Boris Boillon
Les ambassadeurs sont nommés par le Président de la République sur proposition du ministre des affaires étrangères lors d’un conseil ministériel . Officiellement en ce qui concerne M. Boris Boillon ,c’est Michèle Alliot-Marie qui l’a choisi et Nicolas Sarkozy n’a trouvé rien à redire sur ce choix .

Il est écrit dans le premier article du récent Décret de nomination de M. Boris Boillon ,en date du 09 février 2011, publié le 10 du même mois au journal officiel ,qu’en tant que «Conseiller des affaires étrangères, ambassadeur extraordinaire et plénipotentiaire de la République française auprès de la République d’Iraq », il est nommé « Ambassadeur extraordinaire et plénipotentiaire de la République française auprès de la Tunisie ».

Je vous vois venir ,je vous interromps tout de suite.

Vous allez penser que ,parce qu’il est ambassadeur extraordinaire que lors du déjeuner auquel il a convié les journalistes jeudi 17 février dernier à la Marsa ,il n’avait pas eu une tenue classique et ordinaire avec ses convives pour un ambassadeur ! Pas du tout ! Ambassadeur extraordinaire ,c’est son titre et c’est sa fonction.

Ceci dit ,il est vrai qu’il a quitté la table précipitamment et en colère laissant la journaliste médusée ,sans comprendre ce qu’elle venait de toucher en point sensible chez lui ,à travers sa question . C’est tout de même extraordinaire !

En français la question à l’origine du drame , se résume en ceci : ” Quelles sont vos appréhensions “مخاوف” en tant que nouveau ambassadeur en Tunisie ?

Logiquement ,c’est une question à deux sous . Elle ne devrait même faire froncer un sourcil pour un ambassadeur . Détrompez vous ! Elle a suscité de l’émotion et de l’énervement chez le nouveau ambassadeur. Ses hôtes ne croyaient pas leurs yeux à le voir se lever de table “outragé” comme il l’était par la question .Pourtant, d’après l’enregistrement fait par Mozaïques FM , je ne crois avoir décelé un malin soupçon de bizoutage organisé en douce pour le nouveau arrivant.

Comme si la question l’avait piqué là où il ne fallait pas .Il a bondi de son siège en se précipitant vers la sortie tout en laissant derrière lui une traînée de mots :«Qu’est ce que c’est makhaouf ! …khalas ! …c’est lamentable ! ….c’est nul ! … »

Ce fût l’incident qui a fait clore la séance avec les journalistes et il n’était pas le seul pendant la rencontre . Plusieurs fois les journalistes l’ont interrogé aussi bien sur mission que sur sa supérieure hiérarchique Madame MAM . Il répondait soit à la manière de Sarkozy qui d’ordinaire répond aux journalistes à la manière du Général de Gaulle : « Vous croyez que je vais …. » ou en lançant « C’est lamentable ! C’est débile comme question ! ». Les journalistes tunisiens n’en revenaient pas . Il les a laissé par terre. KO !

Quelque chose d’Imed Trabelsi dans l’air . Une espèce d’arrogance .Bref ,tout ce qui a provoqué la révolution tunisienne. La haine de la rue à l’encontre du m’as-tu vu ? et me voilà ! et regardes ma rolex ! et qu’il est beau mon 4/4.! Et “attention je vais me fâcher si vous êtes pas gentils avec moi !” Bref , tout à fait la maîtresse d’école du primaire devant ses petits ,le premier jour de la rentrée scolaire.

Sérieusement ,le Ministère des affaires étrangères compte-il un jour essayer de comprendre le pourquoi du comment il y a eu une révolution en Tunisie ? L’opposition en France ,jusqu’à quand va-t-elle laisser la diplomatie française faire des ravages sans intervenir ?

Il est bon pour la circonstance de se souvenir de ce que c’est qu’un ambassadeur . C’est le seul lot de consolation que pouvaient espérer les journalistes ,bon public. Comme une punition . Comme s’ils n’avaient qu’à mettre au courant l’ancien ambassadeur de ce qui se tramait le 14 janvier dernier,s’ils ne voulaient d’un nouveau vengeur . Comme s’ils étaient responsables du départ de l’ancien ambassadeur .Il aurait été encore là à déguster avec eux le pot de l’amitié en fêtant la révolution ,s’ils avaient su comment se conduire .

Un ambassadeur , est une sorte d’extension de la fonction de préfet sauf qu’il agit hors des frontières géographiques de la France . Il est le représentant de premier rang dans la hiérarchie des fonctionnaires de la France dans le pays de son affectation . Il a deux oreilles : Une qui entend et écoute ce qui se passe dans le pays où il se trouve , et la seconde enregistre et note les consignes que lui transmet son gouvernement de tutelle ,en premier lieu ,celles de son ministre des affaires Étrangères. Dans l’état où elle est MAM avec ses relations avec la Tunisie , je ne la vois pas prodiguer des directives au jeune ambassadeur . Elle pourrait l’énerver . Elle a tout intérêt à se montrer diplomate si elle compte lui demander quelque chose . Les pincettes sont requises .Il faut pas qu’elle oublie qu’il a été formé à la dure ,qu’il était en Irak et là bas ,ça rigole pas .

Pour certain ambassadeurs, la matière grise qui se situe entre les deux oreilles est un trésor intarissable , car elle ne sert pas à retenir “des éléments de langages” ,à la hâte par des jeunes loups, des hommes pressés mais plutôt à produire un certain art : On l’appelle l’art du langage .

Etre ambassadeur est un art de vivre avec et parmi les gens . D’abord il faut aimer les gens et pas les craindre ,quelles que soient les circonstances . Chez certains ambassadeurs ,il est presque inné de trouver la réponse adaptée et de circonstance, sans sourciller ,sans montrer un signe d’irritation ni d’agacement lorsqu’ils se trouvent même devant des journalistes zélés voire à la limite de l’indélicatesse et de l’incorrection. Ils parviennent à trouver la réponse adéquate à toutes les questions auxquelles ils sont conviés à y répondre sans se fâcher et surtout sans montrer un signe de déstabilisation. Leurs interlocuteurs savourent pendant des heures en étant admiratifs de la finesse et de la pertinence dans la réponse qu’ils venaient d’obtenir. Certaines remarques ou réponses d’ambassadeurs nécessitent un écrin pour les garder. La majorité des ambassadeurs aurait kiffé la rencontre avec la jeune et belle journaliste qui a si tant mis le nouveau ambassadeur de France hors de lui. Quel gâchis ! Quel manque de tact ! Où est l’humilité ?

Rappelons nous la prise d’otage à Lima en 1996. 369 personnes étaient retenues en otage dans la résidence de l’ambassadeur du Japon, lors de la célébration de l’anniversaire de l’empereur Akihito. Les ambassadeurs et autres personnalités présentes dans l’ambassade, vers la fin de la prise d’otage, étaient en forme avec un mental d’acier contrairement aux preneurs d’otages qui étaient malades et éprouvés. Les ambassadeurs et les invités de l’ambassade étaient venus en aide aux otages alors qu’ils avaient la possibilité de s’enfuir. C’est depuis cette date qu’est née l’expression “ le syndrome de Lima ». Et c’est depuis cette date que le monde entier a appris ce que c’est que d’être un ambassadeur.