A coup de motions, de sit-in et de manifestations, la cheffe du Parti Destourien libre (PDL) se prétend être un barrage contre l’islamisme et ce qu’elle nomme « les frères » en Tunisie en allusion à Ennahdha. Elle ne mâche pas ses mots pour crier haro contre « le modèle sociétale obscurantiste » des islamistes. Un positionnement qui lui a offert une grande visibilité et une certaine popularité, à en croire les derniers sondages publiés le 14 août qui donnent son parti gagnant des élections législatives. Si Abir Moussi s’attaque frontalement aux islamistes, ce n’est en tous cas pas en raison de leurs positions sur les questions sociétales. En attestent ses opinions sur certains sujets, loin d’être en opposition avec ce que prônent les islamistes. Et ce, sans oublier sa défense du conservatisme et de l’autoritarisme benalistes.

Contre l’égalité à l’héritage

Tout en revendiquant l’héritage progressiste bourguibien, la leader du PDL a été une farouche opposante au rapport de la Commission des libertés individuelles et de l’égalité (Colibe) proposant des réformes sociétales. Selon son parti, ce rapport « porte atteinte au texte coranique » concernant la proposition d’instaurer l’égalité à l’héritage. Elle décrit ce rapport comme étant « improvisé » et «populiste ». Selon elle, il est le résultat d’une pression internationale, plus précisément celles des directives européennes. Et elle part encore plus loin. Pour Moussi, l’égalité dans l’héritage conduit à la reconnaissance des mariages hors du cadre de la loi ainsi que les droits dans l’héritage à l’enfant adultérin, ce qui constitue, pour elle, « une atteinte à l’institution de la famille ». Par ailleurs, le programme du PDL s’engage à consolider la famille comme « noyau de la société », tout comme celui d’Ennahdha.

Contre la dépénalisation de l’homosexualité

Autre réforme proposée par la Colibe et considérée par Moussi comme une remise en cause de l’institution familiale, la dépénalisation de l’homosexualité. « Il faut faire une distinction entre les libertés sexuelles et l’homosexualité. On ne dépénalisera pas l’homosexualité », dit-elle. Pour Moussi, la dépénalisation de l’homosexualité « conduirait à la revendication du mariage homosexuel » et « ébranlera le modèle sociétal tunisien ». Elle va plus loin en jugeant qu’une dépénalisation de l’homosexualité entrainerait la propagation des pratiques sexuelles. «Celui qui n’était pas homosexuel pourrait le devenir », affirme-t-elle.

Tout en se déclarant contre l’atteinte à la dignité de la personne, Moussi est pour la réalisation des tests anaux dans le cadre d’une affaire judiciaire.

Contre l’abrogation de la peine de mort

La cheffe du PDL est également contre l’abrogation de la peine de mort réclamée par le rapport de la Colibe. Elle s’oppose également à l’adoption d’un code des libertés individuelles tant revendiqué par le Collectif civil pour les libertés individuelle.

En somme, l’ancienne figure du RCD se présente comme étant contre aussi bien les islamistes que ceux qu’elle qualifie « d’extrémistes de l’autre bord ». Mais en réalité, malgré son opposition à Ennahdha, Abir Moussi demeure aussi conservatrice que le parti islamiste.