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Par Farhat OTHMAN

Je livre ici une réflexion qui va heurter le conformisme ambiant, mais qui n’est pas moins véridique : l’islamisme fondamentaliste n’a rien d’islamique, il est une pure création judéo-chrétienne ! Qu’on se le dise donc : le salafisme de nos rues relève de la tradition judéo-chrétienne qu’il perpétue en islam; il veut ancrer en notre belle religion ce qui heurte son esprit même de foi universaliste, ouverte à l’altérité et absolument tolérante dans son humanisme de grand format.

L’islamisme authentique, soit le retour aux sources véritables de l’islam, à savoir le Coran et la Sunna avérée, n’a rien d’intégriste ni de xénophobe; l’islam étant par essence ouvert à l’autre, emportant une dimension de respect de l’altérité incomparable dans les autres Écritures monothéistes.

Ce que nous voyons aujourd’hui de dévergondage de l’esprit islamique authentique est le fruit des menées judaïques et chrétiennes qui n’ont eu de cesse d’importer l’idiosyncrasie judéo-chrétienne en islam, et ce directement ou indirectement, consciemment ou inconsciemment, par l’intermédiaire de juifs de chrétiens, mais aussi de purs musulmans comme on le voit de nos jours.

Il en est ainsi de l’image que donnent nos fondamentalistes d’une religion intolérante et haineuse, alors que l’islam est à la base amour et tolérance comme l’ont bien compris nos soufis, seuls véritables tenants de la tradition musulmane authentique. C’est pour cela que j’ai affirmé dans nombre de mes articles que sont aujourd’hui les seuls vrais salafis ceux que le pape du salafisme classique, Ibn Taymiya, a appelés Soufis de la Vérité.

En islam originel, Allah est d’abord amour et pardon, alors que nos intégristes en font une déité haineuse du genre humain, vindicative et sanguinaire. Et c’est le Dieu de la Bible qu’ils adorent ainsi, non pas celui de l’islam !

En notre religion, tous les versets où apparaît le moindre bellicisme — dicté par la progressivité de l’islam et la mentalité de l’époque — sont aussitôt contrebalancés par d’autres versets appelant à l’expiation et promettant le pardon et la rémission. C’est que l’islam en tant que sceau des prophéties a repris les anciennes révélations, les corrigeant, en magnifiant l’humanisme et en approfondissant la spiritualité.

Ceux qui s’arrêtent aux versets ne faisant que reprendre la tradition juive et chrétienne, telle que rappelée par l’islam, violent et la lettre et surtout l’esprit de notre religion. Ils font régresser l’islam vers les révélations antérieures, caricaturant son message d’amour et de paix, l’islam étant d’abord et avant tout — comme le précise sa déclinaison arabe — paix et soumission exclusive à Dieu, seul habilité à punir ou à pardonner en toute liberté. Et c’est ce qui fait son absoluité, fondement éminent de notre foi.

On se rappelle qu’en tant que sceau de la prophétie, notre prophète a tout fait, dès l’avènement de l’islam, pour rallier sous sa bannière les adeptes des autres révélations abrahamiques, la source du message islamique étant la même que la leur, notre religion se voulant un retour à la tradition véritable d’Abraham.

Or, sa main tendue fut rejetée et il fut combattu comme une hérésie. Et lorsqu’il s’est imposé, envers et contre tous, grâce surtout à sa vision humaniste et ses principes magnifiant la condition de l’Homme en tant que créature éminemment libre et raisonnable de Dieu, les menées contre pareil esprit révolutionnaire pour l’époque continuèrent de l’intérieur même de l’islam.

Cela commença assez tôt, durant la vie du prophète avec nombre d’hypocrites, souvent d’anciens juifs convertis, venus en islam avec leur mentalité et leurs traditions. Et cela continua de plus belle lors de la première grande fracture de l’islam à la faveur de la rivalité entre les Omeyyades et le quatrième calife Majeur. Ainsi vit-on de prétendus musulmans chiites atteindre sans hésitation au blasphème absolu en élevant le gendre du prophète au rang d’une déité !

Dans la tradition islamique, on appelle pareil travail, de ce qui n’a été qu’une cinquième colonne en islam, des Israilyet, soit des influences judaïques. Et cela a touché tous les domaines de la vie et de la morale en islam, marquant d’une empreinte indélébile l’exégèse du Coran et l’interprétation de la Sunna avérée. Cela amena aussi à la falsification de nombre de hadiths mis à la sauce juive et chrétienne. Ainsi en a-t-on vu qui sont venus contrarier la lettre explicite du coran, comme en matière de lapidation pour l’adultère, qui est une pure tradition juive, pour l’homosexualité, qui n’est nullement interdite en islam, ou encore pour l’entrave à la liberté de la croyance que le Coran consacre de la plus belle façon, ou de l’apostasie qu’il ignore par respect de la liberté sacrée de la croyance reconnue à l’homme.

Aujourd’hui, au nom d’un islam caricaturé et violé, nos salafis ne combattent que sous les couleurs judéo-chrétiennes; ils continuent un combat ininterrompu depuis des siècles, celui d’une révélation que l’islam est venu corriger et qui se refuse à se laisser faire. Ayant échoué de l’extérieur, cette cinquième colonne manipule consciemment ou inconsciemment les musulmans pour les détourner de leur religion vraie, les amenant à en violer sinon le texte, du moins l’esprit avéré et authentifié.

Il est temps que tous ceux qui parlent au nom de l’islam sachent quel tort ils font à leur religion; il suffit qu’ils voient à quel point leurs menées de haine et de violence réjouissent les ennemis de l’islam pour se rendre compte qu’ils en sont les complices non seulement objectifs, mais surtout actifs.

Le salafisme de nos rues d’aujourd’hui, mais aussi l’islam prétendument modéré qui continue à jeter l’anathème sur les formes de la liberté et de la démocratie que l’humanité reconnaît pour légitimes aujourd’hui, ne sont pas de vrais musulmans ! Car si on ne croit pas au message de paix de l’islam et à son appel à la tolérance sans la moindre restriction, on relève d’une foi certes abrahamique, mais en aucune façon telle qu’elle a été corrigée par la religion du sceau des prophètes.

Actuellement, en Tunisie, on assiste à une bataille décisive pour l’avenir de l’islam : ou l’islam vrai et pur, l’islam de paix et de la tolérance et des droits de l’Homme, l’emporte et il est alors véritablement le fait religieux par excellence de notre époque postmoderne, sceau de toutes les révélations monothéistes. Ou il se laisse entraîner par ses ennemis, tous ceux qui agissent en son nom pour en travestir le message et le transformer en un message de destruction physique et morale et d’abjection, comme on voit le faire les prétendus tenants de la tradition. Alors, il ne sera qu’une version de la tradition judéo-chrétienne réhabilitée; car les musulmans n’ayant que les propos de haine et les mains des bourreaux ne sont que les tenants d’une pareille tradition. Or, rejetée par les religions juives et chrétiennes d’aujourd’hui, elle fait de la résistance et ses adeptes intégristes, juifs, chrétiens et musulmans, n’ont de cesse, comme avant, de combattre l’islam vrai, refusant son humanisme universaliste.

Osons donc le dire et le répéter le plus solennellement du monde : le salafisme de nos rues, ce fondamentalisme islamique saugrenu, n’est qu’une création judéo-chrétienne dans sa forme antédiluvienne, rejetée désormais par les siens ! Et que tous ceux qui en doutent reviennent au Coran et relisent la Sunna avérée du prophète ! Mais, au fait, combien parmi les zélateurs de cet islam fantoche ont vraiment lu le coran et les deux Sahihs ainsi que les incunables d’herméneutique y relatifs ? Peu assurément; et ce sont ceux qui crient le plus fort qui connaissent le moins l’islam, et le Coran surtout, source véritable et éminente de notre belle religion à laquelle il nous faut revenir au plus tôt et sans a priori.

Mohamed Talbi, dont je ne partage pas toutes les vues, a eu une expression judicieuse à ce propos, assurant qu’il se veut être un musulman coranique, au sens qu’il s’en tient à la lettre et à l’esprit du Coran lorsqu’il est en présence d’un hadith qui les contredirait, du fait des ravages de l’idiosyncrasie judéo-chrétienne en islam dans ce que j’appelle la tradition musulmane consignée dans le fiqh. En cela, il a parfaitement raison, et on doit s’atteler à bâtir une nouvelle tradition fidèle à l’esprit du Coran, un fiqh de notre temps que je qualifierais de tradition islamique pour le distinguer de la tradition frelatée sur laquelle nous vivons et qui n’est plus adaptée à notre temps.

Mettons-nous donc au travail, faisons comme nous le demande notre religion en nous attelant à la réforme continue de la pratique et de l’interprétation de notre foi afin qu’elle garde son cachet inimitable, celui d’une religion toujours révolutionnaire, en symbiose avec les réalités de son temps. Ce n’est rien de moins que le vrai Jihad, le Grand Jihad tel que l’islam y appelle. Le reste n’est que de l’agitation qui nuit à l’islam. Agissons plutôt en faisant travailler nos méninges à la lumière de l’esprit de notre religion et de ses visées sublimes ! Ainsi et ainsi seulement sera-t-on véritablement musulmans.