Image extraite de la couverture de "Encyclopédie de l'amour en Islam" de Malek Chebel.

Tout porte à croire que l’Arabie s’apprêtait à vivre une révolution sexuelle juste avant l’arrivée de l’islam. Les récits sur une prise de pouvoir imminente des femmes au VIIe siècle abondent. Telle cette fille de la tribu des Banou Ameur qui faisait le tour de la Kaaba à moitié nue et qui chantait à la gloire de son sexe. Le prophète Mohammed, selon les meilleures sources, séduit par sa beauté, l’avait demandée en mariage avant d’en être dissuadé par ses proches. Telles aussi ces femmes qui venaient s’offrir au Prophète sans formalités ni contrat, et dont le Coran a fait écho (XXXIII, 50). La gente féminine avait une effronterie et une indépendance qui en surprendraient plus d’un aujourd’hui.

Le lecteur des recueils des hadiths (dits du Prophète), comme ceux d’un Al-Bukhari, sera saisi d’étonnement par ce propos d’Aïcha évoquant la multiplicité des partenaires à l’époque pré-islamique : « Avant que l’Envoyé de Dieu ne vienne par la vérité les réduire à un seul, celui que nous pratiquons depuis lors. » La femme jouissait de son corps comme elle l’entendait. « Ainsi cette dame qui implantait pendant la fête foraine son chapiteau signalé par une bannière (raya), et y recevait tous les hommes qu’elle désirait ; à la saison suivante et sous le même chapiteau, elle réunissait derechef tous ses amants et désignait arbitrairement l’un d’eux comme le père de l’enfant qu’elle portait. » Autre récit dans ce hadith, ce mari qui, constatant que sa femme ne le désire plus, lui vante les vertus morales et viriles d’un homme de leur voisinage lui conseillant d’aller le voir.

Mieux encore : un long passage du Coran sur les rapports sexuels après la rupture du jeûne suggère que l’abstinence en la matière avait été imposée puis abrogée, de même qu’il avait fallu sévir pour empêcher l’acte amoureux dans les mosquées (II, 187).

La loi allait achever de contrecarrer cette révolution sexuelle féminine, surtout dans la Révélation de Médine. Omar, le prude et autoritaire compagnon du Prophète, y pourvoira grandement. Nombreuses sont les exégèses prestigieuses du Coran qui consacrent un chapitre à part intitulé « Ce que du Coran a été révélé (ma unzila) par la bouche d’Omar », où plusieurs de ces versets ordonnent aux femmes de… raison garder.

Youssef Seddik
Écrivain et philosophe tunisien

Source : JeuneAfrique.com