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Messieurs,

Vous êtes candidats à l’élection présidentielle et vous demandez, pour être élu, le suffrage des Tunisien(ne)s. Les électeurs(trices) vous ont accordé leur confiance lors du premier tour du 23 novembre dernier sans pour autant vous donner la majorité absolue. De ce fait les électeurs(trices) vous ont transmis un message dont vous ne pouvez ignorer la signification.

Aucun de vous deux ne les a suffisamment convaincus et ils attendent d’en savoir plus sur vos projets, votre personnalité et votre capacité à occuper la fonction de Président de la République Tunisienne. Cette sagesse populaire doit vous inciter à beaucoup d’humilité et vous êtes appelés à redoubler d’efforts pour convaincre les tunisien(ne)s au-delà de vos simples partisans et vos électeurs. La Tunisie a besoin, pour cette fonction importante, d’une personnalité qui recueille l’aval du plus grand nombre de citoyen(ne)s.

La Tunisie est certes un petit pays mais qui a une longue et prestigieuse histoire. La société tunisienne s’est enrichie de l’apport successif de nombreuses cultures et de populations venant de différents horizons (amazigh, phéniciens, romains, juifs, arabes, africains, grecs, français,…) sans oublier les différentes tribus et a’arouch qui la composaient. Elle a réussi malgré tout et grâce à ces apports à créer sa propre identité et une communauté homogène. Ces facteurs lui ont permis de résister à toutes les tentatives de division. La Tunisie que nous connaissons aujourd’hui a très tôt, dès 1705, commencé par s’émanciper de l’empire Ottoman. De même au cours du 19ème siècle elle a entrepris d’importantes réformes de l’État et une modernisation de son administration. En 1956, après 75 ans de protectorat, elle s’est libérée du joug du colonialisme et a commencé la reconstruction de l’Etat national, interrompu par la colonisation. Enfin en 2010-11 elle a mis bas à la dictature pour enfin construire un nouveau « vivre ensemble » dans la dignité, la liberté et la justice sociale et la démocratie. Et les élections d’aujourd’hui en sont l’un des prolongements.

Or aujourd’hui, prenant prétexte de la campagne électorale, certains cherchent à en dévoyer le sens, à introduire la fitna et n’hésitent pas, par les discours tendancieux mais aussi par la violence, à alimenter et entretenir artificiellement des conflits entre les régions (le sud contre le nord, les régions de l’intérieur contre ceux du littoral …). Ils prennent là une lourde responsabilité ! La Tunisie doit déjà faire face aux groupes terroristes qui ne lui pardonnent pas d’avoir, contre vents et marais, poursuivie pacifiquement sa transition vers la démocratie. Elle n’avait vraiment pas besoin de ce nouveau « front » de la division. Surtout dans le contexte régional qui est le nôtre.

Vous ne pouvez ignorer ou minimiser la gravité de cette situation. Vous le pouvez d’autant moins que ces fauteurs de troubles, irresponsables, se réclament de l’un ou l’autre des candidats – c.à.d. de vous-mêmes – et des mouvements politiques que vous représentez. D’autant que des responsables politiques connus pour leur appartenance partisane n’hésitent pas à relayer ces messages sur les réseaux sociaux voire même à en envenimer la portée. Dès lors votre responsabilité est pleinement engagée.

Si les paroles et les actes de ces personnes et ces groupes qui entretiennent la violence et fomentent la division et la fitna relèvent des tribunaux, votre responsabilité politique et morale vous obligent à vous démarquer de la manière la plus claire de ces fauteurs de troubles. Vous devez, sans plus attendre, dénoncer et condamner publiquement et solennellement tous ceux qui se sont engagés dans cette voie.

En tant qu’électeur(trice) tunisien(ne) j’attends des candidats au second tour des présidentielles, mais également de tous les partis politiques, une prise de position claire et sans ambiguïté ! Et le plus tôt sera le mieux !