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Le SMSI est fini, Mr Schmidt ( ) est rentré dans son pays la tête haute, d’autres sont rentrés en cherchant leurs têtes… L’opposition a crée victoire, et elle l’a mérité, le monde entier sait aujourd’hui que la Tunisie n’est pas seulement le pays du jasmin, mais il y’a autre chose à voir du côté de certaines ruelles sombres !

L’espoir blessé

Pour autant, le SMSI demeure une occasion, en or disaient certains, mais qui devrait constituer une étape particulière d’un processus de réveil de l’opposition. Le réveil était long certes, plusieurs raisons objectives que subjectives ont généré cette hibernation, mais les prémisses du réveil sont là et c’est l’essentiel.

Ce réveil s’est manifesté notamment par cette aspiration de part et d’autre des franges de l’opposition, au moins dans le discours et fait et gestes apparents, dans un rassemblement uni face au régime.

En face, la réponse du régime n’était pas totalement au rendez-vous, elle n’était pas à la mesure de l’attente et des aspirations, la politique du bâton et de la carotte est privilégiée, ce qui marque le souci du régime de ne pas paraître ni aussi faible, qu’il capitule, ni si fort qu’il soit arrogant et muet.

L’espoir est blessé, agonisant peut-être, mais surtout il n’est pas mort…il ne doit jamais mourir ! nous continuerons à avancer même à petits pas, car celui qui n’avance pas en ces temps difficiles recule. Point de place à l’hésitation, point d’état stationnaire…

Le défi du rassemblement

Cette « union » de l’opposition constitue une force tellement oubliée ou écartée, que certains ont fini par désespérer ! l’opposition tunisienne était prisonnière d’une approche réductrice et très opportuniste ! Le réveil était tardif mais important, et il n’est jamais tard pour bien faire ( )…

Le défi d’aujourd’hui est double et il est abyssal, il se tient à deux éléments essentiels : le rassemblement d’abord et rien que le rassemblement, et ensuite définir les contours de cet espace dissident pour assurer la réussite d’un éventuel processus collectif de changement.

Rassembler l’opposition aujourd’hui n’est pas une « mince affaire », il faut saluer cette volonté exprimée par l’initiative du 18 octobre et matérialisée sur le terrain par une « coexistence pacifique » d’idiologies distinctes et d’approches différentes concrétisée à l’intérieur de 4 murs, et autour de revendications communes qui transgressent les clivages et les différences. Ce rassemblement constitue à mon sens la grande victoire des initiateurs du 18 octobre, plus que la médiatisation et la découverte des ténèbres tunisiennes.
Toutefois la situation n’est pas si rose et si prometteuse, sachant que le chemin est encore long et plein d’embûches et qu’aussi bien les gens d’en face que certaines brebis galeuses ne resteront pas les bras croisés. La situation pourrait évoluer dans un sens comme dans l’autre, si l’opposition ne respecte pas deux éléments essentiels :

1- le rassemblement ne signifie guerre l’effacement des différences dans les approches et les programmes politiques, ni la dissolution des partis et des orientations. Tout en assurant la diversité, l’opposition assumera la différence. Les confrontations entre projets et opinions diverses sont nécessaires pour assurer la pérennité d’un paysage politique sain ; mais ce débat essentiel devrait être relégué à une phase ultérieure, où la démocratie permettra son éblouissement et sa réussite. Le souci majeur de l’opposition actuellement est d’optimiser ses chances pour bouleverser le paysage politique actuel et assurer le changement, les efforts doivent être dirigés vers un seul obstacle : le système, et une seule finalité : le changement.

2- Etablir une charte d’honneur entre participants qui favorise l’harmonie et une certaine symbiose dans les faits et gestes de l’opposition. Ainsi cette charte pourrait assurer un « minimum vital » entre les différentes orientations, et permet d’éviter tout écart ou décision unilatérale, quelles que soient les réponses de ceux d’en face ou leur « marché de séduction ». L’étape qui s’ouvre est pleine de surprises et d’événements attendus et inattendus, et tout pourrait se produire, la chose et son contraire, d’où la nécessité absolue de formuler cette charte de « bonne conduite » face à d’éventuels événements et propositions futurs.

Le défi de l’élargissement

Le paysage politique tunisien en général est très réducteur, même au niveau de l’opposition dite légale, les raisons sont connues et il est improductif de les marteler de nouveau… Un paysage où la démocratie est marginalisée ne peut que fournir une mascarade de démocratie et un SMIG très controversé de liberté !

L’opposition est condamnée à reconstruire son espace pour mieux le gérer, et toucher ainsi toutes les classes et catégories sociales et économiques, et gagner des terrains et des endroits longuement oubliés ou marginalisés. La reconquête du pouvoir commence par la reconquête de ses piliers, et un de ses piliers majeurs demeure le peuple et ses institution formelles ou informelles.

Ainsi, redéfinir l’espace vital de l’opposition nécessite la recomposition de son tissu ; et face aux énormes défis aussi bien de l’intérieur que de l’extérieur, certaines interrogations semblaient être pertinentes et exigent une totale clarté… L’opposition serait-elle restreinte aux partis dits grands et majeurs ? serait-t-elle limitée à la représentation intérieure ? et quel rôle attribuer alors à l’extérieur ? Quelle place les indépendants et les associations civiles pourraient-ils assurer ? l’initiative du 18 octobre et à travers ses initiateurs constitue-t-elle une étape finie dans un processus plus large et plus compliqué ? où serait le noyau de toute initiative ultérieure et sa légitimité concrète ?

Nul doute qu’une situation nouvelle commence à s’installer en Tunisie, et elle est susceptible d’évoluer rapidement dans l’avenir proche, nul doute que de nouveaux intervenants sur la scène politique dissidente ont marqué relativement le paysage contestataire et pourraient influencer sa trajectoire future.

Ainsi certaines personnalités inconnues auparavant, ont contribué à travers leurs voix ou leurs plumes à enrichir l’espace de la construction et de la démolition, de même certaines associations civiles de défenses des libertés, ou de droit de l’homme ont accompli un travail énorme en démasquant l’arbitraire et l’injustice…

Un nouveaux champs d’expression a vu le jour et a permis de faire avancer les revendications et les demandes de liberté et de justice en fondant un espace de débat et de construction. Ainsi l’Internet, ses cites et ses forums de discutions ont contribué à faire avancer la contestation et même à lancer des initiatives originales et percutantes, « YEZI FOK » en est l’exemple par excellence.

Il y’avait une vie avant l’Internet, et il y’a une autre après, les cites d’opposition tel que Tunisnews, Tunezine, Nawaat, Al Hiwar, et d’autres… et à travers leurs participants et intervenants anonymes ou connus, ont acquis une place importante, leurs efforts quotidiens pour apporter l’information, construire l’idée, suivre la revendication, débattre en toute liberté, est à saluer sans restriction et sans équivoques et de tout bord ! Une place doit être assurée à cette forme d’opposition originale et pénible, certains la nomment déjà « la troisième opposition » !

De même l’apparition de nouveaux partis politiques malgré l’environnement hostile, devrait être tenue en compte surtout qu’ils apportent un souffle nouveau pour assurer la diversité du tissu politique tunisien. Nous faisons allusion au parti libéral méditerranéen « PLM » et le mouvement de la Rencontre Réformatrice Démocratique « RRD » connue par « LIQA ».

Le rôle acquis par l’extérieur est important, et face à l’inexistence d’espace de liberté à l’intérieur du pays, « l’étranger » a montré sa capacité à profiter du champ permis, ce qui a constitué une bouffée d’air pour les gens restés au pays et à leurs revendications. Le mutisme obligé de l’intérieur a trouvé la parole à l’extérieur. La place de cette diaspora combattante doit être tenue en compte, le tunisien de l’extérieur est un tunisien tout court, acteur ou figurant, sa représentation ne doit pas être marginalisée dans tout processus de rassemblement de l’opposition.

L’opposition de demain, la Tunisie de demain

Ainsi se forme un nouveau panorama, et tous ces acteurs de l’espace contestataire tunisien doivent être représentés dans toute initiative ; tout oublie, ignorance ou marginalisation ne peuvent que réduire le champs de manifestement et toucher à sa crédibilité. L’opposition tunisienne ne se réduit plus à quelques personnalités ou partis politiques, elle est plus riche plus diversifiée, elle n’acquit plus sa légitimité à travers l’ancienneté et l’histoire uniquement ? sa légitimité se concrétise aujourd’hui sur le terrain, et à travers le projet qu’elle propose à la société, et l’apport concret qu’elle pourrait fournir.

La Tunisie de demain sera certes différente, la démocratie de demain se construit aujourd’hui dans les comportements des uns et la mentalité des autres. La réussite d’un tel projet de changement exige la qualité du contenu, la qualité de ses initiateurs, et la qualité de son environnement… la qualité certes, mais aussi la quantité… et la quantité exige le rassemblement et la non l’exclusion… l’opposition n’est pas une sélection, c’est un honneur, et La Tunisie demeure la patrie de tous les Tunisiens. Nous continuerons le chemin de croix ensemble, avec une branche d’olivier dans une main, et dans l’autre….un brin de jasmin !