Une vingtaine d’anciens militaires ont commencé aujourd’hui 1er avril 2013 un sit-in près de la Place du gouvernement à la Casbah de Tunis. Leurs revendications : être rétablis dans leurs fonctions après avoir été révoqués, d’après eux, pour des considérations politiques sous le régime Ben Ali et surtout être écoutés.

Nous étions à la Place du gouvernement pour en savoir plus quand M. Mohamed Ben Romdhane, vice-président de l’association « Droits des militaires révoqués » surgit en annonçant que Noureddine Bhiri, ministre délégué chargé des Affaires politiques à la Présidence du gouvernement, va les rencontrer. Le nombre de militaires qui seraient lésés dépasse les 1500 personnes d’après M. Noureddine Khairat, président de l’association.

“Nous voulons être écoutés !”

Nous avons subi une injustice, nous sommes plus de 1500 militaires révoqués mais le nombre peut atteindre les 2500 personnes. Le ministère de la Défense connait le chiffre exact et a toutes les archives.

Les attentes de ces hommes, qui se sont déplacés de plusieurs villes de la Tunisie, sont encore persistantes, ” nous demandons notre droit à la vie ” affirme Rabi Charni, un sergent dans l’armée de terre qui a travaillé de 1998 à 2006. M. Charni a entendu à la télévision nationale, en 2011, une annonce où le ministère de la Défense appelait les anciens militaires à déposer leurs dossiers pour être réintégrés. ” Nous avons quitté nos petits travaux, sauf que lorsqu’ils ont eu ce qu’ils voulaient, ils nous ont lâchés ! ” nous confie avec rage M. Charni.

Pour ces ex-militaires, la justice sociale tarde encore à venir mais ce qui est encore plus frustrant c’est le fait que leurs demandes de rencontrer des responsables sont toujours restées sans réponse.

Depuis le 14 Janvier 2011, nous avons contacté le ministère de la Défense, d’une manière individuelle et en groupes, mais personne n’a voulu nous répondre, ne serait-ce que par écrit. Pareil pour la Présidence du gouvernement. Quant au ministère des Droits de l’Homme et de la Justice transitionnelle, le ministre Samir Dilou nous a passé son conseiller Tarek Rezgui. Ce dernier nous a promis une réunion avec le ministre de la Défense. Il n’y a rien eu de cela, en plus, M. Rezgui ne veut même plus décrocher le téléphone.

Nous avons contacté à notre tour le ministère des Droits de l’Homme et de la Justice transitionnelle pour connaître l’avis de M. Rezgui mais nous avons été tout simplement face à un téléphone qui sonne, sans réponse. Le service public, celui du ministère ne serait pas disponible à 16 heures de l’après-midi.

Certains des ex-militaires que nous avons interrogés affirment avoir été révoqués dans les années 90, notamment Noureddine Khairat. M. Khairat a travaillé à la marine militaire de 1983 à 1990. D’après lui, sa révocation est due à son appartenance politique (islamiste d’Ennahdha).

Ce sont les agents de police qui ont passé l’information au BRS, Bureau de Renseignements sécuritaires de l’armée, pour que je sois révoqué. Nous tous ici avons subi une double injustice, sans raison valable : la première sous le régime de Ben Ali, et la seconde après le 14 Janvier et jusqu’à aujourd’hui.

L’autre tort qu’avaient subi ces hommes seraient aussi le ” contrôle administratif “. Pour M. Mohamed Ben Romdhane “le ministère de l’Intérieur n’a pas été coopératif. Quant à l’ex-ministre de la Justice, Noureddine Bhiri, il a informé les ex-militaires que leurs dossiers ont été transférés au ministère de la Justice.

Sans profession fixe, certains sont chômeurs, d’autres font des travaux diverses, du commerce, de la maçonnerie… pour survivre. Entre temps, les institutions publiques tels que les gouvernorats et les délégations sont loin d’être à l’écoute.

Le chargé de l’Information du ministère de la Défense n’a pas d’information

Nous avons donc contacté le ministère de la Défense aux numéros indiqués sur le site officiel des ministères tunisiens et nous avons pu joindre M. Rachid Bouhoula, chargé de l’information au ministère. Ils nous a informé qu’il n’a pas de réponse et nous a demandé de rappeler 15 minutes plus tard, le temps de voir avec une commission qui aurait été chargée de ce dossier. Nous rappelons mais encore une fois M. Bouhoula nous redemande de rappeler pour cause d’indisponibilité. Nous demandons s’il y a au moins une personne qui pourrait nous répondre. En vain.

Pourquoi l’administration ne daigne pas répondre à ces ex-militaires, qu’ils aient le droit ou pas, à réintégrer le domaine militaire ? Pourquoi les ministères concernés et contactés par ces hommes ne veulent pas répondre ? L’administration n’est-elle pas au service du citoyen ?