Après avoir construit illégalement et s’être accaparé le bien d’autrui en plein domaine forestier, Ajroudi risque une amende de plusieurs milliers de dinars et une peine d’emprisonnement. Pourtant il continue à braver les lois et intimider ceux qui tentent de dénoncer ses entraves à la loi. Non seulement les autorités tardent à intervenir, mais elles font la promotion de son nouveau mégaprojet saugrenu, une « éco-cité » dans la région du Cap Bon.
Le 29 janvier, à Jbel el Faouara, dans la forêt de Hammamet, avait lieu un pique-nique de protestation contre la construction illégale de Mohamed Ayachi Ajroudi et les menaces subies par les promeneurs. Depuis, les organisateurs ont reçu des appels de différents responsables locaux leur intimant d’arrêter d’élever la voix. « Même le gouverneur ne nous parle plus », témoigne l’un d’eux. Ce n’est pourtant pas la première fois que les agissements de Ajroudi dans la forêt de Hammamet sont dénoncés par les riverains. Ainsi, depuis près de cinq ans, un voisin mène une bataille juridique pour récupérer son terrain, dont Ajroudi s’est emparé pour construire un terrain de basket.
Une bataille acharnée autour du terrain de basket
En 2001, Seifallah Blili, éditeur et imprimeur, achète un terrain de 6500 m2 dans la forêt de Hammamet. Il l’achète dans l’indivision – le terrain fait partie d’un lot plus vaste – mais les délimitations lors de l’achat sont claires, basées sur un plan. Le terrain correspond à une clairière en pleine forêt, que jouxte un oued, clairière qu’il cerne d’une clôture en bois. Il fait moins d’un hectare, seuil au-dessous duquel, en zone agricole, il est interdit de bâtir[1]. Par ailleurs, deux caroubiers bicentenaires s’épanouissent au beau milieu de la clairière : il s’agit d’arbres protégés qu’il n’est pas autorisé à abattre.
Le 25 juin 2012, Blili reçoit un coup de téléphone de la part d’un voisin : quelqu’un est en train de construire sur son terrain. L’oued a été obstrué pour permettre un passage depuis la parcelle voisine, les barrières en bois ont disparu, remplacées par un mur en brique, un caroubier a été arraché et des travaux de terrassement ont été entrepris pour ériger dans la clairière un terrain de basket. Rapidement, l’identité de l’accapareur de terrain se fait connaître : Mohamed Ayachi Ajroudi, qui a déjà construit une résidence luxueuse sur la parcelle voisine et entamé les travaux d’un imposant cube de béton de quatre étages.
Dès le lendemain, le 26 juin 2012, Blili s’engage dans une bataille acharnée pour reconquérir son terrain et faire condamner Ajroudi. Il en fait une question d’honneur. Il dépose une plainte auprès du procureur de la République du tribunal de première instance de Grombalia (doc 1) ainsi que du service forestier du Commissariat régional au développement agricole (CRDA) de Nabeul (doc 2). Une commission impliquant les directions des forêts, des eaux et des sols se rend sur place et établit un constat, dont le PV est transmis au gouverneur de Nabeul de l’époque, Mahmoud Jaballah.
Le 21 août 2012, un arrêté de démolition est émis : à charge de Ajroudi de démolir les constructions sur le terrain de Blili. La Garde nationale et le Commissariat régional au développement agricole de Nabeul sont chargés par le gouverneur de faire exécuter l’arrêté. En se basant sur le rapport d’expertise, le juge cantonal de Hammamet rend son jugement : Ajroudi est condamné à quitter le terrain et payer les frais de démolition du terrain de basket. Ce qui n’empêche pas le neveu de Ajroudi et ses acolytes, aux carrures et conduites intimidantes, de le menacer.
La guerre est déclarée
En 2013, Ajroudi entame son ascension politique : il crée son propre parti, rachète une chaîne de télévision – Al Janoubiya – et se porte candidat à l’élection présidentielle, puis se retire en septembre 2014. Fort de cette publicité, il fait appel de la décision de justice concernant le terrain de Blili en novembre. Toutefois, le jugement en appel confirme celui de la première instance. Ajroudi tente alors un pourvoi en cassation qui lui est refusé le 13 juillet 2015.
A l’automne 2016, Blili décide de faire exécuter le jugement. Accompagné d’un huissier notaire, il se présente au rendez-vous avec la garde nationale. Celle-ci se montre réticente à intervenir, les agents prétextant d’abord l’indisponibilité des véhicules, puis, après un contact téléphonique avec leur supérieur, le besoin de réaliser une enquête supplémentaire. Blili envoie des lettres aux autorités concernées pour réclamer le respect de la décision de justice. La garde nationale finit par le convoquer une nouvelle fois en présence de l’huissier notaire et, le 14 décembre, ils se rendent tous ensemble sur les lieux. Ils découvrent alors que le sentier menant à son terrain est barré par un portail.
Ajroudi a acheté une propriété voisine. Désirant la clôturer, il en a profité pour agrandir sa propriété et il a annexé une surface de terrain appartenant au domaine public, qui comprend aussi une portion du sentier menant à la clairière et en entrave donc l’accès. Le groupe passe finalement par l’oued, et Blili récupère ainsi son terrain. Il lui reste à en recouvrer l’accès. Il adresse une nouvelle lettre au Commissaire régional au développement agricole de Nabeul. Le bras de fer judiciaire n’est donc pas prêt de s’arrêter.
Est-ce dû à un sentiment d’impunité, ou de rage envers toute personne qui se mettrait sur son chemin ? Non content d’enfreindre la loi à plusieurs reprises, de s’accaparer des terrains qui ne lui appartiennent pas, de se livrer à des manœuvres d’intimidation, Ajroudi s’entête dans les procédures judiciaires, alors même que la justice ne lui donne pas raison… Ainsi, il accuse à plusieurs reprises ses adversaires d’avoir soumis de faux documents. La dernière en date : après que le procès en appel ait donné raison à Blili et que le pourvoi en cassation lui ait été refusé, il a tenté de mettre en cause le contrat d’achat de terrain de Blili qui date de 2001. En vain.
Des autorités impuissantes ?
Si Mohamed Ayachi Ajroudi peut s’entêter ainsi, c’est parce que les autorités responsables de l’application de la loi ne se pressent pas pour contrer ses agissements. Le terrain appartenant à Seifallah Blili, tout comme celui où Ajroudi fait construire son imposant palais est soumis au régime forestier. Le service des forêts a tardé à réagir aux constructions illégales, tout comme à l’accaparement du terrain, à l’arrachage du caroubier ou à l’obstruction du sentier, alors qu’il est chargé de la surveillance de la zone. Mais il a fini par se saisir du dossier. Moncef Tayeb, le commissaire régional au développement agricole de Nabeul, a confirmé que des procès-verbaux ont été dressés concernant les infractions commises par Ajroudi et qu’un arrêté de démolition des constructions illégales a été émis.
L’exécution est maintenant entre les mains des autorités du gouvernorat de Nabeul et de la municipalité de Hammamet. Mais il semble que Mohamed Ayachi Ajroudi mette tout en œuvre pour s’attirer les faveurs des gouverneurs. Ainsi, le journal télévisé de la chaîne dont il est propriétaire, Al Janoubiya TV, a diffusé un reportage de 8 minutes 30 à la prise de fonction de Mnaouar Ouertani le 21 septembre 2016, gouverneur de Nabeul à l’heure actuelle, une durée disproportionnée par rapport à l’importance de l’évènement.
Les tergiversations de la Garde nationale pour faire appliquer les décisions de justice auraient aussi de quoi étonner. Il n’en reste pas moins que, pour avoir défriché et construit sans autorisation, mais aussi érigé une clôture sur un sentier forestier, Mohamed Ayachi Ajroudi encourt le paiement d’amendes, voire une peine de prison.
« Quiconque ayant défriché sans autorisation préalable une terre soumise au régime forestier est puni d’une amende de 500 à 5000 dinars par hectare de terre défrichée. (Paragraphe 2 modifié par la loi n° 2005-13 du 26 janvier 2005). L’amende pour les superficies défrichées, labourées ou cultivées, inférieures à un hectare ne pourra descendre au-dessous du minimum. Le terrain défriché illicitement sera reboisé par “le ministère chargé des forêts” aux frais du délinquant. […] Il pourra en outre être prononcé contre les contrevenants aux dispositions du présent article une peine de prison de 16 jours à 2 mois. En cas de récidive, le maximum de l’amende et la peine de prison seront toujours prononcés. » Article 74 du code forestier
« Quiconque aura occupé un terrain dans le domaine forestier de l’Etat, en infraction aux articles 75 à 77 du présent code, ou édifié sur de tels terrains une construction, abri ou clôture même provisoire de quelque nature que ce soit, sans autorisation préalable “du ministère chargé des forêts” sera condamné à une amende de 20 à 100 dinars ainsi qu’à la démolition à ses frais de la construction, l’abri ou la clôture dans un délai de 30 jours à dater du jugement définitif qui l’aura ordonné. En cas de récidive, le maximum de l’amende est prononcé, ainsi qu’un emprisonnement de 15 à 30 jours, ou à l’une des deux peines seulement. » Article 78 du Code forestier
Le littoral en danger
Glisser d’un côté ou de l’autre côté de l’image pour voir la progression de l’urbanisation à Hammamet.La défense de la forêt de Hammamet pourrait aussi être du ressort de l’Agence de protection et d’aménagement du littoral (APAL), « chargée de la protection du littoral contre les empiètements occasionnés notamment par les constructions et implantations contraires aux lois et règlements en vigueur » (Article 4 de la Loi n° 95-72 du 24 juillet 1995, portant création d’une agence de protection et d’aménagement du littoral). En effet, le champ de responsabilité de l’agence s’étend aux « zones intérieures dans des limites variables selon le degré d’interaction climatique, naturelle et humaine entre elles et la mer, tels que les forêts littorales, les estuaires, les caps marins et les zones humides littorales. » (Article 1)
Jointe par téléphone, la section de Nabeul de l’APAL a néanmoins déclaré que l’agence n’avait pas d’activités particulières dans la zone de Jebel el Faouara. Mais, avec 167 agents, dont 15 pour tout le Cap Bon, pour 2290 km de littoral, l’agence ne dispose vraisemblablement pas des moyens nécessaires pour en assurer la protection…
La végétation littorale joue un rôle crucial dans la préservation de l’équilibre écologique et climatique de la zone côtière de Hammamet, qui n’est d’ailleurs pas étranger à son attrait touristique. Elle est mise en danger par le phénomène d’urbanisation intense que subit la zone côtière. Les constructions non autorisées de millionnaires comme Ajroudi participent à cette menace.
Un éléphant blanc et de nouveaux défrichements en vue ?
Ajroudi semble pris d’une fièvre bâtisseuse, avec une prédilection pour les sites forestiers. Le 30 mars 2017, son nouveau mégaprojet touristique a été présenté au siège du gouvernorat de Nabeul, en la présence de ses amis Taoufik Baccar, dernier directeur de la Banque centrale sous la dictature, très proche de Ajroudi depuis 2014, et bien entendu Mnaouar Ouertani, le gouverneur, qui a déclaré vouloir soutenir l’initiative : une « éco-cité » située entre El Haouaria et Takelsa, baptisée avec beaucoup d’inventivité Port Bon.
Bernard Gehin et Frédéric Bascuñana, de la mystérieuse société Carthage Investissement, qui n’a même pas de site internet, l’ont défendu devant une salle clairsemée. A grand renfort de diapositives PowerPoint, de vidéos de démonstration et de gesticulations typiques des grandes écoles de management, ce dernier a tenté de convaincre de la pertinence de défricher des centaines d’hectares de forêt pour un éléphant blanc de 500 000 m2, qui n’a bien entendu rien d’écologique :
« Nous allons y développer des espaces dédiés à la santé et au bien-être – vous vous rappelez, nous parlions beaucoup d’écologie – il y aura un parcours santé, il y aura un complexe sportif, et même un hippodrome, une idée qui tenait très à cœur à Monsieur Ajroudi. Une médina viendra compléter cette vision puisque donc nous allons construire une médina qui répond donc évidemment à toutes les dimensions et toutes les normes de la tradition tunisienne. Voilà. Alors il faut parler de l’écocité […] »
Ces élucubrations parviendront-t-elles à attirer la « clientèle haut de gamme en provenance de l’international », au « profil d’affaires résolument tourné vers l’innovation », dont rêvent ces vendeurs de chimères, afin de créer les 5000 emplois promis ? Rien n’est moins sûr. En outre, il est préoccupant de constater qu’après une bataille juridique de longue haleine mettant en cause les pratiques extrêmes de Ajroudi – menaces, intimidation, acharnement judiciaire et médiatique, ce dernier soit reçu avec les honneurs par les responsables régionaux…
Note
1. « Pour autoriser la construction dans une exploitation agricole, il est stipulé que sa surface ne doit pas être inférieure à un hectare. » Article 2 de l’Arrêté des ministres de l’Agriculture et de l’Equipement et de l’habitat du 31 octobre 1995, fixant les superficies minimales des exploitations agricoles et celles maximales des constructions pouvant y être édifiées.
L’autorité judiciaire rend des décisions qui ne s’imposent qu’aux démunis, ceux qui disposent de moyens financiers ont les moyens d’imposer, soit par la multiplication des procédures de recours et/ou l’influence sur tous pouvoirs exécutifs, leur puissance.
Des affairistes nombreux font régner leur Loi au mépris de toutes lois et règles, comme si rien ne change pendant qu’on se gargarise de changement. La société civile, les gens ont à prendre en charge leurs affaires pour barrer la route aux affairistes et leurs compères au sein des divers pouvoirs. La démocratie ne vit que de l’action citoyenne. Les droits de chacun sont l’affaire de tous.
Longue vie au caroubier qui a survécu aux appétits voraces des bulldozers de la finance.
Manifestement cet article est écrit par ce Bellili une partie prenante de cette affaire en justice et je ne sais pas pourquoi ce site fait état de dossier en cours d’instruction en justice .je ne parlerais du différend qui l’oppose à Ajroudi c’est à la justice de trancher.je veux cependant signaler que pour appuyer sa démarche et montrer que Ajroudi réalise des opérations non conformes au code forestier et qu’il est non sérieux il s’attaque au projet nouveau prévu du côté de Korbous .D’abord Ajroudi en patriote essaie au moins de mettre en exécution ce projet qui peut employer beaucoup de gens de la région .Quant au caractère forestier de la zone je ne sais pourquoi il pose la question il doit savoir qu’aucune réalisation ne sera faite sans l’accord des ministères de l’agriculture et de l’environnement .Alors qu’il laisse les gens (homme d’affaire et gouverneur )essayer de travailler .ce qui m’étonne dans cet article c’est qu’on ose encore parler de Taoufik Baccar “ancien directeur de la BCT de l’ancienne dictature . “Disait l’article on doit savoir que Taoufik baccar était d’abord gouverneur de la BCT un grand gouverneur qui a laissé dans les caisses de l’Etat 5.5 millards de dinars,13 millards de dinars de réserves en devises soit 150 jours d’importation, et un dinar fort des réalisations toutes englouties par la ” démocratie à la tunisienne “.il ne s’est jamais soumis au FMI et avec lui la Tunisie était financièrement souveraine .De plus c’est étonnant que ce Monsieur parle de période de dictature alors que son gendre est un grand ministre de cette période .Mais peut être que sa fille s’est mariée avant le 14 janvier 2011 je n’en dirais pas plus .
Les gens qui ont du fric, pour parler prosaïquement, font ce qu’ils veulent en Tunisie.
On ne convaincra personne en référant à une justice qui se couche face aux affairistes, et l’argument de l’emploi est à manier avec prudence dans un pays où les citoyens sont conduits à la rébellion pour espérer en obtenir.
Convenons que nous sommes bien loin d’avoir rompu avec les pratiques et habitudes de l’ Ancien Temps.
Monsieur Ajroudi est un exemple de ce qu’il faut faire cesser.
votre commentaire semble bien élogieux, aux gens d’affaires et anciens fonctionnaires d’état si on peut nommer l’ancien régime d’état. pour ce qui est de Tawfik Baccar et les réserves de l’état de 5500 millions de dinars comme vous le dites ils ne viennent point de sa poche que je sache et pour un pays dont PIB annuel est de 100 milliard de dinars une réserve accumulée représentant au moins 25% du PIB serait viable d’autant plus que cette réserve était à la discrétion totale de ZABA , revenons aux affairistes que j’encourage à fructifier au mieux leurs affaires si tte fois ils respectent la propriété des autres ( les privés, l’état, l’environnement et les besoins futurs des citoyens) mais la dictature du capitalisme est sans doute la plus dangereuse et inhumaine surtout quand elle est accaparée par des crèves la faim ignorant opportunistes et de loin anti- nationalistes, dont font partie les hommes d’affaires post revolution aux terroristes vendant leurs âmes et leur nation pour l’amour du gain
Un bel exemple de lutte contre la corruption initiée par le gouvernement !
Comment ne pas se sentir interpelé par un article à charge : décidément, les vieilles ficelles du journalisme d’antan fonctionnent toujours…
Alors forcément, ça donne envie : et on essaye de lire sans préjugé, et au début, on ne peut que se féliciter de cette liberté d’expression qu’il faut protéger à tout prix.
Seulement voilà, à force d’en abuser pour contrecarrer des adversaires, on se trahit et l’on trahit la substance même qui rendait cette liberté d’expression si précieuse : quand elle est fondée sur une parfaite et irréprochable honnêteté intellectuelle. Et là, en vous analysant, j’étais plus gêné et mon estime jusqu’ici indemne pour votre blog s’est effondrée. Sachant que, publiant pour la première fois un commentaire dans vos rubriques, je m’avoue choqué qu’il soit préalablement filtré (sans compter avec son caractère anonyme qui me donne envie de rester moi aussi, caché en retour) : prouvant par là que vous vous arrogiez le droit de publication sur autrui, et par conséquent la visibilité des droits de réponse, ce même droit que vous souhaitez qu’on vous accorde sans faille quand il s’agit de vos propres articles. Mais oublions cette incohérence, je vais poursuivre mon propos en espérant que vous aurez suffisamment d’intégrité dans le débat pour me diffuser.
Une remarque toute simple : oui, comme le souligne Olfa “Quant au caractère forestier de la zone je ne sais pourquoi il pose la question il doit savoir qu’aucune réalisation ne sera faite sans l’accord des ministères de l’agriculture et de l’environnement”.
Alors pourquoi tant d’acharnement ?
Cela m’a donné envie d’aller prendre des informations sur ce dossier immobilier au Cap Bon et que vois-je ? – Que l’un des éléments-clés c’est la reforestation prévue, permettant un bilan positif en terme de reboisement… J’ai aussi appris que cette région était littéralement sinistrée : ce n’est pas tout à fait la vision atroce d’un méchant groupe d’entrepreneurs cyniques avec des bulldozers qu’on a l’impression de visualiser en lisant cet article… De fait, le chapitre de votre rédaction “Un éléphant blanc et de nouveaux défrichements en vue” paraît plutôt grotesque et mensonger.
Grotesque, et insultant pour un pays qui tente de sortir du marasme le plus alarmant qui soit.
Alors imaginons un monde dans lequel VOUS triomphiez : les entrepreneurs friqués – si détestables eux et leur arrogante réussite – vont aller investir au Maroc et ailleurs, et les tenants du discours complotiste et victimaire serviront d’exutoire à gogo pour tous les opprimés du chômage endémique que l’on aura privés d’une opportunité durable.
Enfin, et je m’arrêterai là : un support quel qu’il soit n’est pas crédible sur le plan journalistique s’il n’offre aucun droit de réponse en direct aux personnes citées. Je vous demande donc de bien vouloir la preuve que vous avez tenté de joindre les entrepreneurs mis en cause pour leur donner l’opportunité d’une réponse à vos écrits. Car tout semble indiquer que la critique soit facile et confortable quand elle ne s’encombre ni d’aucun droit de réponse, ni d’un débat qui soulagerait tous ceux que cela intéresse vraiment. Allez, un peu de courage, Nawaat – sinon vous allez faire tâche pour tous les prix reçus que vous devez à votre glorieux passé de résistants tut à fait louable. Il vous faut vous réinventer et porter un peu plus haut les couleurs de l’intégrité journalistique, et le faire si possible… dans la durée. Détruire une réputation c’est facile : mais écouter ce que l’autre a à vous dire – c’est là le vrai courage. Et je vous dirai alors qui je suis si tous les masques tombent et que les motivations des auteurs sont elles aussi transparentes.
Merci et très cordialement.