Cette fois-ci, c’est avec le juge Ahmed Soueb que nous avons choisi d’évoquer les problèmes de la Justice tunisienne, de la lutte contre la corruption et, plus généralement, de la bonne gouvernance, aussi bien celle de l’Etat que celle de l’administration de la Justice.

Il est l’un des magistrats Tunisiens les plus médiatiques. Le franc-parler de ce grand commis de l’État est rare. Président de Chambre de cassation au sein de la juridiction administrative, il compte parmi les mieux placés pour stigmatiser les insuffisances de l’appareil judiciaire tunisien.

Première partie…

 

Deuxième partie…

 

Pour accéder à un résumé de l’interview en 6min…

 

Au cours de cette longue interview en deux parties, nous avons abordé de nombreux sujets. Il a été question tour à tour :

– des grands échecs de la justice ;
– des carences de son organisation et du manque de ses moyens ;
– de la justice transitionnelle ;
– du projet de la loi sur la réconciliation économique et financière ;
– de la cohérence des politiques pénales ;
– de la lutte contre la corruption et contre les malversations financières, etc.

L’homme ne fuit ni les questions ni -faut-il dire- la misère d’une justice sinistrée. Sur le plan de la responsabilité collective -la sienne comme celle des acteurs de la société civile-, il assume presque avec panache. Ce panache qui relève de la sévérité d’un franc-parler, n’hésitant pas à mettre en cause -en des termes sans compromis- aussi bien ses pairs que le « leadership politique ».

S’il n’hésite pas à formuler des reproches cinglants adressés à l’Instance Vérité et Dignité (IVD) quant à son obligation de respecter les décisions de justice, il reconnaît volontiers que les difficultés de ladite instance relèvent également du lourd héritage issu des dysfonctionnements de l’appareil judiciaire. Et pour cause, l’IVD, instance composée de 12 membres, se retrouve aujourd’hui empêtrée dans un contentieux de plus de 61 000 dossiers à instruire. Or ces dossiers relèvent aussi du corps de métier de la « justice ordinaire », laquelle a failli à les prendre en charge.

Inversement, et tout aussi cinglant, il évoque les 300 dossiers communiqués à la justice par la Commission nationale d’investigation sur les faits de corruption et de malversation, lesquels dossiers demeurent encore dans les tiroirs des chambres d’instruction.

Quant au projet de la loi sur la réconciliation économique et financière, il a été fait mention du projet du président de la République et celui du Front Populaire. Le juge a évoqué également ses entretiens au palais de Carthage à propos de ce projet.

Lors de cette interview, il a été également question des excès de la détention préventive comme des longs délais portant sur la confiscation des passeports. De même, le magistrat n’a pas hésité à se prononcer sur la cohérence du système normatif tunisien et de ses politiques pénales vagues, voire inexistantes. Et en matière de politique pénales, nous lui avons posé la question suivante :

Comment expliquez-vous à ce jeune, lequel, pour avoir consommé du cannabis (zatla), se retrouve, lui, une année derrière les barreaux (avec toutes les graves conséquences qui en découlent) alors que celui qui est impliqué dans des affaires de corruption, de malversation financières et d’atteinte à l’argent public s’en tire sans grand dommage ?

Nous vous laissons découvrir la réponse au sein de l’interview…

PS : Au sein de la première partie de l’interview, nous avons fait voir à M. Ahmed Soueb une succincte évaluation du fonctionnement de la justice tunisienne par M. Patrice de Charette.

M. de Charette est expert en réforme légale, ancien président de la chambre sociale à la Cour d’appel de Toulouse, ancien juge international au Kosovo et chef de mission de l’assistance technique au Programme d’appui à la justice dans plusieurs pays, dont la Tunisie. L’interview de M. de Charette sera intégralement publiée sur Nawaat dans les jours qui suivent.