La France est “le pays qui comprend le moins l’islam et les Tunisiens”, et ces derniers se sont sentis “insultés” par les propos du ministre de l’Intérieur Manuel Valls évoquant “un fascime islamique”, a déclaré le chef du parti islamiste tunisien Ennahda. (c) Afp

Au lendemain de la nomination d’un nouveau Premier ministre en Tunisie, Rached Ghannouchi, président, a donné son avis au Journal du Dimanche :

La France est “le pays qui comprend le moins l’islam et les Tunisiens”, et ces derniers se sont sentis “insultés” par les propos du ministre de l’Intérieur Manuel Valls évoquant “un fascime islamique“, a déclaré le chef du parti Ennahda.

La relation entre la Tunisie et la France est complexe. La France est un pays si proche de nous. Malgré cela, la France est le pays qui comprend le moins l’islam et les Tunisiens“, a déclaré Rached Ghannouchi dans un entretien au Journal du Dimanche.

Au lendemain de l’assassinat de l’opposant Chokri Belaïd, tué par balles le 6 février à Tunis, M. Valls avait mis en garde contre la montée d’un “fascisme islamique” dans les pays du Printemps arabe, Libye, Tunisie et Egypte.

Ennahda, les Frères musulmans, Al-Qaïda: Manuel Valls a mis tout le monde dans le même sac et, ce faisant, a montré qu’il ne comprenait rien à l’islam. À l’inverse, les Allemands, les Britanniques, les Américains y parviennent et savent que l’islam n’est pas uniforme et comporte des radicaux, des modérés, et que nous sommes à la tête des composantes modérées“, a déclaré M. Ghannouchi.

Oui, nous nous sentons insultés. Il suffit de se promener pour constater que la mosquée est ouverte, que les bars et les plages sont ouverts“, a-t-il ajouté.

Sur les déclarations faites au journal Le Monde, par La veuve de Chokri Belaïd accusant Ennahda et le gouvernement d’être politiquement responsables de la mort de mon mari, Rached Ghannouchi a répondu :

Au départ, elle et ses amis ont dit que Ghannouchi avait donné l’ordre de le tuer et qu’Ennahda avait planifié l’assassinat. C’est lorsque nous avons menacé de les poursuivre en justice qu’ils ont parlé de “responsabilité politique”. Cette femme a perdu son mari et s’exprime de la sorte, je le comprends, mais Ennahda considère que l’assassinat de Belaïd est un crime affreux et a appelé à une journée de deuil national. ­Ennahda n’a aucun intérêt à installer le désordre en Tunisie. J’attends de voir la réaction de ceux qui nous accusent quand les vrais coupables seront démasqués, ce qui ne devrait plus être qu’une question de jours si l’on en croit le ministère de l’Intérieur.

Le soutien français au régime mourant de Zine El Abidine Ben Ali début 2011 a laissé une certaine rancoeur en Tunisie, et les propos de M. Valls avaient suscité l’indignation des partisans d’Ennahda, illustrée par le slogan “France dégage” lors de dernières manifestations pro-islamistes.

M. Ghannouchi a par ailleurs estimé que :

le nouveau chef de gouvernement est un militant connu pour sa modération et ses bonnes relations avec toutes les composantes de la classe politique. Je pense que la Tunisie est entrée depuis vendredi dans une nouvelle ère pour la réalisation des objectifs de la révolution.

Je pense que la Tunisie est entrée depuis vendredi dans une nouvelle ère pour la réalisation des objectifs de la révolution“, a-t-il assuré.

Nous prévoyons pour cette année la rédaction d’une nouvelle loi électorale, d’une nouvelle Constitution, l’élection d’une nouvelle Assemblée, d’un nouveau président. Il se peut que les élections se tiennent à l’automne prochain“, a-t-il dit.

Les tractations se poursuivent pour la composition d’un nouveau gouvernement en Tunisie, enlisée dans une grave crise politique et sociale, aggravée par l’assassinat de Chokri Belaïd. Le ministre de l’Intérieur Ali Larayedh, islamiste modéré, a été désigné vendredi après la démission d’Hamadi Jebali, dont la proposition de former un gouvernement de technocrates indépendants avait été rejetée par son propre parti Ennahda.

La vie politique est quasi-paralysée depuis des mois faute de consensus à l’Assemblée nationale constituante sur la future Constitution, en cours de rédaction depuis 16 mois.

Afp/nawaat.org