Place du gouvernement à Tunis, Premier ministère entouré de fils de fer barbelé et d'un rempart en métal. 14 janvier 2013 Crédit Photo Lilia Weslaty |Nawaat
Place du gouvernement à Tunis, Premier ministère entouré de fils de fer barbelé et d’un rempart en métal. 14 janvier 2013 Crédit Photo Lilia Weslaty |Nawaat

Pour la énième fois, le remaniement ministériel prévu récemment pour le 14 de ce mois, date anniversaire de la Révolution tunisienne, a été reporté au 20 janvier prochain. Subissant la pression de ses alliés CPR et Ettakatol au sein de la Troïka, Ennahdha cherche de tous les côtés à élargir la coalition au pouvoir, sans résultat.

Ministères de la Justice et des Affaires étrangères, ministères concernés par le remaniement ministériel
Les deux partis de la Troika, CPR et Ettakatol, ne cessent de presser leur allié Ennahdha, à procéder au plus tôt à un remaniement ministériel. En effet, après l’assemblée nationale du CPR qui a eu lieu le 10 novembre 2012, son bureau politique a lancé un ultimatum.

“On retirera notre confiance du ministre de la Justice si l’instance provisoire de l’ordre judiciaire n’est pas mise en place” dixit son SG Mohamed Abbou.

Le 13 janvier 2013, Imed Daimi, membre du bureau politique du CPR, a réaffirmé à la veille du 14 janvier, date annoncée pour l’annonce du remaniement, dans une déclaration sur la radio Mosaïque FM, que son parti insiste pour un changement au niveau de quelques ministères régaliens. Procédant par élimination et sachant que ceux de l’Intérieur et de la Défense ne sont pas concernés, on peut en induire, notamment grâce aux récurrentes déclarations de son parti, que ce sont les ministères des Affaires Étrangères et de la justice qui sont l’objet du remaniement suspendu par Ennahdha.

Quant à Ettakatol, troisième allié d’Ennahdha au sein de la Troïka, beaucoup plus discret, a quand même exigé un remaniement, notamment le 22 décembre dernier. En effet, son porte-parole Mohamed Bennour a exhorté le Chef du gouvernement Hamadi Jebali (Ennahdha) à l’annoncer dans un délai ne dépassant pas les 15 jours, chose qui n’a visiblement pas été prise en compte par son partenaire politique.

Des blocs parlementaires et des partis politiques refusent de rejoindre la coalition au pouvoir
Les blocs parlementaires, Wafa et Dignité et le parti Al Jomhouri, ont tous fini par refuser de rejoindre la coalition au pouvoir.

  • Le bloc parlementaire Wafa
  • Du côté du bloc Wafa, le 19 décembre dernier, Slim Boukhdhir, a déclaré que son parti a reçu “une offre officielle” pour rejoindre la coalition au pouvoir. Le lendemain, le parti a fini par la refuser, jugeant la demande protocolaire ne touchant pas le fond des choses.
    Ayant été pressenti comme nouveau ministre de la Justice, Abderraouf Ayadi (SG du parti Wafa) n’aurait accepté ce poste, selon Nacer Brahmi (membre du parti Wafa) que si le programme de réforme proposé par Wafa est intégré, chose qui aurait été visiblement refusée.

  • Liberté et Dignité
  • Quant au bloc parlementaire Liberté et Dignité, dont le Président n’est autre que le député d’obédience islamiste Nejb Hosni, sa réponse à Ennahdha fut la même.
    Selon le député Abderrazak Khallouli,

    “La Troïka cherche de nouveaux alliés avant les prochaines élections, sauf qu’avec sa position dominante, ce partenariat avec elle ne pourra être que superficiel sans prendre en considération notre programme.”

  • Le groupe démocratique
  • Le 5 janvier 2012, le député Mehdi Ben Gharbia a déclaré publiquement que le bloc démocratique à l’Assemblée Constituante, dont plusieurs élus sont également aux partis politiques Al Jomhouri et Al Massar, n’est pas intéressé par le remaniement ministériel qui sera annoncé dans les jours qui viennent. Cependant, le 9 janvier, Mahmoud Baroudi, a déclaré sur sa page facebook, après entretien avec le parti Ennahdha :

    “N’attendez pas que l’Alliance démocratique fasse partie du nouveau gouvernement parce qu’elle ne veut pas être dans un gouvernement qui privilégie les intérêts partisans sur les intérêts nationaux.”

    Malgré ces déclarations, les pourparlers continuent avec Ennahdha du côté de ce qu’on appelle “Alliance (tahalof) démocratique”, allié de Al Massar et Al Jomhouri. En effet les deux députés Moncef Cheikh Rouhou et Moahemd Hamdi seraient pressentis aux postes de Ministre de développement régional et de la planification et ministre de l’Education. Une réunion aura lieu aujourd’hui, 16 janvier pour en discuter.

    Selon le député Mehdi Ben Gharbia, les promesses du Chef du gouvernement pour un changement politique où les décisions proviendraient de lui et non du chef d’Ennahdha Rached Ghannouchi, sont encourageantes. Les points qui devront être abordés avec Ennahdha concerneraient les instances de l’Ordre judiciaire et de la Haica (médias).

    Quand aux exigences, elles seront ciblées sur la justice à deux vitesses qui ne cesse de sévir sur les “petits en épargnant les grands”. Le poste du ministre des Affaires Etrangères, qu’occupe actuellement Rafik Abdeselem, gendre de Ghannouchi, reste quand même l’objet prioritaire pour un changement imminent.

  • Le Front Populaire
  • Par ailleurs, le Front Populaire(FP), dont le leader est Hamma Hamami, n’a pas été contacté par Ennahdha pour une quelconque coalition. Selon Abdenacer Laouini, membre du bureau politique du FP, son parti n’est pas du tout concerné par le remaniement et ne chercherait même pas à avoir un contact avec le parti islamiste.

  • L’Appel de la Tunisie (Nidaa Tounes)
  • Selon un communiqué datant du 14 décembre dernier, le parti Nidaa Tounes, dont le chef n’est autre que l’ex-Premier ministre Béji Caid Essebsi, le remaniement doit être axé au niveau du nombre et de la compétence des ministres. D’après Abdel Hamid Jelassi, vice-président d’Ennahdha, aucune approche n’a été effectuée auprès de Nidaa Tounes vu les divergences persistantes au niveau politique.

    Le remaniement ministériel, un dilemme pour Ennahdha
    Il semblerait, à tous points de vue, que le parti Ennahdha serait dans une position d’isolement, fasse à la pression de ses deux partenaires au sein de la Troïka, CPR et Ennahdha. Son recours vers d’autres partis pour élargir la coalition au gouvernement est présenté par ses leaders comme un signe d’ouverture. Néanmoins, refusant les conditions de ses alliés, le parti islamiste cherche ailleurs, par le biais d’autres négociations toujours en cours avec certains des partis et blocs parlementaires sus-mentionnés en vu de trouver une solution avant la date du 20 janvier fixée pour l’annonce du remaniement ministériel.

    Mise à jour >>
    Fathi Ayari, président du Conseil de la Choura a déclaré le 17 janvier sur la radio Shems FM que le remaniement ministériel sera annoncé le 22 janvier.

    Mercredi 23 janvier 2013
    Abdelatif Abid (ministre d’Ettakatol) va être remplacé par Mohamed Goumani, porte parole de l’Alliance démocratique. L’annonce n’a pas été encore officialisée.
    Procédant à sa manière et refusant l’avis de son allié Ettakatol pour le remaniement ministériel, le chef du Gouvernement Hamadi Jebali a fait recours à Mohamed Goumani, porte-parole de l’Alliance démocratique pour lui proposer le porte-feuille de ministre de l’Éducation. M. Goumani, professeur au lycée Fouchana, a finit par accepter.

    Vendredi 25 janvier 2013
    “Le Chef du Gouvernement M. Hamadi Jebali donnera demain le Samedi 26 Janvier 2013 à Dar Dhiafa à Carthage à 14.30h une déclaration à la presse sur les résultats des consultations avec les partis politiques concernant le remaniement ministériel.”

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