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Par Fayçal Bouzayen chemmami (Cinéaste),

Je crois qu’après cette révolution, l’histoire de la Tunisie est de nouveau en marche. La modernité de sa société est sur le bon chemin et le changement ne peut être que réel.

Le peuple a payé un lourd tribut de sang pour reprendre son indépendance. Plus rien ne sera comme avant.

Ceci ne peut se faire pleinement et durablement que si ce pays décide de voir qu’un homme sur deux, au moins, est une femme, de reconnaitre qu’une large proportion des hommes a tendance d’oublier cette moitié et qu’il est temps de ne plus considérer le masculin comme une donnée universelle.

Malheureusement les femmes en Tunisie ne sont pas assez sincères, elles n’occupent pas tous les espaces de la vie quotidienne, elles acceptent de laisser un large, encore très large espace social à l’homme pour croire à un changement concret dans leur vie quotidienne et la notre.

Comment faire évoluer : les esprits étroits, passifs, rétrogrades et qui trouvent leur repos dans l’emprisonnement de la femme dans un statut de mère uniquement.

Pour ne plus accepter tout retour en arrière, la femme doit se débarrasser de l’attitude frileuse que peut avoir une mère.

La femme est l’avenir de l’homme dans ce monde, soit, mais le monde de ce dernier est dangereux pour la femme, non pas a cause de sa virilité mais plutôt parce que la femme a tendance de le regarder agir et le laisser faire.

Parce que je suis un homme je crois fermement que la réelle autonomie de l’homme passe par la véritable autonomie de la femme ? Il ne peut y avoir de libération véritable sans la libération des deux.

Il est urgent pour l’homme et surtout pour la femme de se rendre compte que la femme est au-dessus du niveau de la mère ; le choix d’être mère ou pas n’est pas une donnée indéboulonnable du statut de la femme.

La femme doit nous faire accepter de force s’il le faut qu’elle a droit au plaisir, droit à un enfant si elle le veut et que son corps lui appartient même en tant qu’épouse.

Il est temps pour la tunisienne de se prendre en charge, d’assumer sa liberté, de la surveiller avec ardeur et de se méfier même du paternalisme des militants hommes, comme moi.

A la femme de dire tout haut : «NE ME LIBERE PAS JE M’EN CHARGE». Bourguiba a fait la moitié du chemin, à elles maintenant de tracer l’autre moitié en réveillant la conscience des femmes passives, populaires, bourgeoises, ouvrières ou intellos.

Sexualité, travail, création et occupation des lieux sociaux et publics (rue, foyer…) tout est organisé par la hiérarchie culturelle des sexes.

Il est temps de mouiller la chemisette, de se battre, de ne rien lâcher, de mobiliser la junte féminine, de descendre et redescendre dans la rue, de braver les dangers, de s’opposer au rétrogrades et même aux raisonnables car il nous faut trouver une autre raison pour gérer l’être humain.

Il ne faut pas être comme la femme algérienne qui a participé à la conquête de l’indépendance en donnant son sang, sa vie, en assumant les atrocités des interrogatoires, en bravant les barrages et même en rédigeant ce qu’il faut d’écrits pour bouter le colonisateur dehors.

En fin de route elle se retrouve avec presque rien, derrière un homme qui n’arrive pas à avancer ni à faire avancer le chmelblique parce qu’il lui manque une force motrice celle de la femme.

Il faut aller chercher auprès de cette femme qui a su combattre l’occupant, qui a gagné en épaisseur, ramasser l’expérience, aiguiser l’intelligence, pourquoi et comment elle s’est laissée piéger et tomber dans un ordre « museleur» de la culture identitaire.

Il est vrai qu’aujourd’hui on n’incruste plus dans le subconscient de la femme tunisienne des messages formulés comme des ordres, tels que : « fais ceci ou cela et tais toi ! » mais plutôt : « Tu es libre de faire ce que tu veux mais pour être mieux considérée tu dois être comme ceci et faire comme cela ! » Tout ceci est mijoté dans la même sauce qui impose à la femme une façon de vivre libre tout en étant dans la norme.

Balivernes ! On ne joue plus sur les interdictions mais sur la faculté de rejoindre librement la culture masculine, comme par exemple de se voir couvrir la tête ou de suivre le conseil de ne pas fréquenter certains lieux réservés aux hommes, sous prétexte que la dignité culturelle l’impose à la liberté féminine.

Quelqu’un a dit : une cause bien défendue est une cause juste.

Il est juste de voir la femme à tous les postes de la république, à tous les métiers, à tous les espaces populaires ou snobinards… Sachez mes amis(es) que ce que l’on pense relever du domaine privé est en réalité influencé par notre culture et notre système politique.

En somme, deux pas en avant, un pas en arrière ! Voilà, l’avance consommée en matière de liberté pour les femmes. Il y a une avancée dans ce pays me direz-vous ? peut être, mais parfois l’avance n’est qu’illusoire tant les freins mis par le pouvoir du sacré par exemple peuvent annihiler, briser, réduire à néant, effacer, neutraliser complètement les vœux contenus dans une déclaration devenue désuète ou dans les quelques mots d’un homme politique ou pas, soit disant bien veillant!