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La publicité clandestine gagne du terrain dans les télévisions privées. Il s’agit de la présentation de produits et de services vendus ou fournis par une entreprise commerciale dans un but promotionnel. Dans certains cas, c’est carrément la mise en avant d’une marque en dehors des écrans publicitaires clairement annoncés comme tels aux téléspectateurs. Publicité masquée, placements de produits ou branding à travers les noms des émissions, les formes se diversifient, se généralisent et se banalisent sur les petits écrans tunisiens.
Dès le lancement de ses émissions sportives, Attessia Tv en a abusé. Qu’il s’agisse d’ « Après le match » ou d’« Attessia Foot », le logo d’un opérateur téléphonique privé fait de multiples irruptions dans l’arrière plan. Les mêmes émissions diffusent des spots présentés aux téléspectateurs en tant que compte-rendus, sans préciser leur caractère publicitaire. De son côté, Tounesna Tv se permet d’aller plus loin en donnant à une de ses émissions le nom d’une chaîne de magasins de prêt-à-porter et d’accessoires pour bébé. La même chaîne va jusqu’à proposer des émissions de télé-achat.

El Hiwar Ettounsi multi-récidiviste

Quant à El Hiwar Ettounsi, après plusieurs insertions de publicité clandestine dans des émissions ramadanesques et le talk-show « Labes » durant les années passées, elle a fait un usage excessif de la publicité clandestine dans deux programmes. Il s’agit de l’émission culinaire « Malla Chef » et de « Dari Déco » portée sur la décoration d’intérieur. La première inclut des insertions publicitaires de produits agro-alimentaires. La deuxième plutôt axée sur les fournitures industrielles et sanitaires et autres quincaillerie de bâtiment. La très polémique rubrique du patron de Sigma Conseil, Hassen Zargouni, dans « Al Yawm Athamen » relève du même registre puisqu’il s’agit d’un contenu préparé par une entreprise privée, et non pas par la rédaction de l’émission, dans le but de promouvoir ses services et son image de marque.
Cependant, quelques numéros après le début de la nouvelle saison de l’émission « Malla Chef », El Hiwar Ettounsi a fourni un effort vers un équilibre entre ses besoins lucratifs et le droit du téléspectateur à une distinction entre les programmes et les contenus publicitaires. Un carton signalant que « les produits présentés le sont dans le cadre d’une publicité » a fait son apparition sur l’écran de manière permanente tout au long de l’émission. La chaîne tente ainsi de faire une sorte d’auto-régulation. Toutefois, l’émission fait exploser les quotas publicitaires fixés à 8 minutes par les cahiers des charges.

Le régulateur aux abonnés absents

En multipliant les publicités clandestines, les chaînes privées, signataires des cahiers des charges de la Haute Autorité Indépendante de la Communication Audiovisuelle (HAICA), tombent sous le coup de la loi. Au-delà de son atteinte à la déontologie journalistique à travers la confusion entre les programmes et les espaces promotionnels, la publicité clandestine représente une infraction légale. L’article 50 des cahiers des charges fixant les conditions d’octroi d’une licence de création et d’exploitation d’une chaîne de télévision privée sur le territoire tunisien est assez clair sur la question. « La distinction entre les messages publicitaires et le reste des programmes doit être clairement établie. Il faut annoncer clairement le début et la fin de la pause publicitaire », stipule l’article 50.

Pour l’instant, la HAICA n’est pas intervenue au sujet de la publicité clandestine. Du moins, aucune décision de l’instance de régulation en rapport avec le sujet n’a été rendue publique. Entre temps, la tendance est à la hausse. Et elle ne cesse de se propager dans un paysage audiovisuel contraint à composer avec un marché publicitaire où les vides juridiques provoquent une anarchie dévastatrice.