Cicéron l’avait malicieusement souligné : « Il faut se faire des amis dans toutes les catégories sociales », dès qu’il s’agit de campagnes électorales. Cet adage a finalement bien été retenu par le Parti Al Joumhouri.

En organisant, le 09 juillet 2014 à l’hôtel Africa, une conférence sur l’enseignement en Tunisie, Al Joumhouri semble avoir fait sien du conseil du philosophe Romain.

Comme affirmé par un des éléphants du parti :

« Pour Al Joumhouri, les jeunes générations représentent l’avenir du pays. Il faut, sans plus tarder, mettre en place un système au sein duquel ils peuvent sereinement évoluer jusqu’à parvenir sur le marché du travail dans les meilleures conditions, et cela ne peut se faire sans l’expérience de nos universitaires. »

Pourquoi cette lapalissade aujourd’hui ? À demi-mot, il s’agit d’une opération de séduction à visée électoraliste : d’un côté le secteur de l’enseignement souffrant de nombreuses crises et représentant un potentiel « voix » important et, de l’autre, les jeunes avec ou sans diplôme et dont l’avenir est incertain.

Sous l’autorité des cadors du parti, à l’instar d’Ahmed Néjib Chebbi, de son frère Issam Chebbi et de Maya Jeribi, plusieurs professionnels de l’enseignement se sont succédé sur les maux dont souffre ce secteur en Tunisie. Revenant sur les obstacles que rencontre l’enseignement tant au niveau structurel et pédagogique qu’au niveau de son inadéquation au marché du travail, ces chercheurs et professeurs universitaires ont exposé un sombre tableau, que l’on connaissait déjà, mais vis-à-vis duquel les solutions tardent à venir.

Du reste, aucun d’entre eux ne s’aventurera à proposer des solutions répondant aux carences tunisiennes, ni une quelconque réforme à envisager. Seule une représentante de l’ambassade de Finlande en Tunisie viendra exposer la grande réussite de l’exemple finlandais et dont la Tunisie pourrait s’inspirer.

Alors pourquoi une telle conférence au slogan « l’enseignement en Tunisie : états des lieux et horizons. », sans représentants des ministères concernés, sans représentants des élèves et étudiants, sans représentants du marché du travail !? Ont-ils été invités ? Nous ne l’avons pas su.

Dommage par ailleurs que les principales questions posées à l’issue des interventions des orateurs étaient hors sujet. Lesdites questions se sont concentrées sur les conditions des élections et principalement sur la question du report de celles-ci, tel que proposé par Beji Caid Essebssi.

Il est regrettable, en effet, de relever que ce qui fut retenu par l’ensemble des médias a totalement ignoré les questions liées à l’enseignement, tout comme les besoins urgents en matière de réformes. Ainsi, nous n’en saurons rien à propos de ce que propose Al Joumhouri pour résoudre les carences, pourtant signalées depuis un certain temps déjà. Et il est d’autant plus regrettable de relever que l’aspect spectaculaire des joutes politiques prime, dans les médias, sur des questions aussi essentielles que celles portant sur l’enseignement.
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Si, effectivement, Al Joumhouri ne choisit pas les questions que posent les journalistes, il aurait pu, tout au moins, présenter en cette période de pré-campagne ses propositions en la matière.
Inversement, que Al Joumhouri n’ait rien proposé, il est dommage que les médias n’aient pas su le faire remarquer aux orateurs de la conférence.

A ce jour, nous avons eu droit dans nombre de médias que ce qui s’est passé “en marge de la conférence [sic !]”.

Dans cette connivence entre les contorsions des politiques et la quête du spectaculaire par les médias, déclarations de « choc » et scoops politiques se substituent à la finalité qui est censée être celle de toute campagne électorale, en l’occurrence l’exposé des programmes.

Ainsi, tels des moulins qui s’échangent du vent, mass media et partis politiques desservent le citoyen qui en sort perdant… et, quelque part, non sans la complicité de ce dernier.