Les neveux de Ben Ali seront-ils jugés un jour ? Jacky Naeygelen/Reuters

En mai 2006, le Beru Ma, un immense yacht d’une valeur d’un million d’euros, disparaît du port de Bonifacio, en Corse. Quelques jours plus tard, il est retrouvé, en pleine opération de maquillage, à Sidi Bou-Saïd, en Tunisie.

Si l’enquête a été si rapide, c’est que son propriétaire n’est autre que Bruno Roger, associé-gérant de la banque Lazard, ami de Jacques Chirac et Nicolas Sarkozy. Après deux interventions de l’Elysée et de l’Intérieur, le yacht lui a été rendu.

Très vite, il apparaît que les coupables comptent d’autres vols de yachts à leur palmarès. Le Blue Dolphin IV et le Sando, disparus de la Côte d’Azur en 2005 et 2006, sont retrouvés sous une fausse immatriculation en Tunisie.

Or les commanditaires de ce trafic de bateaux de luxe, Imad et Moez, répondent tous deux au célèbre nom de Trabelsi. Ce sont les neveux de la très controversée épouse du président Ben Ali, Leïla.

Deux mandats d’arrêt internationaux sans suite

En dépit de nombreuses convocations de la justice française, les deux frères ne daignent pas répondre. En mai 2007, le juge Jean-Bastien Risso lance contre les neveux de Ben Ali deux mandats d’arrêt internationaux qui n’aboutissent pas.

Le juge d’Ajaccio a fini par se rendre lui-même en Tunisie pour entendre Imed et Moaz Trabelsi. Tous deux ont nié toute responsabilité dans ce trafic de yachts mais ont été mis en examen le 16 mai 2008 par un magistrat tunisien pour « complicité de vol en bande organisée » dans le cadre de la commission rogatoire internationale française.

Imad et Moez Trabesli seront-ils jugés un jour ?

Le JDD révèle ce dimanche que les deux frères sont renvoyés en correctionnelle en France aux côtés de neuf autres accusés pour « vol en bande organisée », « escroquerie en bande organisée » et « faux et usage de faux ». Ils risquent jusqu’à quinze ans de prison. A condition d’être jugés un jour.

Selon le JDD, les frères Trablesi ne seront en effet pas cités à comparaître par le parquet mais devraient être jugés « dans un délai raisonnable » en Tunisie.

Antoine Sollacaro, l’avocat d’un des neuf autres accusés, s’est insurgé contre ce traitement de faveur et estime qu’il ne saurait être question de « juger des lampistes seuls », à savoir les exécutants des vols.

Népotisme et impunité pour le clan familial

Ce n’est pas la première fois que l’entourage de Ben Ali est aux prises avec la justice. Selon Libération, le même Imad Trabelsi aurait ordonné le vol de la voiture du PDG de BMW en Allemagne, « avant d’être contraint de la restituer contre un abandon des poursuites ». Cette histoire n’a jamais été confirmée, d’autres sources rapportant qu’il s’agissait de la BMW d’un footballeur célèbre.

Moncef Ben Ali, frère du Président, a, lui, été impliqué dans un trafic d’héroïne conséquent dans les années 90, la « couscous connection ». Il a été condamné par contumace à dix années de prison par la justice française mais ne purgera jamais sa peine.

Très contesté par l’opposition tunisienne en exil, le clan familial du président Ben Ali détient plusieurs postes clés dans le pays. Sa femme, Leïla Trabelsi, est la personnalité la plus contestée du pays. Accusée de népotisme, elle a permis à ses proches d’accéder à des postes clés.

Ses beaux-fils font partie des hommes d’affaires les plus influents du pays ; Najet Trabelsi, sa cousine, est députée ; Belhassen Trabelsi dirige l’un des plus grands groupes industriels du pays ; son amie Alya Abdallah dirige la Banque de Tunisie…

Le dernier coup d’éclat de Leïla Trabelsi a été la fermeture du lycée français de Tunis en 2007, permettant à son amie Souha Arafat, la veuve de l’ancien dirigeant palestinien, d’ouvrir un établissement privé international. La petite affaire s’est finie en brouille financière entre les deux femmes.

Zineb Dryef

Source : Rue89.com