Samedi 27 août, la tente estivale de l’image et de l’expression artistique prend fin et devient officiellement « le Camping international Adnen Meddeb de l’image et l’expression artistique à Hammam El Ghezaz ». Deux jours de projections de films, d’ateliers et de camping artistique ont été mélangés à un deuil hâtivement tombé par la disparition de Adnen Meddeb, l’un des fondateurs du festival. Mort mercredi 24 août, Adnen a été enterré le jour même où l’ouverture de son festival devait se passer. Le lendemain de son enterrement, ses amis et sa famille ont exaucé son dernier souhait et maintenu le festival en hommage à sa mémoire. Une leçon de vie qui donne naissance à un nouveau festival local dans sa dimension et international dans sa vision.

La veille de la cérémonie d’ouverture, prévue pour jeudi, Adnen Meddeb, directeur technique du festival, est décédé des suites d’une crise cardiaque survenue subitement sur la scène même du festival. Il a rendu l’âme mercredi soir à l’hôpital de Kélibia. Choquante et douloureuse, la mort du jeune cinéaste a secoué la scène cinématographique. Des centaines d’artistes, de militants et de cinéastes ont assisté à ses funérailles, jeudi 25 août, dans son village. Plus qu’un enterrement, le rendez-vous était l’occasion de faire un serment à la mémoire de Adnen.

« C’est parce que tu as d’abord été un militant pour une image libre et c’est parce tu as passé tes derniers jours sur ta plage de Hammam El Ghezaz entouré par les tiens à préparer le festival qui te tient tellement à cœur. Et c’est parce que tes derniers instants tu les as passés entre la scène et la régie à préparer l’ouverture du camping. Demain tu prends ton envol Adnen et on reprend ta Tente Estivale, qui sera désormais baptisée Festival Adnene Meddeb pour l’Image et l’Expression Artistique Vendredi 26 et Samedi 27 », écrit Soumaya Boualague, artiste et cinéaste, coordinatrice générale du festival. Le festival s’est effectivement déroulé le vendredi et le samedi avec de légers changements dans sa programmation.

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« Nous avons orienté la tente estivale vers l’hommage que nous avons voulu rendre à Adnen, le père spirituel du festival et l’un de ses fondateurs. Nous n’oublierons jamais ses sacrifices pour le festival. D’ailleurs, son dernier souhait était de faire revivre la tente estivale comme elle a été lancée de 2006 à 2008 », explique Amine Ben Hassine, président du Club cinéma de Hammam Ghezaz, l’un des partenaires locaux du festival. Vendredi, le festival a repris avec la projection des films couronnés au Festival International des Films Amateurs à Kélibia (FIFAK). Le documentaire de Adnen Meddeb « On the road » qui immortalise le sit-in de la Kasbah 1 a été le moment fort de cette journée. Les rappeurs Malek Khemiri et Majdi et la chanteuse Yasmine Essais Mzali ont enchaîné avec un concert de Rap. La clôture a été consacrée principalement à l’exposition des différents ateliers du festival. Le coup d’envoi a été assuré par le ciné-club enfants initié par la Fédération tunisienne des clubs de cinéma. Au grand bonheur des enfants de Hammam El Ghezaz qui ont assisté, assidûment, à tout l’atelier, le ciné-club continuera ses projections durant toute l’année. Les autres ateliers du festival étaient consacrés à la photographie et à l’animation. Sur scène, les jeunes participants ont exposé leurs travaux encadrés par le photographe Cristophe Etienne et l’artiste Nizar Ben Sassi.

Cette année, le festival prend pour thème les droits humains. Dans ce cadre, des films arabes en provenance du festival jordanien « Al Karama » [la dignité] ont été projetés en milieu de la dernière soirée. Les courts métrages arabes étaient suivis par la projection du documentaire « K.R.I », projet de l’association Zanoobya, qui consiste à emmener les enfants dans les zones rurales à l’école avec une charrette. Présenté par Zeyneb Farhat, présidente de l’association et directrice de l’espace El Teatro, le projet s’inscrit dans une « dynamique écologique, de développement durable et des droits de l’homme ».

Les festivaliers avaient droit après la projection à des récitations de poèmes fraîchement écrits à la mémoire de Adnen Meddeb puis à un concert animé par Yasser Jeradi, Halim Youssefi et les deux rappeurs Mado et Zola. L’émotion a atteint son apogée avec les chansons engagées, tant aimées par le défunt. Le Festival du Court au Kef qui s’est déroulé parallèlement à la tente estivale n’a pas manqué de rendre hommage à Adnen à travers une vidéo tournée dans les coulisses du festival.

Solidaires, les festivals culturels et alternatifs se partagent les saisons : le festival du Court au Kef se tiendra, désormais, au printemps. Ceux de Tazarka, de Kelibia et de Hammam El Ghezaz se tiendront l’été. Sans subventions étatiques ni grands budgets, ces festivals locaux parviennent à égayer les communautés assoiffées à l’art et la culture.

« Adnen est vivant ! Il le restera pour toujours en nous et par ce festival qui survivra à toutes les épreuves et illuminera la ville par le cinéma et l’art » promet Marouen Meddeb, président du festival et frère aîné de Adnen avant de conclure « malgré la douleur, le show continue ». Des dizaines de festivaliers approuvent les derniers mots de la clôture. Chacun promet de donner de son mieux à la prochaine édition. Un artiste qui meurt et un festival qui naît.

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