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Moncef-Marzouki-livre-noir

Avec sa sortie bien calculée et pourtant mise sur le compte de l’erreur qu’on serait prompt à rectifier (l’expression Taghout ou Bondieuserie), M. Marzouki a commis, pour le moins, un lapsus bien révélateur de sa psychologie profonde.

C’est celle d’une haine tenace qu’il cultive pour le genre humain qui n’a pas l’heur de se couler dans son propre moule, sa vision manichéenne du Monde.

Ceci un témoignage pour la vérité; la Tunisie en a besoin en ce moment crucial. En effet, j’ai été trompé par M. Moncef Marzouki comme nombre de Tunisiens qui ont porté leurs voix sur son parti lors de la première élection voulue libre dans notre pays.

C’est donc pour les éclairer sur le vrai visage du président provisoire que ne manque d’ailleurs pas de révéler sa campagne électorale où il apparaît sous son vrai jour.

Mon adhésion éclair au CPR

Trompé par le personnage et abusé par son militantisme d’avant la révolution, j’ai adhéré au CPR fin 2012 croyant y retrouver les valeurs pour lesquelles je milite pour ma part, à savoir une Tunisie de l’ordre amoureux (ordo amoris), tolérante et ouverte à l’altérité, où l’islam est oecuménique, démocratique; en un mot postmoderne.

Je crois, en effet, que l’avenir de la Tunisie est dans une assomption de l’islam démocratique en une Tunisie pluraliste et tolérante; c’est ce que j’appelle l’enracinement dynamique.

Certes, j’avais entendu dire que c’était un parti cryptonahdhaoui et j’ai écouté les critiques adressés à M. Marzouki par ses anciens amis. Mais je savais que la politique pouvait être bien trop facilement le lieu idéal de tous les mensonges, et j’ai voulu agir en conscience, ne pas me tromper sur l’homme quitte à me tromper. En effet, je tenais encore l’ancien militant des droits de l’Homme en haute estime et je l’ai gardée le plus longtemps possible jusqu’à la disparition du dernier doute.

J’ai adhéré donc à la section de Paris du CPR et eu à connaître de très près les militants du parti et le président, d’une manière indirecte à travers internet. Et j’ai très vite réalisé l’écart qu’il y avait entre la réalité et la fiction après des tentatives qui ne pouvaient qu’être infructueuses appelant à un retour aux origines mythiques d’un CPR tel qu’il se présentait officiellement. Aussi, avant même la fin de l’année, j’ai quitté ce qui n’était qu’une illusion.

La vérité du CPR

J’y ai découvert et expérimenté que l’on avait affaire non seulement à un appendice du parti islamiste, mais bien pis : une excroissance s’abreuvant dans l’extrémisme le plus radical. Nombre de nouveaux membres déclaraient d’ailleurs avoir hésité entre adhérer au parti Tahrir et au CPR. D’autres justifiaient leur adhésion par le fait que le CPR était le plus intransigeant en termes d’exclusion et de rejet de tout ce qui pouvait rappeler le passé, même indirectement. Et presque tous étaient pour un islam intégriste.

Or, je milite moi aussi pour un islam politique en Tunisie, mais un islam paisible et une politique saine. Et je croyais soutenues par le président mes idées sur la nécessaire abolition de la peine de mort en Tunisie que je justifie même islamiquement, la libéralisation des mœurs, avec l’abrogation des lois interdisant par exemple les rapports homophobes ou le droit à l’apostasie, et toutes les lois liberticides et d’exclusion, supposées à tort islamiques alors qu’elles ne relèvent que d’une tradition judéo-chrétienne infiltrée en islam.

Quand il m’est arrivé dans des conversations directes en ligne avec Moncef Marzouki de lui reprocher son alignement sur le discours de cheikh Ghannouchi, il ne sut me répondre, se contentant de me bannir du cercle de ses amis.

Un homme injuste

Il avait déjà adopté une telle attitude de défiance puis de haine quand je lui ai soumis, du fait de ses attributions diplomatiques, le dossier qui était en cours d’instruction aux Affaires étrangères afin que je retrouve mes droits injustement spoliés par l’ancien régime.

Il faut dire que l’existence de ce dossier me fit hésiter quelque temps avant de me décider à entrer au CPR étant donné que je craignais qu’on fasse le lien entre une telle adhésion et ce dossier. Si j’ai fini par adhérer au CPR fin 2012, c’est longtemps après le dépôt de ma demande, soit près de deux ans (puisqu’elle date de février 2011) et que, manifestement, on pouvait la considérer quasiment enterrée par l’administration toujours aussi injuste que celle de la dictature.

Or, j’ai espéré une attitude plus juste de la part du président ; il n’en fut rien. Je me suis d’ailleurs expliqué de ce dossier sur mon blog ainsi que sur mes motivations véritables. J’y ai expliqué ma conviction que la Tunisie avait besoin que toutes les bonnes volontés s’investissent pour son avenir, surtout celles qui militaient déjà en catimini dans l’antre même du loup.

Comble d’injustice, il s’est bien sûr trouvé quelques-uns parmi ses adorateurs, ceux qui ne savent que médire encouragés par l’attitude de leur chef, pour dire que mon adhésion au CPR entrait dans le cadre de ma démarche personnelle; ce qui était bien évidemment archifaux.

Il tombe sous le sens que si ma démarche était comme ils prétendent intéressés, j’aurais misé sur le parti le plus efficace, choisissant Ennahdha, dont le porte-parole à Paris était Consul général, ou Takattol dont le porte-parole était ambassadeur en France. Ainsi, j’aurais bien pu bien plus facilement intégrer le consulat général ou l’ambassade si ma démarche ne se situait pas sur le plan des principes.

L’illusion CPR

Au sein de ce parti, j’ai parlé et défendu mes idées en vain après avoir été surpris qu’il n’agisse nullement, ne serait-ce que pour l’orientation, en vue de leur triomphe. Même sur la peine de mort dont M. Marzouki faisait une cause première du parti, le CPR se disait partagé et a fini, lors du vote de la question, par faire pencher la balance du côté des tenants au maintien de la peine de mort.

De fait, ma courte présence au CPR m’a convaincu qu’on avait affaire en termes de valeurs face à une illusion, et même à une supercherie. M. Marzouki n’a fait de l’humanisme qu’un moyen efficace pour arriver au pouvoir, pensant conclure une alliance stratégique durable avec Ennahdha, tablant sur son enracinement dans le pays.

Ce qu’il a été incapable de voir malgré son intelligence et ce que je lui ai pourtant dit, c’est qu’Ennahdha ne pouvait qu’évoluer ver l’islam dont se réclamait théoriquement le CPR. Ce dernier possédait, avais-je soutenu, une longueur d’avance qu’il lui importait de concrétiser en s’alliant non pas avec le parti islamiste, mais avec les vrais partis enracinés populairement, comme le Front populaire.

On me répondit que Marzouki ne supportait pas Hamma Hammami et qu’il ne pouvait se désolidariser de Ghannouchi qui était une sorte de second père pour lui. Mais que pouvait faire une illusion ?

À la vérité, Marzouki se voyait un nain auprès de M. Ghannouchi et il chercher à lui plaire, quitte à l’imiter. On l’a vu pour la fameuse cravate quand il a répondu qu’il la mettrait quand le chef d’Ennahdha s’y résoudrait. On l’a vu aussi faire le sale boulot pour Ennahdha aux moments de tensions où le parti islamiste devait adopter un profil bas.

En fait, le CPR se voyait toujours une dépendance d’Ennahdha. Lors d’une réunion avec les adhérents de Paris, l’actuel Secrétaire général, parlant de la stratégie de son parti, fit état de son ambition d’être second après Ennahdha. Quand on lui signifia que l’objectif d’un parti était de viser toujours la première place, il ne sut que répondre. Ce fut pareil quand on enfonça le clou pour lui dire qu’Ennahdha ne faisait que profiter du CPR et que le moment venu il le rejettera.

C’est le cas aujourd’hui. Et on voit que le parti islamiste se révèle bien plus démocrate et laïque que celui qui était censé lui apporter une telle onction.

Faux démocrate et vrai intégriste

Si l’élection présidentielle a aujourd’hui un mérite, c’est moins de doter la Tunisie d’un nouveau président dont l’identité est désormais connue; bien plutôt, c’est de permettre de lever le masque sur le visage de nombre de candidats. Parmi eux, incontestablement, le mieux masqué est M. Marzouki.

Le pire est qu’il s’accommode de cet état ; il est comme un Dorian Gray qui se voit jeune et voit bien sûr son portrait caché l’effet de toutes ses turpitudes. Pour le candidat président, ce portrait est sa propre conscience.

On découvre ainsi son vrai visage à l’occasion de sa compagne, et ce qui était supputé quant à ses accointances avec les intégristes et les adeptes du terrorisme mental est attesté par la parole et l’acte, meilleures preuves que n’importe quel discours.

Il est vrai, M. Marzouki continue à avoir les faveurs de certains; mais ce sont soit ses aficionados, les rares adhérents restés au CPR et qui se comportent comme des membres d’une secte avec leur gourou, soit tous ceux qui réagissent comme lui sentimentalement, assimilant autrui au diable, craignant pour leur propre sécurité bien plus que pour les libertés que leurs idées dogmatiques ne manquent pas de violenter au nom d’une idéologie où il n’est aucune place pour l’altérité.

Si c’est en tant que démocrate que M. Marzouki s’est construit, c’est en vrai intégriste qu’il est en train de défaire à l’emporte-pièce ce qu’il a réussi à faire patiemment, réussissant à occulter un penchant vorace pour le pouvoir digne de celui de ses adversaires, trompant de sincères volontés sur sa morale élastique, ses idéaux frelatés.

Ne manquant pas de ruse, faisant la politique à l’ancienne, M. Marzouki a cru tirer le bon numéro, celui qui lui garantirait à vie une présence à Carthage en scellant ce qu’il appelait une alliance stratégique avec le parti islamiste.

Ce qu’il a oublié, c’est que le chef d’Ennahdha, envers lequel il nourrit à mon avis un véritable complexe d’infériorité, est bien plus matou que lui. Aussi notre président provisoire se retrouve-t-il dépossédé de son supposé bien, ce qui a fait sa fortune, sa prétendue lutte pour un mariage de raison entre l’islam et la modernité, l’enracinement dynamique dont j’ai parlé.

Il n’aura ainsi fait que tirer les marrons du feu pour le parti Ennahdha qui a su s’adapter aux contingences politiques en à la nécessité d’évoluer. Certes, cela se fait encore trop lentement de la part du parti islamiste, mais il a eu la chance d’avoir en face un partenaire de poids et de garder surtout la confiance et le soutien indispensables de l’ami d’Amérique.

Avant le démarrage des campagnes électorales, dans une tentative éperdue, M. Marzouki a bien essayé de redorer son blason chez l’oncle Sam imitant son idole Ghannouchi qui a su avoir et garder ses faveurs; mais c’était en vain; il y était irrémédiablement grillé.

Une haine cultivée de l’altérité

Pour qui connaît bien Marzouki, quitter le palais de la présidence est synonyme non point du retour de l’ancien régime comme il le prétend, la dictature étant définitivement morte et enterrée, mais d’une traversée du désert des périls.

Il est quasiment sûr, en effet, qu’alors le président provisoire de la Tunisie nouvelle ne pourrait plus se réclamer de l’aura qu’il avait de défenseur des valeurs des droits de l’homme. Le terrible crible de son action à la tête de l’État sera là et son portrait à la Dorian Gray attestant que ce qu’il affichait mensongèrement n’était qu’un appel à la conciliation vidé par une action soutenue pour les extrémistes animés par la haine du genre humain.

Pour résumer, M. Marzouki est, au mieux, l’exemple parfait du héros biblique Samson qui se tue à éliminer avec lui ses ennemis ; il est le prototype en politique du garnement qui veut absolument jouer quitter à empêcher tout jeu. Sa campagne électorale n’est qu’une fuite en avant dans l’obsession du candidat président à rester dans le jeu et encore mieux à Carthage. Son slogan inepte de campagne l’atteste au-delà de tout argument supplémentaire : il n’y a pas place à la défaite ; or, ce sont les défaites qui font les véritables victoires !

Au final, on sait d’antique mémoire que la roche tarpéienne est toujours proche du Capitole. À la présidence, M. Marzouki a compris qu’il est devenu un roi nu, une sorte de Castafiore, ce personnage d’Hergé, auteur de Tintin, une reine d’opéra chantant faux, faisant fuir tous les mélomanes.

Aussi, tous les moyens lui étaient-ils bons de continuer à chanter faux, y compris à se désolidariser de son ancien parti en se prétendant être un indépendant, un énième honteux mensonge, pour échapper à sa bérézina attendue, ce parti n’ayant été qu’une illusion.

Il en de même pour le candidat numéro 24 qui ne pèsera que le poids d’une fourmi face à son ennemi juré, un mastodonte de la politique auréolé déjà par le hasard qui fait bien les choses, lui attribuant le numéro 7 sur le bulletin de vote, le chiffre de la chance.