Par Ahmed Ben Mustapha

Suite à l’article de Nizar Bahloul du 4/07/2011 intitulé « que cherche à cacher le ministère des affaires étrangères » ou je suis à nouveau mis en cause ainsi que mon épouse, je vous prie de publier les éléments de réponse suivantes :

L’affaire ayant été définitivement tranchée par le jugement de non lieu prononcé en ma faveur le 21/02/2011, j’invite les lecteurs à se reporter à ma réponse publiée sur le blog Nawaat qui reprend l’essentiel de ce jugement lequel invalide toutes les allégations à nouveau reprises par Nizar Bahloul dans une vaine tentative de détourner l’attention de son propre procès pour diffamation qui a débuté le 6/07/2011.

Par respect pour la justice qui m’a innocenté et pour les lecteurs de Businessnews qui se sont intéressés à ce dossier, je n’ai donc pas l’intention de me laisser entrainer dans une nouvelle fausse polémique sur une affaire dérisoire définitivement classée d’autant plus que l’article en question ne comporte aucun nouvel élément justifiant un nouveau débat ou de nouvelles clarifications. Au contraire, j’ai le pénible sentiment qu’il s’agit d’une réaction de dépit de l’auteur qui n’ayant pas apprécié ou digéré son assignation en justice, essaie de me provoquer et de dévier le débat de l’essentiel en ayant recours à l’amalgame et la désinformation. En revanche, il élude complètement les vrais enjeux de cette affaire ainsi que les nouveaux développements consécutifs au jugement de non lieu en dépit de leur importance. C’est pourquoi je suis contraint de les reprendre en détail car ils en constituent les prolongements indissociables et incontournables.

Il importe en effet de souligner que cette affaire a été initiée par Abdelwaheb Abdallah sur instructions présidentielles après mon refus de céder aux pressions exercées sur moi pour me contraindre à démissionner et le dossier a été ensuite piloté de bout en bout par la présidence de la république ce qui m’a été confirmé par des sources sures ayant été associées à la gestion administrative et judiciaire de l’affaire à toutes les étapes de la procédure. Ainsi toutes sortes de pressions et de manipulations ont été exercées au plus haut niveau afin de faire obstruction à la justice alors que les preuves de mon innocence, émanant de la cour des comptes, avaient abouti en décembre 2009 à l’annulation par la cour de cassation des actes d’inculpation de la chambre d’accusation. A ce stade le dossier aurait du être classé mais encore une fois l’intervention de la présidence a empêché l’application de la loi qui a été contournée afin de permettre ma condamnation par défaut . Mais après la révolution la justice enfin libérée de toutes les entraves a confirmé mon innocence sur la base du même dossier et des mêmes éléments de preuve. J’ajoute pour la symbolique de l’événement que la cour qui m’a innocenté est celle la même qui a ensuite condamné le président déchu et son épouse à de lourdes peines de prison.

Une fois mon innocence établie par un jugement définitif, la loi me confère le droit de demander des comptes aux personnes qui m’ont injustement accusé ou diffamé. J’ai donc décidé de porter plainte contre toutes les parties responsables de ce que je considère comme étant une grave injustice ayant causé des dommages considérables à ma carrière de diplomate et à ma famille sans compter les graves préjudices consécutifs à la campagne de diffamation orchestrée contre moi par le régime déchu. Mais mon but n’est pas autant de punir ces parties et de leur demander des comptes que de dénoncer et de mettre à nu les pratiques mafieuses de l’ancien régime dans ce genre d’affaires montées de toutes pièces ou il n’hésite pas à recourir à la manipulation des institutions, des médias et leur instrumentalisation au bénéfice de la famille royale.

C’est pourquoi deux plaintes judiciaires ont été déposées dont l’une à l’encontre de Abdelwaheb Abdallah, Jalila Trabelsi ainsi que certains anciens responsables et agents administratifs du ministère des affaires étrangères impliqués avant la révolution dans les multiples manipulations et irrégularités commises durant toutes les phases de la procédure judiciaire. Après mon audition et au vu des preuves présentées une enquête a été ouverte à l’encontre des suspects étant signalé que les faits qui leur sont reprochés tournent essentiellement autour de l’abus de pouvoir, les faux témoignages, les allégations mensongères et la dénonciation calomnieuse.

Il importe de souligner que j’ai également déposé une plainte auprès de l’inspection générale du ministère de la justice ou je mets en cause, preuves à l’appui ,certains des juges qui se sont compromis dans cette affaire en faisant obstruction à l’application de la loi ouvrant ainsi la voie à mon jugement par défaut alors que le dossier aurait du être classé au niveau de l’instruction sur la base de la décision de la cour de cassation sus mentionnée qui m’a innocenté .Dans le cadre du suivi de cette plainte ,je viens d’apprendre que les juges concernés auraient été aussi mis en cause par d’autres justiciables également lésés par leurs agissements. Par ailleurs j’ai entrepris une démarche auprès de la commission d’investigations sur la corruption afin de recueillir le témoignage d’ anciens hauts responsables également concernés par la gestion administrative de ce dossier dont certains ont été contraints de se conformer contre leur volonté à des directives émanant de la présidence alors que leurs prérogatives et la loi leurs conféraient la possibilité de mettre un terme à cette injustice.

Quant à la seconde plainte judiciaire, elle a été déposée depuis plus d’une année après les articles de Nizar Bahloul que j’ai estimés diffamatoires. Conformément à là loi, cette plainte est demeurée pendante jusqu’au verdict du tribunal qui m’a innocenté lequel a permis de la réactiver. Je demande donc à Nizar Bahloul de laisser la justice suivre son cours en toute sérénité et de couvrir cette actualité au même titre que la procédure engagée à mon encontre. Cela relève de l’honnêteté intellectuelle et de la déontologie journalistique qui lui imposent de rendre compte de tous les aspects de ce dossier indépendamment de ses sentiments personnels qui visiblement ne penchent pas du coté de la justice. En tout état de cause, le ministère public a estimé que les faits qui lui sont reprochés sont suffisamment graves pour justifier des poursuites judiciaires à son encontre et il ne sert à rien de tenter de faire diversion en me calomniant et en cherchant une fausse querelle au ministère des affaires étrangères et à la justice. Si mes plaintes avaient été jugées infondées, elles auraient été classées sans suite mais la réaction outragée de Nizar Bahloul et le contenu calomnieux et provocateur de son article ne font que confirmer le bien fondé de son assignation en justice, d’autant plus qu’il assume pleinement la responsabilité de se écrits en affirmant qu’il n’a reçu aucun ordre de quelque partie que ce soit pour relater cette affaire.

En effet, après le jugement de non lieu prononcé en ma faveur, ni lui ni personne n’est autorisé à évoquer l’affaire dans les mêmes termes comme si elle n’avait pas été tranchée par la justice car cela revient à mettre en doute l’intégrité des juges qui ont examiné ce dossier durant cinq années avant de conclure à mon innocence. Il faut qu’il sache que je ne lui permettrai pas de s’ériger en pseudo justicier dans cette affaire en continuant de mettre en doute mon intégrité sur la base de prétextes aussi grotesques, absurdes que fantaisistes. Où est l’intérêt de cette série de futilités et de contrevérités évoquées sous forme d’absurdités ou la banalité du propos le dispute à l’insignifiance du contenu ? s’il cherchait réellement la vérité, il n’aurait pas ignoré le jugement de non lieu ses retombées et ses implications judiciaires qui constituent désormais la vraie actualité et l’unique référence juridique dans cette affaire.

De même il n’aurait pas occulté les raisons véritables des poursuites engagées contre moi qui ont été vérifiées et authentifiées par la commission de lutte contre la corruption avant d’être adoptées comme preuves à charge par la justice dans les poursuites pour corruption et malversations engagées contre Abdelwaheb Abdallah et la famille royale. En effet, l’incident avec Jalila Trabelsi n’était en réalité qu’un épisode ayant permis de lever le voile sur tout un dispositif de détournements, trafic de devises et transferts massifs et illicites de capitaux pour le compte du régime déchu et ses prolongements familiaux. J’ai d’ailleurs été auditionné ainsi que mon conseiller d’ambassade par le doyen des juges d’instruction en tant que témoins à charge contre Jalila Trabelsi et Abdelwaheb Abdallah dans cette affaire. Il s’agissait pour eux de faire couvrir par l’ambassade une opération de transfert illicite de plus de 500 milles Euros en espèces, ce qui démontre que le régime déchu avait dévié la diplomatie de ses fonctions principales en contraignant certains postes diplomatiques à se mobiliser au service de la famille présidentielle au détriment des intérêts supérieurs de la Tunisie . C’est donc Nizar Bahloul qui cherche à cacher ces vérités essentielles et à détourner l’attention des poursuites engagées contre lui n’hésitant pas à recourir à la désinformation et à la calomnie en ressassant des futilités dérisoires définitivement réglées par la justice. Mais les réactions des lecteurs prouvent qu’ils ne sont pas dupes et qu’il n’est pas aisé de dévier leur attention des questions essentielles et des vrais défis auxquels sont confrontés la Tunisie et les Tunisiens en cette étape historique et décisive de leur histoire.

Il convient d’ailleurs de rappeler que Nizar Bahloul avait reconnu m’avoir porté préjudice et a de ce fait retiré de ses archives ses écrits calomnieux initiaux concédant ainsi de leur non fondé .Il m’a même fait parvenir un message à travers son avocat laissant entendre qu’il était disposé à présenter ses excuses en échange du retrait de ma plainte. Mais préalablement il m’avait menacé de remettre en ligne ses articles diffamatoires et de relancer la polémique et c’est ce qu’il a fait en publiant cet article à la veille de son procès. Il confirme ainsi que dans cette affaire son but n’a jamais été la recherche de la vérité mais la quête du sensationnel au mépris de l’information objective. Mais ayant été démenti par les faits et par la justice il refuse de se rendre à l’évidence, de reconnaitre ses erreurs et d’en tirer les conclusions qui s’imposent. Au contraire il mène désormais en solitaire un combat d’arrière garde perdu d’avance contre la vérité et contre la justice sous forme de campagne médiatique dirigée à mon encontre. S’il souhaitait réellement connaitre la vérité il n’avait qu’à se reporter au jugement de non lieu et aux pièces du dossier qui sont maintenant du domaine public. Mais le plus grave est que son attitude semble émaner d’un sentiment de rancœur mal contenu à mon égard pour l’avoir dénoncé et trainé en justice .De même il a du mal à cacher ses vifs ressentiments à l’égard du ministère et de l’institution judiciaire pour l’avoir désavoué et traduit en justice après m’avoir innocenté et réhabilité.

Quant aux remarques déplacées de Bahloul au sujet de ma réhabilitation et mes prétendus liens avec l’ancien président il s’agit de provocations et d’absurdités qui ne méritent pas de réponse. Elles confirment cependant son parti pris et l’absence d’objectivité qui ont caractérisé son attitude dès le départ. Elles démontrent également qu’il est à court d’arguments de même qu’il a perdu son sang froid et tout sens de la mesure dans cette affaire. D’ailleurs cela lui a valu de sérieuses critiques de la part d’innombrables lecteurs qui n’ont pas manqué de rappeler son soutien sans faille à l’ancien président à tel point que son journal est considéré au nombre des outils manipulés par la machine de propagande orchestrée par Abdelwaheb Abdallah pour le compte de la dictature agonisante de ben Ali. Et même après la révolution il revendique le droit de défendre ben Ali et déplore l’existence de « nouvelles lignes rouges » qui l’empêcheraient de continuer à chanter la gloire du dictateur déchu. S’agissant enfin de la fameuse lettre adressée par Bahloul au ministère des affaires étrangères et au premier ministère elle aura au moins eu le mérite de lui faire mesurer son isolement et son degré de crédibilité auprès des lecteurs et des responsables qui ont décidé de l’ignorer et de ne lui accorder aucune importance.

En conclusion, j’espère que Bahloul tirera les enseignements qui s’imposent de cette campagne de dénigrement dérisoire qui en définitive l’a beaucoup desservi et entaché davantage sa crédibilité plus qu’elle ne m’a porté préjudice auprès de l’opinion publique.

Ahmed Ben Mustapha