d’une violation des dispositions de Loi 2000-83 relative aux échanges et au commerce électronique.
Cependant, nombreux sont les clients qui y trouvent leur compte, surtout face à la médiocrité de l’offre des transports publics. «Je prends un taxi Bolt principalement le soir. J’habite en banlieue sud et j’utilise Bolt pour me rendre en banlieue nord», nous confie Salma, 28 ans, à la recherche d’un emploi. Et de poursuivre : «Cela me coûte 4 dinars de plus. La course en taxi individuel varie entre 12 et 14 dinars, et avec Bolt ça passe à 18 dinars. Mais j’ai l’impression que c’est plus sûr que de chercher un taxi habituel. Les histoires d’enlèvement me font particulièrement peur». Salma reste préoccupée par la sécurité, lors de ses déplacements nocturnes.
Idem pour Rabeb, 34 ans, journaliste, qui refuse de prendre un moyen de transport en commun, et préfère le taxi pour garantir «confort et sécurité». «La situation des métros ne cesse de se dégrader depuis environ deux ans. Pour éviter le harcèlement sexuel, il vaut mieux prendre un taxi».
Régulation institutionnelle
Le secteur des taxis individuels était régi par la circulaire n°40 de l’année 2015 fixant les modalités d’obtention des permis de conduire de la catégorie de taxi. Dans ce cadre, un comité était chargé de l’examen des demandes d’obtention d’autorisation de taxi individuel. Ce comité comportait des représentants du gouvernorat, de la direction régional du transport, de la CNSS et de l’UTICA. « Cette circulaire a été remplacée par une autre, la 201, qui a élargi la composition du comité, qui compte désormais les représentants des professionnels du métier et toute personne dont le gouverneur juge la présence utile. Mais cette circulaire a été à son tour suspendue en septembre 2021 par le ministère des Transports», nous explique Olfa Ballouchi. Et de rebondir : «en réalité, nous faisons face à un conflit de compétences entre les syndicats représentant les taxis individuels et l’UTICA. Mais il n’y a pas vraiment de problèmes majeurs au niveau de la régulation du secteur».
Mais les tiraillements sont persistants. Dans une note interne adressée au ministère des Transports dont on a reçu une copie, le syndicat des taxis individuels exige la représentation des organes relevant de la CONECT, pour mettre fin au monopole de l’UTICA dans la représentation des professionnels du métier.
Manifestement, dans la sphère des taxis, les applications mobiles gagnent du terrain. Reste à garantir l’intérêt des utilisateurs, dans un contexte marqué par la dégradation accélérée des transports publics. A moins que l’Etat continue de laisser faire, et de laisser passer.