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VIII- Sous le régime du président déchu Ben Ali, Béji Caïd Essebsi adhère rapidement en 1988, au parti de Ben Ali en tant que membre du Comité Central du “Rassemblement Constitutionnel Démocratique” (R.C.D.), en étant élu député et désigné Président de l’Assemblée Nationale…

Le président Ben Ali qui est militaire de carrière au grade de général a adhéré tardivement au P.S.D. durant les années 80, Il a été introduit au P.S.D par Hédi Baccouche qui d’ailleurs a participé le 7 novembre 1987 à la destitution de Bourguiba, conjointement avec Kamel Eltaïef, Mohamed Chokri, le Général Habib Ammar et le Général Abdel.Hamid Bescheikh

Le régime de Ben Ali et son parti politique le “R.C.D”. ne doivent pas se confondre avec le parti le “P.S.D” de Bourguiba.

L’année 1988 a connu une certaine ouverture politique notamment à des anciens destouriens de Bourguiba et des opposants du M.D.S. Cependant, cette ouverture politique a pris fin rapidement après les élections présidentielles et législatives du 2 avril 1989 lorsque Ben Ali a commencé sa purge à l’encontre de tous les éléments opposés à sa politique, notamment les islamistes, les partis politiques de gauche, les avocats défendant les droits de l’homme, et les anciens bourguibistes et anciens destouriens, notamment les amis de Mohamed Mzali, etc.

Il faut rappeler que le président déchu Ben Ali et Béji Caïd Essebsi se connaissait depuis les années 60 et ont travaillé ensemble lorsque du 7 novembre 1969 au 12 juin 1970, Béji Caïd Essebsi a été nommé Ministre d’Etat, délégué auprès du Premier Ministre Bahi Ladgham, chargé de la défense. Durant cette période, Ben Ali qui était au grade militaire de Commandant, occupait le poste de Directeur de la Sécurité militaire placé sous les ordres de Béji Caïd Essebsi et de Bahi Ladgham.

Dès l’arrivée de Ben Ali, le 7 novembre 1987, certains Ministres de Ben Ali comme Hédi Baccouche, Hamed Karoui, Abderrahim Zouari, Abdelaziz Ben Dhia et Chedly Neffati ont participé activement à mettre fin au parti du P.S.D. de Bourguiba pour donner naissance le 27 février 1988 à un nouveau parti baptisé le “Rassemblement Constitutionnel Démocratique” (R.C.D. ) .

Lors de la première réunion du Congrès du R.C.D baptisé le Congrès du Salut qui s’est tenue du 29 au 31 juillet 1988, Béji Caïd Essebsi a été désigné par Ben Ali comme membre de ce comité central R.C.D pour 5 ans. D’ailleurs sur les 200 membres de ce Comité Central du R.C.D, 122 membres ont été désignés directement par Ben Ali.

De même, Béji Caïd Essebsi a été membre du Comité central du R.C.D lors des élections du Comité Central en 1993 et en 1998 qui ont lieu respectivement du 29 juillet 1993 au 1er août 1993 réunissant le 2ème Congrès du R.C.D., baptisé le Congrès de la persévérance et du 30 juillet 1998 au 2 août 1998 , réunissant le 3ème Congrès du R.C.D, baptisé le Congrès de l’Excellence.

De même, lors des élections législatives du 2 avril 1989, Béji Caïd Essebsi a été élu député d’appartenance R.C.D., à la Chambre des Députés, dans la criconscription de Tunis pour une durée de cinq ans expirant le 20 mars1994. Et pourtant ces élections législatives ont été largement truquées en faveur du R.C.D., mettant Béji Caïd Essebsi en contradiction avec ses déclarations en faveur du respect des urnes et de la démocratie. En effet, ces élections du 2 avril 1989 combinaient à la fois l’élection présidentielle et législatives. Les résultats de ces élections ont été sans doute en faveur d’un plébiscite du président Ben Ali qui a été proclamé élu à 99,27 % des suffrages exprimés, en remportant sans opposition le mandat présidentiel de 5 ans.Tandis que les résultats des élections législatives qui se sont déroulées en même temps que les présidentielles ont fait apparaître la victoire du parti de Ben Ali le “R.C.D.” qui a raflé la totalité des 140 sièges de la Chambre des Députés. Les partis politiques d’opposition, notamment le M.D.S. d’Ahmed Mestiri, le P.U.P., le R.S.P., l’U.D.U. et les listes indépendantes des islamistes n’ont obtenu aucun siège. Et pourtant, lors de ces élections législatives, les islamistes ont obtenu entre 13 et 16,7 % des voix exprimés. Ce qui a poussé l’ensemble de l’opposition à crier au trucage des urnes.

En plus de son mandat de député acquis grâce au trucage des élections du 2 avril 1989, Béji Caïd Essebsi a été désigné par Ben Ali comme Président de la Chambre des Députés, fonction qui a débuté le 14 mars 1990 et qui s’est achevée le 9 octobre 1991. Comme il a été souligné supra, la totalité des 141 sièges formant la Chambre des Députés issus des élections législatives du 2 avril 1989 sont d’appartenance du parti de Ben Ali, le R.C.D. L’opposition n’a obtenu aucun siège. Et pourtant, Béji Caïd Essebsi qui prétendait défendre le multipartisme a quand même accepté de présider une Chambre des Députés monocolore intégralement à dominante R.C.D, ne comportant aucun siège issu de l’opposition…!

A ce sujet, dans un entretien paru dans l’hebdomadaire tunisien “Réalités” portant sur la semaine allant du 27 septembre 1991 au 3 octobre 1991, réalisé par Moncef Mahroug, Béji Caïd Essebsi qui était à l’époque, le Président de l’Assemblée Nationale sous la Présidence de Ben Ali avait déclaré qu’il s’accommodait très bien de l’état monocolore de l’Assemblée dominée intégralement par le R.C.D et que les élections législatives de 1989 étaient issues des urnes d’une manière démocratique , tout en faisant l’éloge de Ben Ali et de son régime marqué par la date du 7 novembre de la manière suivante :

J’ai alors affirmé que personnellement cela ne me gênait pas d’être à la tête d’une chambre monocolore dans la mesure où c’est en raison d’une volonté populaire, où c’est le verdict des urnes…. Mais comme je suis légaliste, j’accepte le verdict des urnes. Et à ce titre, j’estime que notre Assemblée a été légalement et légitimement élue…

D’ailleurs, à l’usage, nous avons remarqué que le fait que tous les députés appartiennent au R.C.D. ,ne les a pas empêchés d’user de leur franc parler… Je dois à la vérité et à l’honnêteté de dire, que depuis que le choix démocratique a été fait et annoncé par le Chef d’Etat (Ben Ali) dans son adresse au peuple le 7 novembre 1987, un long chemin a été parcouru, jalonné de réformes dans des domaines les plus variés

Mais la présidence de la Chambre des Députés par Béji Caïd Essebsi n’a pas duré logntemps puisque Ben Ali a mis fin à sa fonction le 3 octobre 1991. Les raisons du limogeage de Béji Caïd Essebsi de la présidence de la Chambre des Députés n’ont pas été précisées, ne sachant pas si c’est pour mettre fin aux ambitions de Béji Caïd Essebsi visant la Présidence ou est-ce pour mettre fin aux déclarations politiques intempestives de Béji Caïd Essebsi ?

Dans un article intitulé : “La révolution, ce n’est pas la démocratie“, paru à la revue “Jeune Afrique en date du 12 avril 2011, Béji Caïd Essebsi a eu un entretien avec le journaliste Marwane Ben Yahmed dans lequel il s’expliquait sur son limogeage de la présidence de la Chambre des Députés en date du 3 octobre 1991, en déclarant que :

J’avais accepté, un peu malgré moi, mais j’assume, la présidence de la Chambre des députés. J’ai souhaité alors instiller une certaine ouverture, en laissant les députés s’exprimer et voter librement. Nous ne risquions pas grand-chose, d’ailleurs, puisqu’ils étaient tous destouriens. On parlait alors du Printemps de Tunis. Il n’aura duré qu’une saison… C’est alors que l’on m’a proposé de quitter l’Assemblée pour la présidence du Conseil constitutionnel. J’ai répondu que je ne cherchais pas du travail, que s’ils voulaient ma place, ils pouvaient la prendre. Et je suis parti

Ces explications n’apportent guère de conviction. Toujours est-il que le président déchu Ben Ali a mis fin à la fonction de Béji Caïd Essebsi en tant que Président de la Chambre des Députés puisque selon ses dires, il lui a proposé la Présidence du Conseil Constitutionnel…