Un sauvetage qui pourrait tourner au désastre : près de 300 boat-people sauvés en mer par des pêcheurs tunisiens et la garde nationale tunisienne sont enfermés illégalement et pourraient être refoulés par les autorités tunisiennes vers la Libye.

Les 17 et 18 août, deux embarcations ont été secourues au large de la Tunisie. La première s’était ensablée devant Kerkennah avec 240 personnes à bord, la seconde se trouvait au large de Ben Guerdane, avec 46 personnes. Partis de Libye, ces boat-people de différentes nationalités tentaient de fuir les conditions catastrophiques et les violations dont sont victimes les étrangers dans le chaos libyen actuel.

Parmi les 240 personnes du premier bateau, 47 Tunisiens ne sont plus à la charge de la garde nationale, mais les 193 exilés d’autres nationalités ont été transportés dès le lendemain en bus en direction de la frontière libyenne. Suite à l’intervention de plusieurs organisations dont le Croissant Rouge, le FTDES et le Haut commissariat des Nations unies pour les réfugiés (UNHCR), ils ont été conduits dans un foyer à Medenine (au sud de la Tunisie) où ils sont maintenus sous surveillance policière.

Les 46 autres personnes du second bateau, dont douze femmes, ont été détenues pendant 48 heures à Ben Guerdane avant d’être transférées elles aussi à Medenine dans un entrepôt gardé par la police. Pourtant, aucune loi ne prévoit ni n’encadre en Tunisie l’enfermement administratif des étrangers pour entrée ou séjour irrégulier.

Tous ces exilés, parmi lesquels se trouvent des personnes ayant transité par le camp de Choucha, à la frontière tuniso-libyenne, sont aujourd’hui privés de liberté. Avec la crainte d’être refoulés en Libye, puis vraisemblablement enfermés dans des camps de rétention où se perpétuent de graves violations des droits humains.

Les refoulements vers la Libye doivent cesser :

  • La liberté des migrants et des réfugiés est menacée dans la Libye aujourd’hui. Or, l’article 33 de la Convention de Genève sur les réfugiés interdit tout refoulement et toute expulsion d’une personne « sur les frontières des territoires où sa vie ou sa liberté serait menacée en raison de sa race, de sa religion, de sa nationalité, de son appartenance à un certain groupe social ou de ses opinions politiques ».
  • De nombreux rapports internationaux dénoncent les traitements inhumains et dégradants ainsi que des attitudes xénophobes, les enfermements arbitraires, les violences et les travaux forcés dont sont victimes les étrangers en Libye, travailleurs migrants ou demandeurs d’asile.

Malgré la présence de programmes d’intégration locale et la promesse de titres de séjour, les réfugiés qui se trouvent en Tunisie rencontrent de grandes difficultés à vivre dignement et beaucoup décident de prendre la mer pour un mieux-être ailleurs.

En conséquence, les organisations signataires lancent un appel urgent.

Aux autorités tunisiennes :

  • Pour la libération de l’ensemble des personnes étrangères détenues en Tunisie dans des lieux d’enfermement illégaux et par le biais de procédures extrajudiciaires.
  • Pour empêcher tout refoulement vers la Libye.

Aux Etats membres de l’Union européenne :

  • Pour qu’ils acceptent enfin d’offrir des places de réinstallation aux personnes reconnues réfugiées en Tunisie compte-tenu de l’échec des politiques d’intégration et des engagements du gouvernement tunisien en termes de titres de séjour.

Communiqué de presse – FTDES / La Cimade – 23 août 2013